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15/12/2016

Plutôt qu'une banque, Macron a braqué l'électorat UMPS

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La bataille de 2017 repart et déjà, l'UMPS va revenir en force dans la bouche des responsables FN car c'est plus facile à dire que LRPS. C'est énervant, irritant, exaspérant, que cet UMPS. C'est évidemment faux, une grossière approximation, une tournure habilement trouvée par Marine le Pen pour marquer que les similitudes étaient trop fortes entre les deux principaux partis au pouvoir depuis 30 ans. C'est sans doute moins faux sur le thème qui fait le miel du FN : l'immigration. Dans le nombre de personnes accueillies et expulsées, repoussées, ou celles qu'on va draguer. Dans les motifs d'immigration économique contre les obligations au droit d'asile, les différences sont infimes. Certes, il n'y a pas eu ministère de l'Identité Nationale, mais pensons au propos de Valls sur les roms ou encore son sermon surréaliste à Angela Merkel sur l'accueil des réfugiés syriens. Différent de LR ? Pas évident... C'est bien là le pire, il y a une convergence objective dans quelque chose de peu gauchisant, mais qui suffit au FN pour taper : tant que les attentats commis en France seront le fait de personnes au noms non "souchiens", tant que l'on instrumentalisera délinquance et islam ou délinquance et origine ethnique, ça sera le boxon...

Hormis cela, les différences existent. Sur l'éducation, la santé, les questions sociétales, à moins d'être d'une mauvaise foi troublante, les options divergent. Un peu seulement, mais elles divergent. En somme, l'UMPS n'existe pas, quand on y regarde de plus près, et c'est là le problème. Qui y regarde de plus près, aujourd'hui ? Qui décortique les programmes, les propositions, les chiffres et faits de chaque camp ? Ceux qui sont déjà archi sûrs de leurs bulletins de vote... Eu égard au naufrage vécu par les sondeurs lors de la primaire à droite, la prudence est de mise sur les chiffres qu'ils avancent, mais selon eux 15% seulement des électeurs avaient voté en fonction des programmes des 7 candidats. Les gens ont voté pour Fillon parce qu'il "avait l'air honnête" et se sont finalement détourné de Juppé parce qu'il "avait l'air plus vieux" et de Sarkozy parce qu'il est vérolé. Vraiment...

L'UMPS c'est le début de la triangulation politique française avec le Front National qui oblige les autres à se positionner. D'où le passage de la séquence électorale où les leaders de ces partis essayent de s'éloigner de leur centres respectifs pour ne pas être taxés "d'UMPS compatibilité". Fillon dit qu'il sera vraiment de droite, pas petit bras. A gauche, la dynamique est dans le dos d'Hamon qui dit que lui, il va raviver le feu social sans plonger dans les eaux troubles du libéralisme. L'étonnante nouvelle, c'est Macron : Macron c'est l'incarnation absolue de l'UMPS. Il a des copains dans les deux camps, des idées des deux camps et des sympathisants dans les deux camps (2/3 pour la droite selon le dernier décompte). Techno de formation, banquier d'expérience, son premier meeting de la porte de Versailles a vu la foule applaudir à des mesures complexes comme on en n'entend plus guère que dans les congrès de notaires. Preuve que la foule s'en fout du programme. Macron, il est jeune, porte bien le costard, il a le feu. Au moment où l'UMPS est vilipendé, percer avec leurs idées relève du génie. Macron c'est un grand banquier qui a du chanter dans sa jeunesse sur "Antisocial" de Trust et qui dans sa maturité emmerde l'UMPS en récupérant leurs électeurs. Ca relève du joueur de bonneteau, certes, mais de classe mondiale l'escroc.

 

13/12/2016

Et si 2017 ressemblait à 1969 ?

ob_170252_hqdefault-1.jpgPosons le en préambule : comparaison n'est pas raison. A l'évidence, le monde de 2017 n'a pas grand chose à voir avec celui de 1969 et chercher un décalque de campagne présidentielle à 50 ans d'écart ne peut marcher. Nous étions en pleine guerre froide, dans un monde bi-polaire, où la France connaissait le plein emploi et une société où les strates de classes sociales étaient bien moins poreuses et la peur du déclassement, absente. Alors, l'extrême droite n'existait pas. Tous éléments qui dessinent une France fort différente d'aujourd'hui. Et pour autant, au petit jeu des comparaisons historiques, je trouve que l'élection à venir ressemble beaucoup plus à 1969 qu'à 2002 comme on veut nous le dire par paresse, parce qu'il y aura des candidatures nombreuses à gauche et un FN au second tour (ce que personne ne voyait venir, fin 2001...), mais à y regarder de plus près, l'élection fait plutôt furieusement penser à celle de 1969. 

Dans le casting, on peut effectuer un certain nombre de parallèle, 4 au moins.

Hollande, c'est de Gaulle. Oui, je sais, écrit comme ça ça fait étrange. Mais justement, c'est de Gaulle avec le bénéfice de l'expérience : il sait que le référendum est perdu d'avance et a la lucidité de se retirer du jeu avant de subir l'opprobre publique. Du coup, il est le grand absent, le grand impensé de l'élection ce qui oblige tous les autres à boxer face à un ring vide : même ceux qui s'inscrivent dans la continuité d'Hollande ne le défendent pas et pour les adversaires, le responsable peut facilement esquiver les coups avec la célèbre feinte "pas mon bilan, j'étais pas pleinement aux manettes".

Valls, c'est Deferre, le socialiste qui espère faire bonne figure dans une gauche déchirée, divisée et en pleine décomposition, qui ne voit pas l'attente de radicalité dans le pays et qui y va quand même. Deferre à fini à 5%, Valls peut faire ce score, comme un membre du Pasok en Grèce, débordé sur sa gauche par Syriza, représenté en France par la France Insoumise de Mélenchon. Et la SFIO agonisante a crevé 2 ans après pour renaître dans un PS plus volontaire et socialement ambitieux. Si un autre l'emporte dans la primaire, le PS peut espérer arriver à 2 chiffres, et encore. Hamon arriverait à grapiller des voix sur Mélenchon, Montebourg un peu moins, et Peillon quasi pas. Pour les socialistes, 2017 sent vraiment le chant du cygne comme 1969 a sonné la mort de la SFIO.

Mélenchon, c'est Duclos. Rassemblant toutes les voix issus des mouvements sociaux (Mai 68 et #NuitDebout + les ZAD et l'opposition aux lois Macron et El Khomri) qui voient bien que l'alternative à gauche ne viendra pas d'une SFIO agonisante et le boulevard qu'il a face à une gauche qui se déporte vers Macron. Duclos avait fini à 2 points du deuxième tour. Mélenchon est sur une dynamique de même sorte ; pour l'heure très loin de Fillon/Le Pen, mais il nage en ce sens. Surtout, il laisse le PS a des années lumières : quand la recomposition se fera à gauche, le programme commun ne prendra pas ses ordres à Solférino. 

Blanc bonnet / Bonnet blanc, c'est Fillon/Macron. Mêmes lignes, mêmes programmes, mêmes postures, l'un plus légitimiste que l'autre, m'enfin rien d'emballant. Je ne pousse pas d'avantage le mimétisme sur ce point car Fillon se réclame de Pompidou et ça serait faire insulte à celui qui a mué de le comparer au chevrotant Poher... Non, là où le parallèle vaut, c'est quel les sondages, déjà, donnaient Poher gagnant. Pompidou l'emportant avec 58% des voix, ça doit inspirer beaucoup d'humilité à l'ensemble des candidats. Depuis que Fillon a déjoué les pronostics des sondeurs, tout le monde se voit un effet Fillon. Macron, Hamon pour la primaire de gauche, Nicolas Dupont Aignan pour la catégorie l'espoir fait vivre, le côté chamboule tout pourrait jouer. 

Comme pour 1969 où la campagne sans favori avait vu des yo yo d'opinion, 2017 se jouera sur quelques coups d'éclats. Déjà le granit Fillon se fendille sur ses flous programmatiques (sécu, fonctionnaires, Syrie...) et l'idée qu'il accède au second tour face à Marine le Pen n'a plus rien de certain. Laquelle, doté de la base la plus solide voit elle aussi le début des emmerdes avec les querelles internes qui ne sont pas sans rappeler Le Pen père face à Mégret. Peu de chances que ça implose avant l'élection, mais avec l'accélération, qui sait. Et avec une scission des traditionnalistes du sud est, le FN s'exclurait tout seul du second tour (c'est bon de rêver, je sais). 

Au 2ème tour de la présidentielle, l'abstention avait explosé tous les records. Le dégoût de la classe politique actuelle pourrait nous mener vers le même genre de scénar. L'héritier de Pompidou serait alors un moindre mal...  

 

10/12/2016

PISA, Dorian Gray du temps politique

dorian-gray-5.jpgJeudi, les conclusions du rapport mondial sur l'éducation, PISA, ont été publiés. Comme chaque année, la France se distingue, hélas, par une aggravation des inégalités nous faisant vraiment basculer dans une société où le destin se joue de plus au berceau, pour reprendre l'expression de Camille Peugny. Gavée aux éléments de langage et habituée à la communication en flux tendus, la cellule riposte de François Fillon n'a pas manqué de descendre en flèche l'action de Najat Vallaud-Belkacem. En omettant, que ce que Pisa a sanctionné jeudi, c'est le bilan éducatif du quinquennat Sarkozy...

Evidemment, les élèves de primaires qui viennent d'être évalués sont nés il y a entre 6 et 10, donc alors que Nicolas Sarkozy était président et avait eu des idées incroyablement brillantes comme mettre un DRH de l'Oréal à la tête du ministère de l'Education Nationale et encourager la réussite éducative en supprimant 80 000 postes de profs au moment où notre démographie voulait que nous ouvrions des classes...

Ce quinquennat aura mis fin à la saignée et même, relancé un certain nombre de recrutements. Pas assez, pas assez dans les ZEP ce qui ne laisse pas augurer d'un rebond spectaculaire sur le terrain des inégalités, mais un certain nombre de recrutements tout de même. Une augmentation du salaire des profs en fin de quinquennat, insuffisante elle aussi mais notable tout de même, est une tentative louable et assurément nécessaire de revaloriser le métier de professeur. A vrai dire, il est tout bonnement inconcevable d'aller à l'encontre de ce mouvement : dans une économie où la connaissance joue un rôle de plus en plus cardinal, ne pas investir dans l'éducation de tous est une forme de suicide collectif. Or, le programme de François Fillon entend à nouveau casser la dynamique à l'oeuvre... Ce qui n'empêche pas que Fillon élu en 2017 d'engranger des résultats internationaux prometteurs : les résultats PISA allant jusqu'à 2022 devraient marquer une inversion de la courbe dépressive et souligner les progrès de la France. Progrès liés au quinquennat Hollande... 

Je suis peu suspect d'emballement hollandais, d'extase socialiste, mais là n'est pas le sujet. Je crois sincèrement qu'on devrait repenser notre rapport au temps politique à l'aune de nos réactions à PISA. Car la dénonciation des équipes fillonistes recèle plusieurs possibilités : soit ils n'ont pas compris le fonctionnement des résultats et l'analyse produite. Tant de stupidité à ce niveau de l'état serait inquiétante. Soit ils ont très bien compris, mais espèrent que les électeurs tomberont dans le panneau et seront d'accord pour accabler le bilan actuel et chanter les louanges éducatives en 2019 d'un gouvernement qui fermera des classes. Tant de cynisme et de mépris électoral serait proprement dégueulasse. Hélas, à moins d'être soi même complètement truffe, il ne fait nul doute que c'est la seconde option.

PISA c'est Dorian Gray, un portait fictif de la vie politique française où certains veulent lire une jeunesse sur un corps en réalité ravagé. Mais PISA souligne surtout et plus globalement notre ambiguïté à l'égard du temps long en politique : il en va de même pour notre rapport à l'emploi (ou au chômage, c'est selon), l'industrie, le changement énergétique et aux autres décisions qui exigent un temps très long. Cyclique, au-delà de la durée d'un mandat. A contrario, les taxes et mesures fiscales sont, elles, instantanées, d'où l'appétit qu'elles suscitent chez les commentateurs. Peut-on mettre fin à cette inconséquence ou cette courte vue ? Assurément pas avec nos institutions. Cette maladie du court termisme est alimentée par la professionnalisation du politique : tant que chacun pèse ou soupèse ses arguments à l'aune de sa réélection, nous sommes perdus. Seule une limitation des mandats dans le temps, seul l'idée de venir servir pour une mission circonscrite à son mandat peut garantir le temps long. François Hollande a fait un premier pas en renonçant à se représenter, pourquoi pas tenter un coup de poker sur le crépuscule du quinquennat en tentant de faire passer une réforme institutionnelle qui servirait les générations suivantes. Sa popularité n'en serait que renforcée et il pourrait partir en retraite avec un sentiment de devoir accompli. Noël approche, cette période est propice aux rêveries folles en enfantines. Ne nous en privons pas.