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20/07/2011

Peillon / Sitglitz, même combat : le politique.

9782021041132FS.gifDe prime abord Vincent Peillon et Jospeh Stiglitz n'ont rien en commun, même pas leur éditeur français (Le Seuil pour le premier, Babel pour le second). En tout cas, je n'avais jamais pensé à rapprocher le philosophe politicien socialiste français de l'économiste proche des politiques démocrates américains. Logique, je n'avais jamais pensé à rapprocher Daniel Cohn Bendit de Magic Johnson non plus. Sauf que si je ne rapprocherais sans doute jamais ces deux-ci, les deux premiers nommés m'ont frappé par leurs similitudes à la lecture de leurs derniers ouvrages.

Quand je parle de rapprochement, je parle du fond, du message porté. Sinon, autant le livre de Stiglitz est facile à lire, autant celui de Peillon est âpre et complexe...

Sans être abscons pour autant, mais les détours par son maître Maurice Merleau-Ponty, comme philosophe du politique, parfois faut s'accrocher un peu (notamment le chapitre logos et argon) mais ça vaut le coup. L'idée de Peillon est que la mort de Dieu et la mort de l'homme que l'on agite tous les jours, sont des leurres, Dieu n'ayant jamais été aussi présent, dans nos conflits comme nos espérances, et l'homme, on le ressuscite, on le prolonge, le transforme, là aussi tout va bien. Le politique, (au sens d'intérêt de la cité et pas la politique qui renvoi aux gouvernants) en revanche, est menacé. 

Dans son essai puissant Peillon recherche ce qui, dans nos pratiques depuis quelques années a peu à peu éloigné la réflexion du politique. Comment la figure du philosophe, celui qui s'interroge sur le mal, le bien, la morale, les limites a peu à peu été éloigné des débats: "L'irrationalité est aujourd'hui le facteur le plus puissant d'organisation de l'espace public. Ce qui prime ce n'est ni le rapport à la réalité, ni les procédures de vérification, ni la rigueur des enchaînements logiques et la cohérence de l'argumentation, c'est la capacité à provoquer l'émotion en jouant sur les ressorts les plus immédiats et primitifs de la sensibilité. L'espace public, devenu espace marchand animé par une concurrence féroce pour capter les publics, évacue tout ce qui ressort de l'argumentation pour lui substituer des formules et des slogans".   

Le côté clanique de certaines élites, leur volonté de se conserver le pouvoir les a poussé à techniciser ad nauseam des débats pour un résultat à l'efficacité suspecte. La conclusion de Peillon glace le sang : gênés par le libre esprit, véritablement au service de l'intérêt général, les politiques grecs tuèrent Socrate. Aujourd'hui, le même complot est ourdi, Socrate a nouveau menacé et il ne faut pas le laisser mourir une seconde fois.

le_triomphe_de_la_cupidite_100211_0.jpg

C'est dans cette alarmisme constructif que Stiglitz se rapproche de Peillon. Le livre de Stiglitz est moins puissant, plus dilué et plus bavard mais loin d'être sans intérêt car très bien informé, trop bien même, quand on pense à la confession qui suit. Stigliltz donc, fut aux manettes dans de nombreuses crises et alors qu'il avait lâché le manche au cours de celle-ci, il réalise mieux la trahison des clercs politiques au profit des banques.

Comme Peillon, il montre comment la figure du sage est systématiquement écarté par les fous du politique. Il analyse très bien les irréelles décisions de l'équipe de Georges W Bush ayant amené la bulle du crédit : il faut lire les 20 pages d'autorisation de types de prêt que l'on a accordé à cette époque pour voir à quel point nous marchions sur la tête. Il décortique par la suite la volonté d'Obama barrée par cette endogamie immonde du politique et du financier qui détricote en grande partie les mesures courageuses d'Obama pour laisser un bon paquet d'avantages aux banques en enlevant des gardes fous. En clair, sans intervention du politique, sans sursaut avec une prise de conscience du politique, une nouvelle gamelle est à venir, pour les mêmes, mais les coteries supérieures s'en sortiront encore sans mal....

En lisant ces deux livres, on pense alors à l'initiative Finance Watch http://www.finance-watch.org/ 

cette aventure politique inouïe où des élus européens parmi lesquels l'eurodéputé EELV Pascal Canfin ont admis leur incapacité à contrer le pouvoir des marchés en raison de leur trop grande technicité. Ils n'arrivent plus à démêler les ruses et vices cachés des lobbys qui truffent les amendements d'apostilles favorables à leur corporation... Alors, ils ont crée cette ONG en demandant aux citoyens de les aider à refaire de la politique. Finance Watch, en quelque sorte, c'est la porte dérobée que l'on ouvre au philosophe pour qu'il se glisse dans l'agora pour porter secours au politique. Un s'est levé, donc, espérons que tous les autres suivront...

 

18/07/2011

Portrait du thésard en marathonien

hams roue2.jpgPrécisons le d'emblée avant que les foudres justifiées d'Osez le clitoris ne me tombent dessus : je dis "thésard" et "marathonien" car en Français, le masculin l'emporte, mais dans le cas qui va suivre, la mixité prévaut et pas seulement l'Abbé. Si je dis "marathonienne" et "thésarde" je restreint mon cas à la moitié de l'humanité. Voilà voilà...

On le voit au cliché choisi pour illustrer cette note, les chercheurs comme les coureurs ont parfois l'impression de s'épuiser pour pas grande chose et d'être un peu pris pour des cons par le monde extérieur. C'est loin d'être le seul rapprochement possible. Non, entre ces deux populations masochistes, de nombreux points de convergence existent.

Bien sûr, il n'y a pas qu'un type de thésard, comme il n'y a pas qu'une sorte de marathonien. Faisons donc comme les motos de France Télévisions sur le Tour de France et remontons le peloton...

Tout au fond, il y a une énorme masse de quidams qui se demandent un peu ce qu'ils font là. Ils savent que sur leur carte de visite ça ferait chic et aiment la projection sociale que cela leur donne d'eux mêmes. Comme Perrette et le pot au lait, ils s'imaginent "Docteur en" ou "Docteur ès" (contraction de l'ancien français "en les" donc cherche pas à devenir docteur ès histoire, sauf si tu veux aller jouer du flutiau dans les points presse UMP) car cela en impose dans les dîners en ville. Idem pour celui qui finirait un marathon. Dans les deux cas, peu importe la performance, en 16 ans ou en 6 heures, l'intention qui compte.

Ce qui compte c'est la beauté du geste, qui impressionne 99% de la population, qui n'accomplit ni l'un ni l'autre. Même s'ils ne finissent pas, ils en profitent pour distiller ça et là la possibilité de ce faire. "Chéri, je vais courir" et la moitié non courante de préciser à l'assistance "chouchou va faire le marathon" sous les bravos admiratifs. Idem de l'autre côté "pupuce, je vais à la bibliothèque" ou "à un colloque", "il y a une conférence sur l'influence de Jung sur les produits dérivés dans l'économie du Guatemala et je pense que ça peut m'aider pour un paragraphe". Ce genre d'activité, surtout un week-end, force le respect quoi qu'il arrive.

Remontons un peu et l'on trouve les orgueilleux. Ceux qui finiront quoi qu'il arrive. Parce que c'est ainsi et qu'ils ne tolèreront pas d'échouer. Même si ils ne veulent pas devenir marathoniens confirmés ou chercheurs, qu'ils deviendront après joueur de water polo pour l'un et ergonome chez Nestlé pour l'autre, ils insisteront parce que c'est ainsi. Ils n'aiment pas cela, mais sont lancés et achèveront par devoir sans y retourner. Comme ceux qui élèvent un seul enfant ou prennent une cuite à la vodka poivre. Pour savoir.

Après, un peu devant dans le peloton, on se rapproche des pros. Ceux-là ont des facilités pour l'exercice et sont face à un dilemme: se défoncer ou pas. Leur vie oscille entre renoncements et encouragements, coup de blues et coup de bourre. Mais une belle performance ne s'obtient qu'en se faisant mal, en courant même s'il pleut ou neige dans un cas, ou en s'enfermant dans le cloître de la bibliothèque  quand vos meilleurs amis proposent une mojito party. Bien sûr ils doutent, mais au final quel pied immense que de franchir la ligne en voyant que l'on a fait mieux que ce qu'on espérait secrètement et que pour fêter ça, on double la capacité des seaux de la mojito party.

Enfin, tout devant et ce ne sont pas forcément les plus aimables, il y a les champions; ou les névrosés, c'est selon. Car pour gagner cette compétition insensée et finir devant les autres en plus de finir - c'est à dire finir plus vite et en battant les autres-, il faut être prêt à des sacrifices et des coups bas. Les soupçons de dopage ne sont jamais loin : comment courir 30 bornes par jour sans fatiguer ? Comme on écrit 15 pages : au Guronsan, aux amphétamines, corticoïdes, anabolisants et autres (je lis l'Equipe tous les matins, ça va...)... Ceux-là ont renoncé à toute vie sociale pour les marathoniens ou l'ont orienté pour putasser (on dit réseauter quand on est poli) auprès des mandarins pour les autres. Bien sûr, ils franchissent la ligne en premier mais comme pour Sisyphe, on peine à les imaginer franchement heureux...

La beauté de la chose, au final, c'est qu'hormis leurs différences de performances, ils constituent une grande famille qui trouve toujours des choses à se dire, quand bien même la vie d'un 4h30 ne ressemble pas à celle d'un 2H18 ou un docteur en neurosciences n'est pas forcément proche d'un docteur en littérature comparée. Et pourtant, ils auront toujours des anecdotes, partageront des conseils ; il faut avoir souffert seul pour comprendre ce qui unit ces curieuses tribus...

Demain, nous verrons si ceux qui combinent les deux doivent courir sur un tapis pour pouvoir relire Sophocle en même temps...

17/07/2011

Primaires PS : le sang des équipes ne saurait mentir...

6a010534a85cc1970b0134885bac8c970c-320wi.jpgLes faits sont têtus, les CV aussi.

Avant que les équipes respectives fourbissent leurs arguments et avancent programme contre programme comme deux bouquetins affolés par la dernière motte d'herbe disponible, regardons donc qui composent lesdites équipes. Transparence oblige, pas de combinazione pour savoir qui tire les ficelles, même s'il reste toujours une armée de conseillers, de consultants, de thaumaturges en toc et de faiseurs de rois autoproclamés avec titre anglicisé en bandoulières. Transparence oblige, donc, les équipes de campagne par sujet sont déjà connues. On peut les voir là, toutes ensemble (toutes ensemble, so-cia-listes) :

http://www.rue89.com/2011/07/13/le-whos-who-de-la-primair... 

Commençons par les outsiders, dont les équipes sont plus restreintes. Celle de Montebourg. On aurait l'aimé voir plus étoffée. La nouvelle présidente de ni putes ni soumises, pas d'avis sur la question si ce n'est que le débauchage de sa prédécesseur à tourné au grotesque. En revanche, bonne pioche avec Aquilino Morelle, cet ancien IGAS qui pourfend le médiator. Le problème est le même que pour le candidat, manque d'épaisseur et de démultiplication pour être crédible sur tous les sujets, même si ses positions sur la démondialisation ou contre le cumul des mandats sont intéressantes.

Manuel Valls. C'est tout... Non, mais ce n'est pas sérieux ? Michèle Sabban et Ali Soumaré comme porte-flingues, Valls peut mettre un gilet pare-balles chez lui parce que des snipers pareils... Pire, mais au moins c'est décomplexé, il s'est adjoint les services d'un "conseiller en charge des discours et des éléments de langage". Le ridicule ne tue pas, il plafonnera à 2%...

Ségolène Royal : prendre les soutiens de 2007, observer ceux qui restent en 2011, souffrir pour eux...

François Hollande. Ha ! L'homme du changement, le Kennedy de Corrèze, l'homme qui a fait souffrir son corps, qui a réfléchi, qui a compris les errances du passé et passé la France au stéthoscope... Mon cul. 10 ans premier secrétaire, cet homme qui n'a jamais travaillé ailleurs qu'en politique propose une France déjà figée, pas tout à fait une France moisie, mais une France un peu rassis, qui ne croustille pas. Des énarques à la pelle, des élus sénateurs, la gauche la plus à droite avec Gérard Collomb, Moscovici, Cahuzac, Rebsamen et jusqu'à Didier Arnal... S'il passe, n'espérer nul changement, ses équipes rassemblent toute cette génération qui ne fut jamais ministre et en souffre. Tous ces quinquagénaires et au-delà (le renouvellement générationnel passe peu par ces lignes) professionnels de la politique qui ont suivi Hollande comme d'autres un joueur de flûte, par espoir d'un gros bout de fromage. Mais on ne construit pas une espérance à gauche sur du ressentiment.

Et puis il y a l'équipe d'Aubry. L'équipe de celle qui ne voulait pas y aller. Avantage de cette faiblesse présumée: elle sait et elle s'est entourée. Là, pour le coup, le brassage joue : Axel Khan, André Dupond (président de sociétés d'insertion) Caroline de Haas, Jean Michel Sévérino (ex Agence Française du développement) des responsables d'ATD Quart Monde, de Sauvons la Recherche, Jérémie Boroy pour le handicap ou encore Sandrine Bonnaire et Françoise Héritier... Les limites des cénacles politiques sont intelligemment franchies. La nouvelle génération en politique a également droit aux premiers rôles avec Bruno Julliard, Guillaume Bachelay qui occupent de vraies postes. Certains Strauss khaniens sont là (Mazetier, Cambadélisà, mais l'ensemble est bien plus composé, plus balancé, l'ouverture sur les sujets plus larges, les antennes dans la société plus implantées.

Plutôt que de faire du contrôle au faciès, orientons le débat des primaires sur les papiers d'identité politiques des uns et des autres, si le peuple de gauche se rend au scrutin, tout cela devrait bien se passer...