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09/06/2017

De la bienveillance en actes plutôt qu'en paroles

apologie-de-la-bienveillance-1024x683.jpgC'est toujours et encore la même histoire : la violence se trouve-t-elle dans la chemise déchirée du DRH dAir France ou dans les centaines de personnes licenciées malgré un groupe profitable avec l'Etat comme actionnaire ? La violence de la part de militants pacifistes qui s'opposent à un barrage ou un aéroport ou du détournement de l'Etat d'urgence contre le terrorisme pour séquestrer et arrêter arbitrairement des militants écologistes ? Et cette violence, passée sous silence, ne cesse de croître comme le prouve hier la volonté de faire rentrer les mesures d'exception de l'état d'urgence dans le droit commun. Impensable et pourtant en marche...

Demandez aux macronistes s'ils ont conscience de la violence de leurs idées, ils tomberont des nues. Ils se vivent comme l'opposé de la violence. Chez les macronistes, le maître mot est "bienveilance". Accordons leur ceci : ils l'incarnent. Dans les débats, ils invectivent moins que d'autres, tonnent rarement et n'injurient qu'à renforts de "saperlipopette" et autres "flûte à la fin". Bien peignés, chemises repassées et barbes taillées pour les hommes, mèches non rebelles et fard à paupières discret pour les femmes. Ils sont polis. Regardez leur porte parole, Benjamin Girveaux. Parfois la jugulaire sort un peu, on sent le pitt bull sous le labrador, mais il assène toujours ses horreurs d'un ton docte et endort les électeurs qui boivent son breuvage "bienveillant".

Ou est la bienveillance dans leur conception du chômage selon laquelle les personnes privées d'emploi sont les seules coupables ? Candidat, Macron répondait à la question posée par Bourdin "que diriez vous à un chômeur désespéré qui ne trouve pas d'emploi ?". Réponse :  "si j'étais chômeur, je me battrais". Vous la sentez, la bienveillance dégoulinante ? Idem pour la bienveillance qui fait d'Uber un "progrès", de "l'autoentreprenariat" un marchepied et de la réforme du code du travail un "abaissons les protections pour augmenter la compétitivité". Partout, en filigrane, il y a l'idée que les pauvres l'ont bien cherché et ne se remuent pas assez et que quand même, quand on veut on peut. C'est la violence folle, immonde, dépeinte par Ken Loach dans "moi Daniel Blake" film honni par le Monde comme "caricature gauchiste"... Avant que le même journal, cherchant une explication à la folle remontée de Corbyn dans les sondages n'envoi des journalistes en immersion aux côtés des demandeurs d'emplois au Royaume Uni et ne réalise que Loach avait parfaitement raison. Flicage généralisé, deux mois sans une livre avant d'avoir des droits ce qui fait que des milliers de demandeurs d'emplois se retrouvent à la rue du jour au lendemain... Pas raccord avec le grand et beau récit d'une société ouverte, mondialisée, cosmopolite, où le capitalisme est un jeu gagnant gagnant que le journal aime raconter, pour May comme pour Macron. Les 1000 personnes les plus riches en Angleterre possèdent autant de richesses que les 40% les plus pauvres. Un score du tiers monde où des "pays les moins avancés" comme on dit pudiquement. Des inégalités qui explosent, une inhumanité partout et des bastions de riches qui se barricadent et jettent de l'huile chaude sur les pauvres hères, c'est bienveillant, ça ? C'est non violent ? Allez vous faire cuire le cul...  

07/06/2017

Post élection, électeurs tristes

Post-Coitum-Animal-Triste.jpgDans 4 jours la France devrait être en ébullition avec 577 élections, mais force est de constater que tout le monde -fors les candidats et à la rigueur leurs équipes- s'en fout. Au fond, c'était prévisible : la dernière campagne présidentielle, incertaine comme jamais, a mobilisé tout le monde pendant six mois. Soirées électorales, débats à 5, à 11, puis le fameux débat de l'entre deux tours. Emissions spéciales, émissions inédites, et quelques soirées commentant les débats, décortiquant les stratégies et autres manoeuvres, la France n'a pas débandé politiquement pendant six mois. Une performance étonnante, mais qui forcément, appelle au repos. Pour notre bien-être collectif, il n'était pas possible et surtout pas souhaitable de continuer à s'écharper pendant encore quelques semaines.

Peu à peu, les nouvelles politiques sont passées au deuxième puis au troisième plan des journaux qui préféraient parler du festival de Cannes, des destinations des français pendant les ponts de mai et maintenant, de Roland-Garros. Ceci, pour le plus grand soulagement de Richard Ferrand dont les affaires sont largement aussi blâmables que celles de François Fillon et largement plus documentées, mais qui bénéficie de notre mansuétude collective par épuisement. Dans les matinales radio, les ministres invités n'ont pas à donner leur avis sur le comportement de leur collègue. Castaner hier, Pénicaud ce matin, depuis 8 jours, plus une question sur le sujet : impensable du temps du Pénelopegate.

Idem pour les dérapages homophobes de quelques candidats LREM, idem aussi pour l'infâme sortie du président Macron sur le sort des malheureux commoriens. Se moquer ainsi du malheur du monde, de la mort qui touche en mer ceux qui tentent de rallier Mayotte est immonde. Le président le sait, il s'est excusé et pas une question derrière. Fillon eut sorti cela pendant la campagne, il eut été cloué au pilori. Le Pen ? On aurait dit que le patronyme est éternel et que bon sang aryen ne saurait mentir. Macron ? On s'en fout. Trop tard. Bref, la Baraka de Macron continue et tout ce qui pourrait nuire au mouvement s'efface comme par enchantement.

Résultat ? Les sondages donnent un ras de marée pour dimanche 18 juin. Plus de 400 députés pour LREM. Plus de 66% soit le score du deuxième tour de Macron... Du aux 3/4 à un rejet de le Pen et non une adhésion au messie marcheur : le piège institutionnel se referme sur nous. Méfions nous des projections, évidemment : en 2002, la majorité présidentielle UMP totalisait 43,38% en national pour 398 sièges. Avec un score équivalent (42,9%), la majorité autour du PS et d'EELV en 2012 n'en obtenait "que" 331 députés. 67 députés d'écart avec le même score national, ce, car nombre d'élections locales se jouent à 2% près et peuvent basculer, ou non. Dans le contexte de 2017, l'écrasante majorité de ces basculements risquent de se jouer du côté d'En Marche : les militants FN sont écoeurés par le résultat du second tour et minés par les dissensions. Partout, ils brillent par leur absence et leur refus de faire campagne. Ceux de LR ne savent plus s'ils font campagne avec ou contre Macron, idem pour tant de militants du PS. Quand à la France Insoumise, la vague de la présidentielle s'est brisée sur la statue du commandeur Mélenchon et les dissensions et candidatures ennemies entre FI, Front de Gauche et PCF rendent chimérique l'espoir d'un groupe conséquent. Là encore, tout concorde pour que la dynamique profite à En Marche, seule mouvement à bénéficié de militants toujours hyper motivés, ne lâchant rien, tractant et cravachant malgré la fatigue car la perspective du triomphe est le meilleur des euphorisants.

Il ne s'agit pas de bouder où d'être mauvais joueur : Macron l'a emporté et il est logique qu'il ait une majorité pour pouvoir gouverner, sinon c'est le bordel. Il mérite une majorité relative, bien sûr, mais pas le boulevard qui s'ouvre devant lui. D'où les nombreuses propositions énoncées depuis des décennies pour mettre les législatives en proportionnelle intégrale avec une forte prime au parti arrivé en tête afin qu'il puisse gouverner. Mais encore une fois, Macron aurait pu être éliminé au 1er tour, cela s'est joué à quelques centaines de milliers de voix et il risque d'avoir plus des 2/3 de l'assemblée. Les forces anti libérales, anti loi travail qui vient étaient, si ce n'est majoritaire, du moins équivalent à la moitié des voix. Elles n'auront pas cent députés, peut être pas 50... 

En 2012, Hollande avait promis de réformer nos institutions et force est de constater que cette promesse a connu le même sort que le vote des étrangers. Soyons justes, il a amorcé la fin du cumul des mandats, mesure accélérée par la loi Bayrou sur la moralisation de la vie publique. Mais les 10% de proportionnelle intégrale, le redécoupage avec diminution du nombre de parlementaires, tout cela a fait long feu. Car arrivé au pouvoir en 2012 en battant Sarkozy de peu, Hollande avait trouvé des postes à 331 de ses petits camarades, lesquels ne pensaient alors plus follement qu'à leur réelection. Nous avons donc conservé pendant 5 ans de trop des institutions déconnectées de toute représentativité.

Dimanche dernier, on a connu les premiers résultats, ceux des français de l'étranger, ils confirment tout cela. Macron devait faire un quasi grand chelem avec 11 députés sur 12... Mais avec 20% de participation. Au niveau national, tout pousse à croire que nous aurons 50% d'abstention et que tout le monde s'en fout. Bayrou, notre nouveau ministre de la justice écrit depuis des décennies que la vie politique n'est plus pensable sans repenser de fond en comble les institutions pour qu'elles reflètent la démocratie. Le fera-t-il maintenant que les réformes en question amoindriront les pouvoirs de la majorité En Marche ? La réponse me semble dans la question, hélas. 

04/06/2017

Alerte enlèvement : identité collective

2785183627da075ba07ef5e9a8cf5.jpg"Métis, gay et thatchérien, Leo Varadkar sera le prochain premier ministre irlandais". L'ordre des qualificatifs ne doit rien au hasard. Cet article du Monde, hier, est un énième épisode dans le bras de fer entre identité individuelle et collective qui tourne systématiquement à l'avantage de l'esseulé. Ne soyons pas bégueules : dans un pays aussi conservateur et férocement catholique, le fait que le nouveau chef du gouvernement sois ouvertement homosexuel est un symbole fort. Mais un symbole. Comme son teint non crayeux. Très bien. Mais combien faudra-t-il de symboles sans actes pour que l'on change notre grille de lecture ? Combien d'échecs successifs de personnalités différents proposant une politique conforme pour que l'on cesse de tomber dans le panneau ? 

Au fond, c'est peu admissible par les bonnes âmes, mais Obama a vraiment une chance infinie que Trump lui succède. Il peut ainsi se targuer d'avoir incarné tout l'inverse de Trump. Ouverture, tolérance, coolness. Mais personne pour dire que si Obama était si fabuleux, Clinton aurait du passer dans un fauteuil ? On peut déplorer qu'il n'ait jamais eu un Congrès et un Sénat vraiment à sa main, mais tout de même : 2 mandats, 8 années de pouvoir et 8 années au cours desquelles les inégalités ont continué leur trajectoire folle, aucune résorption des inégalités liées à l'origine ethnique, aggravation des inégalités scolaires... Un léger mieux sur la santé, mais c'est tout. Trump ayant balayé l'Obamacare sitôt arrivé à la maison Blanche, Barack pourra pavaner que c'est la justice qu'on assassine. De fait, comparé à Trump, Obama fait figure de progressiste, exactement comme Macron face à le Pen ou Trudeau face aux autres...

On ne peut empêcher ces types là de jouer sur le récit personnalisé. C'est de bonne guerre. Jeunes, aux dents blanches et aiguisés, avec toujours un peu de mystère, un truc différent (couleur de peau et passé de travailleur social pour Obama, combat de boxe, tatouage et surf pour Trudeau, le théâtre, Ricoeur et épouser sa prof de français pour Macron) sur lequel on glose jusqu'à après-demain. Fort bien. Les individus se distinguent, certes, mais leurs idées ? On ne peut plus confondant de conformisme mou, spongieux, gentiment défaitiste face aux ploutocrates. Leo Varadkar fait pareil, il met en avant son âge, ses préférences en termes de galipettes et sa couleur de peau. Les plumes reprennent. Thatchérien passe au second plan. Le type est un champion de l'austérité, en tant que responsable des comptes sociaux a proposé de torpillé tout ce qui peut ressembler à une sécurité sociale, croit que l'on est coupable d'être malade et que l'on doit payer sa guérison. Voilà ce qui doit primer, mais il faut aller loin dans l'article pour qu'on vous en cause...

Début 2016, les Etats-Unis avaient la possibilité de choisir quelqu'un de bien plus différent qu'Obama. Sur le papier, un vieux mâle blanc de plus, un peu prof, un peu juif, pas très intéressant pour la presse. Ajouté à cela que le parti démocrate le haïssait et on n'en parlait plus. Malgré une opposition partisane et médiatique très forte, Sanders failli battre Clinton, un mois de campagne de plus et il tapait la représentante d'un establishment à bout de souffle. Sa campagne avait fait la pédagogie de ce qui le différenciait d'Obama/Clinton : réforme fiscale, rémunération du travail, notamment du SMIC, protection sociale, coût de l'éducation, pour la première fois depuis, allez, Roosevelt, un programme, une identité collective vraiment différente arrivait. Le choix ne fut pas retenu et nous voici avec l'autre fou de Trump. On pourra s'interroger longtemps sur la responsabilité du traitement médiatique qui fut réservé à Sanders, croqué comme un vieux grincheux un peu frondeur... 

Il paraît que lorsque le sage montre la lune, l'imbécile regarde le doigt. On pourrait dire qu'aujourd'hui le sage montre le programme et les imbéciles commentent les portraits... Soupir.