Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

15/11/2015

Vivre dans une guerre qui n'en est pas une

v_02-01-P_3.jpgDonc, la ritournelle tourne en boucle depuis vendredi : nous sommes en guerre. Ha ? Une guerre, il y a deux camps face à face, éventuellement des alliés ou des opposants. On peut utiliser beaucoup de moyens pour lutter : l'aviation, la marine, l'envoi de troupes au sol, le boycott commercial, le blocus alimentaire, les tensions financières. Est-ce que l'une de ces solutions aurait pu être utilisée contre les bourreaux de vendredi ? A l'évidence, non. 

S'il y a une guerre, c'est uniquement contre Daech et ses 2 millions de $ de gains quotidiens, son armée grossissante, sa volonté d'embrigader. Ca oui. Mais sur le sol français, il n'y a pas de guerre. Or on sent dans la fracture qui point, une volonté de guerre et donc de guerre civile. Les solutions proposées en ce sens sont d'ailleurs tristement démagogiques : que ferions nous d'un Guantanamo à la française ? A quoi sert de réhabiliter la peine de mort ou la déchéance de la nationalité face à des kamikazes ? Bien sûr, il faut des changements face aux menaces qui pointent, mais pas d'effet d'annonces... Que va t'on avoir, là ? Un renforcement des caméras de surveillance ? Bloquer des sites et encombrer la justice qui est plus engorgée que jamais ? La France est au niveau de la Moldavie ou en Croatie en termes de budget du ministère de la justice... Toutes les lois post attentats réduisent les libertés individuelles, mais ne nous apportent pas plus de sécurité... L'autre choix est de s'asseoir sur le judiciaire et de faire de l'arbitraire en arrêtant tout ceux qui nous paraissent dangereux. Ca a l'air stupide, mais cela a déjà été proposé par l'ineffable Wauquiez. Si on apporte pas une réponse humaine et de moyens, cette approche à la Minority Report où l'on inculpe par anticipation, sera sortie du domaine de la fiction...

Si le choix de société est vraiment de se protéger, alors il faut accepter d'en payer le prix pour embaucher des forces de l'ordre et armées, équiper la justice. Les grandes fortunes, qui se sont enrichies de plus de 33% depuis l'arrivée d'Hollande (25% en un an pour les 500 plus riches) pourraient contribuer de façon exceptionnelle en réalisant que parmi les gisants de vendredi soir, il y aurait pu y avoir leurs enfants. Nous aider à nous barricader pour mieux vivre dans cette guerre qui n'est pas une. Si nous étions en guerre, personne ne sortirait au grand jour. Passé le désert d'hier, les terrasses étaient bondées, car il faut bien que nous vivions. 

14/11/2015

Se réveiller ennemi public

paris_match.jpgHier encore, j'étais innocent. Désormais, je ne peux plus me cacher la vérité : dans la guerre qui nous oppose à Daech, je suis l'ennemi. Pas moi intuitu, la preuve je suis toujours vivant. Mais mes semblables par centaines de milliers qui habitent l'est parisien. Non-croyants, consommateurs, blancs (en tant que symbolique du dominant, je suis bien certain que de nombreux non blancs sont tombés sous les balles aveugles des barbares, hier) et aisés ; comme moi, ils vivent dans des quartiers où la bien pensance règne en maîtresse et qui ne réalise pas ce qui a pu se produire hier.  

Je me contrefous de l'orientation sexuelle de mes amis et suis très vigilant à ce que ma prochaine soit en tous points mon égal. C'est d'un ennui profond (pour ne pas dire mortel, qui serait, en l'espèce, mal venu) que ces convictions. Elles sont même raillées toutes la journée par des éditorialistes moquant les "bobos". Et pourtant, c'est au nom de ces idéaux mous, ces idéaux fades, que les barbares ont tiré hier. Eu égard aux lieux choisis pour les carnages, on doute que ce soit des syriens qui soient venus là par hasard, mais bien, avec une infinie tristesse et comme pour Charlie, des Français qui voulaient détruire un modèle qu'ils jugent néfaste. Contrairement à certains actes passés, nous avions affaire à de réels guerriers fous, tous venus le torse ceint d'explosifs, sachant parfaitement qu'ils allaient mourir pour leur cause le soir même.

En frappant des bobos bisounours, ceux là même qui tentent de ne pas stigmatiser les musulmans, de ne pas amalgamer et d'essayer de recouvrer nos esprits, les terroristes d'hier réussissent parfaitement leur stratégie de division du pays. Contrairement aux attentats de Charlie Hebdo, dès hier soir la droite dure, les éditorialistes les plus à droite du Figaro ou de Valeurs Actuelles appelait à la guerre civile. De Wauquiez voulant créer un Guantanamo Français à Rioufol souhaitant que les musulmans défilent honteusement en psalmodiant "pas en mon nom". Rapidement, cette voix là va renverser la vague de l'opinion et s'ils n'obtiennent pas des actes forts (démembrement de mosquées salafistes, réseaux radicaux arrêtés) pousseront à l'insurrection et au renversement d'un régime trop clément. Marine le Pen qui était restée digne le 7 janvier à cette fois appelé à des mesures de plus en plus extrêmes : déchéance de la nationalité, expulsions en masse et autres interdiction de culte musulman. Malheureusement, il y a fort à parier que parmi tout ceux qui pleurent l'inhumanité des actes d'hier, nombre de français lui donnent raison. En des circonstances extrêmes, la loi du Talion trouve toujours des supporters. 

Prétendre pouvoir se protéger complètement du terrorisme est une chimère, le risque zéro ne peut exister face à 2 ou 3 000 types prêts à mourir pour leur cause. Vivre avec la peur au quotidien n'est pas une issue non plus. Entre les deux, il va falloir qu'on trouve un chemin commun, mais leur putain de stratégie est diablement efficace... A l'évidence, notre salut ici passe plus par un retour au calme là bas, mais à quelques milliers de kilomètres de notre sol et avec fort peu d'hommes, ils ne sont pas loin de nous faire dérailler... 

10/11/2015

Quand l'accélération nous masque certaines avancées

president2527s1.jpgHier, je lisais le numéro 1 du trimestriel Usbek & Rica, extrêmement sympathique explorant le futur et qui m'a commandé pour prochainement un article. Le numéro 1 date de l'été 2010. La préhistoire, en termes d'Iphone et de FUSAC chez les licornes. Il y a quelques minutes, pour l'histoire. Or, en lisant leur article "la démocratie, une idée neuve", leur illustration m'a saisi. On y voit une équipe composée de foot des dictateurs (un peu à l'image de celle que j'ai retrouvé, mais avec une composition un peu différente) dont une bonne moitié manque à l'appel en 2015

Dans les buts, Khadafi et avant centre Than Shwe de Birmanie, balayé ce week end par Madame Paix. Le départ d'Hu Jintao (ailier droit, comme Valls) est anecdotique, l'ouverture en Chine ne pouvant être décrétée que par d'ultras optimistes. En revanche, le départ du capitaine de l'équipe et égérie (il était en couv') du magazine Mahmoud Ahmadinejad est bien réel. L'Iran s'ouvre, se détend, reprend part au concert des Nations et avance à très grands pas vers un modèle de démocratie classique. Enfin en défense, Raul Castro a signé la fin du blocus avec les Etats Unis, s'il est encore très prématuré de parler de Cuba comme d'une île politiquement ouverte, nous ne sommes plus aux heures les plus fermées de l'île. Vous me direz ça fait 3 départs véritables et un assouplissement. OK, mais sur le banc de touche on retrouvait aussi Ben Ali, Moubarak et Gbagbo, tous remplacés depuis par d'authentiques démocrates.

6 changements, concernant près de 300 millions d'habitants (l'Egypte, l'Iran et la Birmanie en concentrant plus de 200 à eux trois...), soit 5% des habitants de la planète et 10% de ceux qui vivaient sous un régime dictatorial. En 5 ans. Et nos journaux n'ont pas une ligne là-dessus. Oublié le "printemps arabe", la "révolution de Jasmin", on ne parle plus que des "cohortes de migrants". 5 ans après, ou en étions nous ma bonne dame au 14 juillet 1794 ? On ne peut pas dire qu'un régime pacifié, débarrassé des oripeaux de la monarchie absolue, régnait en maître. Or, je me désole qu'aucun de nos dirigeants n'arrive à saluer ces nouvelles avec un peu plus d'ardeur, pour la bonne et simple raison que les bonnes nouvelles mondiales ne se traduisent pas dans les urnes. Hurler aux périls, montrer la fermeture (réelle) de la Turquie, agiter l'épouvantail Russe qui soutient Bachar (et qui est soutenu par le FN, alors c'est payant) voilà qui vous vaudra des laudes et permettra d'être écouté avec bienveillance dans un salon médiatique respectable comme, mettons "l'esprit du monde" de Philippe Meyer. Eux qui se veulent des esprits raisonnables et au dessus de la mêlée (c'est ainsi qu'ils se présentent, les bougres) feraient bien de relire quelques colonnes d'il y a 5 ans à peine, d'il y a 5 ans déjà, et y noter quelques progrès. Après tout, libre à eux de continuer à vociférer, mais dans ce cas, qu'ils réalisent que l'homme politique arguant que le monde allait mieux avec Khadafi et Saddam Hussein est Donald Trump. Sans doute un autre esprit au dessus de la mêlée injustement ignoré...