17/02/2011
Portrait de la déliquescence culturelle en Frédéric Martel
L'adage populaire est respecté, quand on tient un bon coup faut qu'on y retourne...
Frédéric Martel, l'inoubliable auteur de Mainstream un livre si bête que les bras m'en tombent, est décidément un grand monsieur. Après avoir eu un débat avec des étudiants qui ne comprenaient que pouic aux thèses de Martel (mais m'sieur, c'est grave de vouloir dominer le monde avec Disney, c'est de la résignation, non ? Pas mieux !) je me suis dit que je devais accorder une autre chance au garçon. Il est si encensé. Dont acte.
D'abord j'ai écouté quelques extraits de son émission de France Culture, "Masse Critique". C'est déplorable et intolérable à la fois; déplorable car la nullité syntaxique ("La Monnaie de Paris, c'est en face la Samaritaine" (sic, la semaine dernière !!!!) la dispute aux images pitoyables ("mais alors, vos ouvriers seront visibles derrière leur vitre comme les singes derrière une cage")... On sent toute la morgue du petit cultureux qui ne vit que pour les ragots et les bruits de chiottes sur les coucheries des magnats... Martel aurait fait un très honnête courtisan. Problème, il est animateur et producteur sur une radio publique, c'est là où sa médiocrité devient intolérable: c'est avec nos impôts...
Bon, mais je me suis dit que ce Saint-Simon de sous-préfecture avait une si haute opinion de lui-même, qu'il devait être le genre de type a être sur Twitter et Facebook en acceptant n'importe qui comme contact et en renouvelant son statut 20 fois par jour (plutôt une dizaine de fois, en fait... Mais moi c'est une seule...)... On apprend des ragots désopilants sur les fanfreluches des uns et des autres, des réflexions politiques vibrantes de bêtise et culturellement, cette grande saillie "j'ai jamais lu un livre de Nourrissier, niveau littérature de droite je préfère Huguenin"...
Arrêtons nous deux secondes sur cette connerie. Huguenin est un auteur culte, mort jeune, auteur d'un roman très largement surestimé "la côte sauvage" et d'un journal, pour le coup, très puissant jusqu'à faire nourrir des complexes pour qui veut écrire un jour. Et pis c'est tout.
Nourrissier, qu'on l'aime ou pas, est l'auteur d'une oeuvre, plus de 30 livres, et une somme immense "A défaut de génie", un styliste remarquable et un anthropologue de la bourgeoisie française de grand talent... Mais tout Martel est là, feignasse malin, encensant ses potes et les demis-mondains, méprisant les laborieux. On sent à nouveau toute la morgue de la gauche caviar dans son "la littérature de droite", mais Martel le gaucho demande actuellement des émoluments délirants pour ses bons services, le genre d'apôtre désintéressé, mais pas trop quand même; m'est avis que les journaux en parleront mieux que moi car ses méthodes cavalières en courroucent plus d'un...
Puisque le garçon analyse les expressions à la mode, l'une d'elle lui va comme un gant "dégage Martel", qu'il aille répandre ses conneries sur Europe 1 où les sièges vacants sont légions, avec le blé de Lagardère ce sera très bien...
Demain, le guide m'ayant convaincu j'irais sans doute faire un tour à la fondation Gulbenkian...
19:52 | Lien permanent | Commentaires (3)
16/02/2011
Oublions le gris du ciel avec quelques livres noirs...
C'est enfin les vacances scolaires, je suis donc temporairement dégagé de mes trois journaux quotidiens, moult podcasts et surtout de la lecture compulsive des essais. Je peux donc me contenter de deux journaux et retourner avec joie aux romans. Mais je ne me fais pas confiance: si je retourne dans une librairie, je vais assurément faire l'emplette du dernier Kempf, d'un Todd et autres Padis, bref ma fringale d'essai n'est pas passée. Je suis donc allé joyeusement piller les rayonnages parentaux avec l'assurance de tomber sur des opus qui ne sont pas en tête de gondole.
J'ai commencé avec "Cadet la Rose"; des nouvelles d'Albert Vidalie. Pour qui aime le genre bien particulier, il sera charmé par un style très pur. Une plume vive et jamais prétentieuse qui adapte Fanfan la Tulipe en cadet la Rose dans les campagnes opposants révolutionnaires et monarchistes et prend le point de vue des maquisards. Il parle avec la même aisance de faim, d'amour, d'ennui ou de joie. Avec son air lunaire (c'est le monsieur en médaillon) il redescend un peu pour nous livrer des histoires très aériennes...
J'ai enchaîné sur "les petits enfants du siècle" de Christiane Rochefort. D'elle, je n'avais lu que "la porte du fond" et dès les premières pages, je retrouve ce ton très heurté, ce découpage sentimental au scalpel.
C'est une gamine d'une famille nombreuse qui parle, elle veut vivre. Elle est folle d'amour d'un mauvais garçon mais connaîtra l'amour avec des hommes de passage dont un homme marié. Tout est très clinique, évitant avec maestria les deux écueils principaux: voyeurisme et misérabilisme. On suit la gosse, vibre avec elle, nous révoltons de la voir cantonnée à des tâches domestiques car née femme. Question d'époque. Le livre est de 1961, à 10 ans près, elle nous livrait son "Elise ou la vraie vie" à elle. Ca ne fait rien, Etcherelli l'a magistralement fait et l'on peut lire ces deux oeuvres pour se rappeller ce que 68 a apporté aux jeunes femmes (envoyer ex à MAM qui risque d'avoir du temps libre...).
Après cette tristesse, je voulais rire. Un rire léger, fin, un brin désabusé. Pas vraiment jaune non plus, assez narquois en somme. Pour ça, je sais que les éditions du Dilettante m'apporte souvent la réponse.
C'est l'avantage des petites maisons intelligentes: la cohérence du catalogue. Ne la cherchez pas dans le Galligrasseuil, entre les jeunes talents repérés, les copains, les transferts ou les marquis poudrés de l'académie, vous ne trouverez pas une patte. Chez Minuit ou POL en revanche, pas de souci; au Dilettante itou et je ne dis pas cela que pour "Hors Jeu" de Bertrand Guillot.
Là, dans "le Front Russe" de Jean-Claude Lalumière, on retrouve un protagoniste pris dans un univers professionnel auquel il n'entrave que pouic, avec des parents falots qui lui ont transmis des idéaux ternes (être cadre de catégorie B) et une vie sexuelle un peu misérable. On se gondole quand il parle à son chef, expose ses connaissances diplomatiques et se noie dans des situations improbables. Car le jeune homme a réussi son concours au ministère des affaires étrangères car il voulait voyager depuis qu'il collectionne le magazine Géo . Le directeur s'appelle Boutinot et rien qu'à cela on se l'imagine avec plastron et rhumatismes. Boutinot lui impose toujours des missions rocambolesques au travers desquels notre jeune héros va entrevoir la promotion avant de retomber car il en va souvent ainsi des héros du Dilettante: losers attachants, ils ne remportent leur quête Quichottienne... Mais ils nous laissent en refermant le livre, un délicieux sourire.
Pour finir, je me suis rapproché d'un auteur que je connais bien. Patrick Pécherot. Plume de la CFDT (personne n'est parfait), et auteurs de quelques excellents polar dans la Série Noire, notamment "Barcelone-Belleville". Pécherot campe rapidement et brillamment les décors dans différentes époques, jongle avec les registres et fait dans le noir dur sans nous abreuver d'hémoglobine. J'attendais donc "l'homme à la carabine" avec d'autant plus d'impatience qu'il est question de la Bande à Bonnot, de l'anarchisme, d'une période de l'histoire que j'affectionne. Mais hélas quintuple hélas, le louable parti pris -prendre un personnage secondaire, André Soudy, et lui donner vie- vire au casse-tête pour l'auteur.
Pris dans son envie de parler de la bande à Bonnot, sans vouloir en retracer toutes les épopées, il change de focale toute les pages et le mal de crâne nous guette. Quant au style, un peu d'argot ça va, mais là Pécherot se caricature à l'excès. On dirait ce sketch des Inconnus, le cultissime "pas de de bégonias pour les caves": http://www.youtube.com/watch?v=-FEXrDzInfE
Quand c'est Légitimus/Bourdon et Campan et surtout pendant 2 minutes, je me marre comme une baleine, mais 267 pages de cet acabit, c'est indigeste. Je vous conseille donc joyeusement Pécherot premières oeuvres en Folio Policier et on verra pour le prochain.
Demain, vous je ne sais pas, mais moi j'étudierais avec attention mon guide de Lisbonne...
07:36 | Lien permanent | Commentaires (0)
14/02/2011
Cupidon, fous le camp, ils sont devenus trop cons...
60% des sondés n'entendent pas célébrer la St Valentin. Le chiffre du jour tourne en boucle sur les ondes avec une angoisse lancinante: les français seraient-ils moins romantiques ? Y aurait-il un effet crise ? Je ne sais pas si on doit trouver cela sternant, mais con sans aucun doute.
Avec toutes les journées mondiales pour des causes mineures (lycodystrophie, strabisme, femmes...) on en oublierait que le 14 février est trusté depuis des temps immémoriaux par l'amour. Le directeur marketing de la Love Company devait être une sacré brutasse car jamais son monopole ne fut remis en cause.
Sauf, MLF oblige, par la moitié de l'humanité, courroucée devant ce Valentin tombeur de sous-préfecture et décidèrent d'implanter la ST Jules; en cette journée 100% marketoche ce sont les nanas qui partent à l'assaut des mecs à grands renforts de billets sucrés, de cadeaux niais et de dîners aux chandelles du Flunch... Pas de raison que la ringardise soit le monopole des mecs, non mais. Exit aimez-vous Brahms, welcome aimez-vous brâmer ? Avec Julio Iglesias et donc Lara Fabian, parité oblige, comme parrain et marraine de cette opération et pas seulement séduction.
Autre problème pour cette célébration du couple, la France compte 15 millions de célibataires, peu enclins à festoyer ce jour-là... Penses-tu, ces cons là s'affirment avec force là http://www.viedecelibataire.fr/fr/ un portail, il faut le lire pour le croire "pour célibataires heureux qui échangent sur leurs recettes". Les bras m'en tombent: est-ce bien raisonnable ?
Célibataire, ce n'est pas un statut en soi. Tout juste un statut facebook, une photo figée un instant. Voir ces types dépenser toute cette énergie pour mettre en scène leur vie heureuse quand, à l'évidence, certains d'entre eux sont d'indécrottables queutards qui sont plus priapes que célibataires et d'autres qui n'entendent qu'en sortir... Tout ça sent le chiqué et les vidéos de "bonnes pratiques" nous renvoi aux plus grosses satires du web, sauf qu'elles sont tristement véridiques et pas seulement Rivers.
Enfin, on voit émerger des clans de frondistes, d'anti St Valentin comme il y a des anti-noël, des mecs maqués ou des nanas itou qui se font des soirées bières entre mecs ou mojitos entre nanas pour bien montrer qu'ils ne sont pas victimes du système et sont capables de s'extraire de la dictature marketoche. Là encore, tant d'argent et de volonté déployés à contourner une convention me laisse pantois... Allez, gageons quand même qu'en dépit des fanfaronnades, les fleuristes et chocolatiers flamberont aujourd'hui...
Demain, nous nous demanderons si Arlette Chabot, Laurent Joffrin, Denis Olivennes et Nicolas Demorand vont ouvrir ensemble un meeticdesmedias.fr
08:18 | Lien permanent | Commentaires (4)