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31/08/2014

L’air n’est pas plus respirable, au contraire

aire-irrespirable-capital-rusa-agosto_PREIMA20100809_0099_5.jpgJe me souviens sans peine. C’était le 6 mai 2012 à 20h02. Déjà délesté de mes illusions sur Hollande président de gauche, je trinquais avec nombre de comparses qui me remontaient le moral avec un argument de bon sens « allez, au moins, l’air sera plus respirable ». Pas faux. Plus de discours de Grenoble, plus de mouton égorgé dans la baignoire, plus de « casse toi pauvre con ». Une France toujours libérale, mais réconciliée, c’est bien le moins. Or, 28 mois après, je crains que ce ne soit le contraire. Via trois exemples, au moins.

Sur le mariage pour tous, réforme même pas de gauche, mais progressiste, Hollande est coupable d’un pourrissement sans nom. Qu’on aime ou pas ce genre de réforme, on assume ses convictions et on la passe d’un coup comme on arrache un sparadrap. Un an. Un an de débats émaillés d’horreur telles que « la liberté de conscience des maires ». Un an à faire émerger les remugles homophobes qui pourrissaient depuis des années, étouffés par un effet positif du politiquement correct. Résultat, les homophobes de tous crins se disent baîllonnés. Imagine-t-on les tenants de la peine de mort venir hurler ? Bah non, Mitterrand l’a fait passer en trois semaines et les tenants de la guillotine ont fermé leur gueule et accepté le sens de l’histoire. Mais ce benêt à dû croire que laisser le débat longtemps galvaniserait ses soutiens. Quel aigle de la stratégie…

Sur l’immigration… D’accord nous n’avons pas d’Hortefeux condamné, de Morano tonitruante ou de Besson en réincarnation de Marcel Déat. Mais après ? Valls, puis Cazeneuve ne nous expliquent-ils pas doctement depuis plus de deux ans que l’alpha et l’oméga de la délinquance ce sont les roms et les musulmans ? Bah si. Ils reprennent les causes identitaires, montent les uns contre les autres, parlent « d’ennemis de l’intérieur » voient des terroristes en puissance partout et semblent avoir complètement oublié toute cause sociale à la délinquance. Plus de police de proximité, plus de réponse urbaine, plus de renforcement des transports pour lutter contre l’isolement. Non, envoyez les CRS. Bon…

Sur la politique économique. J’entends des socialistes me dire « mais tu as vu la violence des attaques qu’on subit ? » et je ne sais s’il faut rire ou pleurer. La violence ne peut être que dans le camp de ceux qui ont trahi les idéaux de la gauche en humiliant les grévistes, les intermittents, en culpabilisants les chômeurs et en dénigrant l’impôt… Du temps de Sarkozy, la politique économique était révoltante pour des électeurs de gauche, mais ceux de droite s’en accommodaient fort bien. Aujourd’hui, par réflexe pavlovien prévisible, les électeurs UMP hurlent contre leur propre programme et ceux de gauche pleurent l’occasion ratée. Un torrent de larmes qui ne se tarira pas jusqu’à 2017, notre premier ministre en ayant fait le serment. Décidément, l’air n’est pas plus respirable aujourd’hui qu’hier et au second tour de la présidentielle 2017, chers amis qui avez la chance d’avoir une maison de campagne ou une belle terrasse avec barbecue, vous pouvez prévoir de m’inviter, je n'aurai rien de prévu...

25/08/2014

Ce satané problème du chef à gauche

b2b_pe21.jpgBien sûr, on pourrait convenir d'emblée que Valls et Hollande ne sont pas de gauche et arrêter là. Mais puisque nos institutions les reconnaissent quand même un peu de ce côté là, on peut ajouter leurs noms à la liste tristement longue de ces dirigeants politiques de gauche qui ne savent pas être des chefs. Des tueurs. 

Je lis que l'entourage de Valls jappe qu'une "ligne jaune a été franchi". Tu parles, Charles. Virer Montebourg et Hamon ? Ils évoquent plutôt "une clarification". On va avoir le droit à quelques chikayas, des moulinets, mais rien. Car le fait est que depuis plus de deux ans, on peut dauber sur ces chefs là... Qui n'en sont pas, au sens politique du terme : ils n'inspirent pas le respect suffisant pour qu'on évite de leur marcher dessus. Hollande s'en fout franchement, il a trop l'habitude. Pendant 10 ans à la tête du PS, les lazzis et quolibets étaient son quotidien. Le pauvre homme a depuis longtemps été habitué de ne pas être pris au sérieux... Il n'y avait donc rien à attendre et sauf cataclysme, cela durera jusqu'en 2017.

Ce qui m'amuse (autant que ça me navre) c'est de voir que Valls aussi est un cow boy en carton pâte. Pas d'épaisseur, de la raideur en toc. Les grands chefs à plume en politique ne prennent jamais le temps de sortir la sulfateuse, ils intiment l'idée que ça pourrait gronder et tout se calme. Qui aurait critiqué ouvertement Sarkozy bien sûr, mais aussi Chirac ? Quand Sarkozy avait fait le mariole avec Balladur, 5 ans de goulag. Balladur ? Rayé des cartes. Ad lib. Idem pour Sarko ; s'il a fait des dizaines de malheureux avec ses remaniements ministériels, aucun responsable politique de premier plan ne s'est opposé au Président. Le plus véhément fut sans doute Devedjian et quand on voit ce qu'il a ramassé... 

Si Valls était doté de cette aura là, jamais Montebourg ne se serait permis ce truc énorme : convoquer le Monde dans son bureau pour expliquer que Valls fait une politique de crétin... Et là, Manuel est face à un dilemme chiffré : ayant dévissé de 9 points dans les sondages en un mois (pour le plus grand plaisir d'Hollande qui résout du même coup l'éventualité d'une primaire dans son camp pour 2017), il commence à payer son volontarisme sans ligne. La droite déchante face au bad boy, mais c'est surtout les sympathisants de gauche qui le quittent. Attaquer l'aile gauche n'est donc sans doute pas l'attitude la plus intelligente à inventer. 

Ce problème de leadership pose des problèmes plus pénibles que les querelles d'ego. Elles témoignent de l'absence d'une ligne claire. Sous Mitterrand ou sous Jospin, les critiques existaient, bien sûr, mais restaient sous le boisseau. L'aura de Jospin faisait cohabiter Mélenchon et DSK dans le même gouvernement. 35h et CMU pour le second, quelques privatisations pour le second : une synthèse, quoi. J'espère qu'Hollande et Valls ont profité de leurs vacances pour réviser leur histoire et en tirer les conséquences...

 

24/08/2014

Et si la donne changeait ?

1959386_356006547884673_5974602807239150301_n.jpgIl se passe quelque chose au royaume de France où l'on aime à dire que tout est pourri. Plutôt que de me lancer dans une ode de groupie, je me contenterais des faits. Un samedi d'août à Amiens, alors qu'il fait soleil, 900 personnes réunies dans un amphi pour écouter 2 philosophes et 2 économistes parler de la crise pendant plus de 2h et demie... La photo à gauche en est tirée. Plein à craquer, nous avons commencé (j'animais) avec une demie heure de retard, le temps d'ouvrir le second amphi... Et il y avait encore des ateliers en parallèle. 

Ces premières journées d'été de Nouvelle Donne m'ont fait du bien au moral. Une foule nombreuse, attentive et studieuse, curieuse aussi (une heure de questions) et surtout déconnectée des enjeux électoraux immédiats. Ce parti crée il y a six mois a des résultats modestes dans l'absolu (3% aux européennes) mais très importants si on les rapporte à la jeunesse du mouvement. La barre des 10 000 adhérents franchis en si peu de temps interpelle sur le vide à gauche. Le PS, premier parti de France, c'est 120 000 militants, dont 3/4 d'élus ou de personnes travaillant directement avec le parti... Là, j'ai vu des personnes de toutes âges, très mixtes (plutôt très blanc, soyons honnêtes) venir échanger, proposer et ne jamais baisser le niveau. Des ateliers, des propositions sans formule, un premier livre à 70 000 exemplaires, un second sur le chômage prévu à 100 000. C'est cette intransigeance avec l'exigence qui m'a séduit.

Le leader du mouvement, Pierre Larrouturou, est très abordable. Pour avoir dîné avec lui, je n'ai pas reconnu le portraitisé dans la presse, souvent dépeint par ses camarades du PS qui le déteste... Bien sûr il est possible qu'il pense à 2017, mais contrairement à d'autres, non seulement il dit que ce n'est pas le sujet, mais il les énumère sur le fond : démocratie (lutte contre l'abstention), emploi, partage du temps de travail et des richesses, transition énergétique. 

3% c'est trop peu pour peser sur le PS, mais celui ci est dans un état cataclysmique et s'enfonce dans la rhétorique thatchérienne du il n'y a pas d'alternative... Il faut lui en apporter une et une seule, rassemblant toutes les forces de gauche. Ce que j'ai vu ce week-end ressemblait bien à des fondations de reconquête. Plus qu'à construire. Pour m'avoir redonné de l'optimisme cher Nouveaux Donniens, merci.