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04/12/2020

Éternel champion du grand oral

En répondant aux questions de Brut, Macron a rappelé qu'il est l'éternel champion du grand oral.

Bien sûr, ses contempteurs les plus sévères, les plus ulcérés, pour peu qu'ils l'aient écouté, l'auront trouvé épouvantable. Je ne compte vraiment pas parmi les thuriféraires de Macron, pour autant, force est de reconnaître qu'il est vraiment malin. Il sait exactement ce qu'il faut donner à des journalistes pour désamorcer l'hostilité. Son passé de banquier d'affaires, métier de séduction où l'on change ses arguments en fonction de ses interlocuteurs toute la journée, montre qu'il pourra prendre la tête de n'importe quel fonds en quittant l'Elysée. Voire même, de Black Rock. Il a ce potentiel là. 

Sur les violences policières, il plaque son gimmick de "violences de quelques policiers" autant que possible et à la cinquième relance l'implorant de dire "violences policières", il concède un "on ne va pas jouer à ni oui ni non, je peux vous dire "violences policières" si ça vous fait plaisir" et il repart allegro. Pour celui qui a cherché comme scalp à faire dire "violences policières à Macron", c'est une balayette. Il se retrouve hébété, un peu humilié que son dessein puéril soit percé à jour et sans idée de comment relancer... 

Sur l'enseignement de l'arabe, il revient au Macron de 2016, celui qui dit "la diversité est une chance pour la France". Là encore, ses contradicteurs sont pris de court, c'est exactement ce qu'ils voulaient. Sur le séparatisme, Mac l'anguille se faufile dans les interstices. 

En 2017, deux jours avant le premier tour, il avait accepté une invitation de Mediapart pour 3h de discussion sans filet. Décontenancé par ce jeune homme qui aime débattre, qui reste jusqu'à l'épuisement, Edwy Plenel avait conclu par un commentaire comme "on peut vous aimer, où ne pas vous aimer, mais pas vous contester votre ouverture, votre goût du dialogue, merci d'être venu à Mediapart". Impossible de savoir combien de voix il a gagné ce soir là, mais j'en connais moult. 

Depuis, Macron s'en est toujours sorti dans cet exercice contradictoire y compris avec Bourdin et Plenel, bien mieux qu'en discours où il s'écoute à l'envi... On l'a un peu oublié, mais au moment du grand débat avec les gilets jaunes, dans un délire de suffisance folle, Macron avait voulu discuter avec 60 intellectuels, ça avait duré 8 heures. 8 heures. Tout le monde était parti. Un papier du Monde relatait comment, à 2h du matin, 58 intellectuels partis, il ne restait que les agents de l'Élysée trop apeurés pour déserter les lieux. Un des derniers participants, sous couvert d'anonymat, avait dit "je ne sais s'il faut admirer la performance, ou convenir qu'il est juste complètement fou. Complètement fou de lui même, mais complètement fou quand même".

Et effectivement, derrière le mirage de la folie du discours, du brio du grand oral, il y a le bilan. Hier encore l'INSEE expliquait que la politique gouvernementale fait exploser les inégalités, pointant mesure par mesure tous les manquements. Sur l'environnement, on est plus loin encore dans le déni. Cette semaine, nous fêtions les 3 ans après les propos de Macron président jurant qu'en 2020, le glyphosate ne serait plus présent chez nous. Etc etc etc. Ad nauseam. Etre champion du grand oral, c'est comme champion du monde des matchs amicaux. Sympathique, mais très insuffisant...