09/09/2011
Habemus opus magnum !
L'intelligence. C'est le seul outil qui permet à l'homme de mesurer l'étendue de son malheur, écrivait le regretté Desproges avant d'ajouter que comme pour les parachutes, quand on en n'a pas, on s'écrase.
On peut qu'être d'accord avec Desproges en sortant d'Habemus papam de Nani Moretti. Le film a d'autres atouts, notamment la très grande qualité de tous ces acteurs septuagénaires et octogénaires au premier rang desquels un exceptionnel Piccoli, d'une humanité proprement émouvante. La mise en scène, l'humour cabot que l'auteur ne se refuse pas et quelques clins d'oeil appuyés à l'actualité (notre chef de l'Etat est égratigné avec une délicatesse de couturière), oui, tout cela fait qu'Habemus papam est un bon film. Ce qui l'élève dans une catégorie supérieure c'est cette intelligence de l'époque, du monde dans lequel vit cet Italien. Là-bas la religion catholique est si puissante qu'elle rivalise encore avec le pouvoir politique. Il faut voir tous ces cardinaux refuser le pouvoir qu'on leur promet au motif qu'il pourrait être trop grand pour eux et le comparer à l'Hubris qui s'abat sur tous nos gouvernants comme la vérole sur le bas clergé breton. Certains veulent emporter les foules, d'autres veulent se comporter, humblement, de suivre. Adieu veaux, vaches, cochons, passe droit dans les musées, prébendes, niches fiscales...
Moretti est trop fin, trop subtil pour nous tendre les perches du politique. Pour l'évasion de la religion, il choisit le théâtre. Celui de Tchekhov et de ses mouettes pour exprimer une liberté totale vers laquelle il faudrait tendre. Il faut imaginer Sisyphe heureux et Hollande en gabian pour vraiment comprendre ce que voulait dire Moretti... Je suis moi même choqué par ma seconde image : imaginer un gabian nous expliquant qu'on ne pourra pas recruter de profs supplémentaires ou garder l'hôpital entièrement public car ça menacerait notre AAA est une image proprement insultante. Que la CGT me pardonne. Oui, que la confédération des gabians têtus ne m'en veuille pas de les comparer à un animal aussi proche de la girouette que le François Hollande. Pardon. Pardon à toi aussi qui lis ces quelques digressions sur cette primaire de plus en plus primitive, il est temps que cela finisse avant d'avoir commencé d'ailleurs.
1h42, pour un semi-marathon c'est pas mal. On doit pouvoir gagner 10 ou 15 minutes sans trop se faire mal. Pour le film de Moretti, il en va de même. A part ces légères imperfections, quelques chromos, quelques ralentis un peu prolongés, il sera beaucoup pardonné à Moretti, ce grand échalas dégingandé à qui il ne manque qu'un léger bedon pour s'être freudisé dans le film (il joue un psy) qui, plus qu'un grand blasphème, s'est juste rendu coupable de vouloir nous faire méditer l'époque. Méditer comme une grande prière effectué par un anticlérical viscéral qui se dit que, lorsqu'ils sont tous devenus fous, il y a peut être une certaine sagesse à chercher aussi de ce côté du goupillon. En attendant, donnez nous seigneurs de la caméra, notre pain hebdomadaire de films de ce tonneau et ma volonté sera faite.
06:57 | Lien permanent | Commentaires (5)
Commentaires
Pas encore vu Habemus Papam. Pour l'instant j'epuise les fonds de la filmographie de Nanni Moretti, que je ne connais pas encore (courts-metrages) a la Cinematheque.
Écrit par : cecile | 09/09/2011
Je connais pas les courts-métrages non plus mais Palombella Rossa m'a donné envie de jouer au water-polo (et de ne pas noyer le communisme...)
Écrit par : Castor Junior | 09/09/2011
"Io sono un autarchico" ou "La messa e finita" te plairaient aussi. J'ai vu ses trois premiers courts-metrages tournés en Super 8 a 20 ans et c'est incroyable car tout y est déjà : l'église catholique, les communistes, l'auto-critique, l'humour décalé.
Écrit par : Cecile | 09/09/2011
Se trovo tempo, daro un occhiata
Écrit par : Castor Junior | 09/09/2011
Spero bene.
Écrit par : cecile | 11/09/2011
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