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13/01/2012

Chère Eva

Unknown-1.jpegJe ne te connais pas. La réciproque est vraie. Tes équipes, si, puisqu'elles m'ont demandé de venir parler avec mon co-auteur et ami Saïd Hammouche dans ton meeting au Bataclan. Saïd et moi étions d'accord, vu le thème et les palinodies politiques depuis 30 ans sur les discriminations, pas question de se faire récupérer pour la photo. Oui, mais vous, c'était différent, vous parliez du fond. D'ailleurs, la soirée ne tournait pas autour de ton nom, mais portait un beau titre, au parfum de 4 août "la nuit de l'égalité".

Alors, nous sommes venus. Dire que nous le regrettons est sans doute excessif, mais nous fûmes loin d'être transportés, assurément. Avant d'arriver, je ne comprenais pas comment avec tes combats si justes, ton parcours différent et ce mouvement non cloniste tu ne rassemblais que 3% des électeurs. Après la soirée, je m'étonne que l'on trouve encore 3% de Français pour vouloir te confier la magistrature suprême. Oui, ton parcours parle pour toi. Une femme, non professionnelle de la politique, courageuse sur la justice et parlant avec ceux qui ne sont pas élus. Allez !

Nous arrivons au Bataclan. Bonne surprise, c'est plein. L'ambiance est bon enfant et l'assistance bien plus bigarrée que dans un meeting de l'UMP ou du PS, pas la révolution, mais tout va bien. Ca commence. En retard, normal. Et dès le début, je vois que ça va de traviole... Faire de la politique autrement, oui, mais faisons de la politique quand même. 

Lancer chaque sujet (racisme, homophobie, égalité homme/femme) par un sketch de Groland, des Guignols, des Inconnus ou de Djamel ça n'est pas sérieux. La politique, si. Mettons des blagues à la fin, avec votre concert. Lequel intervint dans un premier temps au milieu du meeting, entre deux tables-rondes. Hop, 20 minutes des "génisses dans le maïs" (authentique). Oh, Eva, la musique adoucit les moeurs, mais au milieu d'un meeting, franchement ? Non mais, tu imagines Obama "I'll explain you how to change the wolrd but first, big up for Beyonce"...

J'en étais là de ma souffrance sur la forme quand vint le fond. Puisque la forme c'est le fond qui remonte à la surface, pas étonnant qu'en sens inverse le fond soit boueux... L'égalité pour tous se pense par un  seul biais : comment faire évoluer les rapports entre dominants et dominés. C'est tout. Non non non, point barre, c'est tout. On reconnaît ses singularités à chacun, mais on avance ensemble, en frontal, global, systémique. Et là, dans cette nuit de l'égalité chaque souffrance, chaque micro souffrance s'exprime depuis sa chapelle. Entendons-nous bien : j'ai toujours pensé que ceux qui vivent ces problèmes doivent avoir voix au chapitre. Certes. Mais on ne peut pas en faire l'absolue nécessité, l'incontournable et l'indépassable, l'alpha et l'oméga de ton programme... A trop vouloir moquer Sarkozy et Guéant, tu fais pareil : tu ne fais pas de politique, Eva. Tu t'attardes toi aussi sur des faits divers malheureux. Au lieu de les exploiter cyniquement, tu les écoutes chaleureusement. Tu multiplies les communautarismes comme d'autres les pains, mais le communautarisme ne sert pas pas la communauté. Instaurer un jour férié pour Kippour et l'Aïd el Kébir, ce n'est pas ça réconcilier la France des confessions. En plus, c'est une connerie. Depuis la commission Stasi, aucun employeur ne peut t'empêcher de poser un jour de congés pour convenances religieuses et si ta boîte bosse le 1er janvier, tu peux échanger. Il faut sortir parfois et lire les textes des politiques qui vous énervent. 

Déconstruire le genre pour contrer le sexisme ordinaire ? Oui ! S'y prendre le plus tôt possible pour restaurer une vraie égalité femme/homme ? Oui, oui ! Alors quoi, Eva ? "retirer le 1 et le 2 de la Carte Vitale qui est une stigmatisation insupportable"... J'ai souffert en entendant cela. 1/ Ca fait avancer rien du tout, ça ne change rien à l'éducation et à l'emploi. 2/ Ca coûterait très cher pour modifier l'appareil électronique de la sécurité sociale pour pas rapporter un kopeck, faut arrêter les conneries...

Ha, et dernier truc, tout le monde n'a pas eu la chance d'avoir des parents communistes. Moi, ça m'a permis d'aller à des manifs et colloques encadrés : les braillards du bar que vous n'êtes pas capables de faire taire alors qu'on parle à la tribune, ça la fout mal. Comment tu veux convaincre le monde si tu ne convaincs pas tes propres troupes ? Excédé, je suis allé voir au bar, ce sont ceux qui sont élus chez toi, en plus. J'ai les noms mais je ne dirais rien, la délation très peu pour moi. Mais ça m'a fait penser qu'en fait les Verts doivent rester un mouvement et pas un parti. 

Bon, Eva, sans rancune, mais si vous voulez faire campagne autrement, on s'appelle. Si tu me cherches, je suis en route vers chez Jean-Luc. Là bas aussi on parle un peu fort, mais un à la fois et en s'adressant à tous...

10/01/2012

La culture passe l'oral mais est recalée à l'écrit...

Unknown.jpegEtonnante "pratique culturelle" des français. Consommation serait plus exact que pratique, mais je vais encore passer pour un ronchon. Bref, cette tendance se situe à l'inverse de ce qui se passe dans un examen classique : elle les accepte à l'oral mais les recale à l'écrit. C'est ce que nous apprend une vaste étude du ministère de la Culture, reprise dans le Monde et dont l'auteur, Olivier Donnat, sociologue, donne quelques pistes là : http://www.lemonde.fr/culture/article/2012/01/07/ces-prat... 

Que nous apprend ce vaste document ? Que les français pratiquent d'avantage de la musique ou une autre activité musicale. C'est la seule bonne nouvelle. La mauvaise est l'énorme gifle prise par la lecture quotidienne de la presse qui a baissé de moitié. Pour le reste, cette enquête est surtout désespérante de nullité ou de médiocrité c'est selon pour les chiffres qu'elle fait ressortir.

A 35 ans d'écart (1976, le tournant Barre ?), elle nous apprend qu'on lit toujours de la même façon, puisque 70% des français lisent un livre par an au moins. Comment peut on écrire une telle ineptie, une telle bêtise, un tel non sens ? 1/ Dans un pays où la scolarité est obligatoire jusqu'à 16 ans, ça fait tout de même 30% des français qui ne lisent pas un livre par an... A part le manque d'intérêt, ça prouve l'ampleur aussi, de ceux qui ont un problème avec la lecture et le manque de conviction à combattre ce fléau. 2/ Quand bien même ils lisent un livre, si c'est Indignez-vous, le temps passé à lire est faible. Et je ne parle même pas de la qualité, trop subjectif, mais lire du Musso ou du Foenkinos toutes les semaines, est-ce bien raisonnable quand on cherche à s'élever l'âme ou découvrir le monde ? Ca veut tout chiffrer et ça peut même pas nous renseigner avec fiabilité... Pour le AAA y a du monde, pour une analyse au scalpel des français et l'écrit, repassez et pas seulement les chemises.

On apprend aussi que les musées sont plus fréquentées. Très bien. Vraiment. Mais quid du détail ? Orsay ou Branly rendus irrespirable de surpopulation à grands renforts de publicité par l'événementiel quand le sublime fond permanent de Marmottan n'est pas visité, elle est ou l'analyse ? De plus, si j'aime écumer les musées, je ne le dois certainement pas à l'école et on ne peut pas dire que les initiatives privées d'éducation fleurissent partout. Les RP, l'événementiel et les symposiums et cocktail, oui, l'éducation au beau et au goût, que dalle.

On apprend que les concerts ont doublé, superbe ! Mais devant des prix de concert prohibitifs ne faut-il pas craindre que cela signifie que les concerts les plus fréquentés sont ceux de potes, gratuits ? On peut (on doit ?) se féliciter de ce que cela signifie une reprise de sortie, on peut déplorer le caractère de moins en moins abordables de certains types de spectacles. Ce d'autant que lorsqu'on descend dans le détail, on voit que la fréquentation de ces spectacles l'est majoritairement par les plus anciens. Pas uniquement parce qu'ils ont plus le temps, mais également car leur train de vie le leur permet. Les jeunes, eux, se rabattent sur Internet, la radio et la télé. Or, l'étude n'aborde pas assez la question du coût de la culture dans une étude portant sur la démocratisation de la culture, c'est étrange...

Enfin, l'étude nous apprend que 98% des français regardent la télévision et 90% écoutent la radio. Là encore, on aimerait pouvoir descendre quelque peu dans le qualitatif. On retiendra tout de même cette gifle de l'écrit, cette impatience devant l'écrit auquel on préférera l'événementiel. Une gifle d'autant plus étrange que l'étude souligne une consommation culturelle infiniment plus forte chez les célibataires. Mais ceux-ci sortent pour fuir et ne restent pas seuls à lire. C'est dans ce genre de cas que je me dis que je ne comprends pas tout à ce qui m'entoure. Seul, j'aimais à en profiter pour comprendre comment vivent les autres ; je les rejoignais par une mise à l'écart volontaire plutôt que de m'en éloigner par la promiscuité contrainte. Castor, toujours en retard d'une tendance... C'est sans doute mieux comme ça...

06/01/2012

A quand un débat sur l'identité nationale du CAC 40 ?

Unknown.jpegIl faut traiter les vrais sujets, les vraies questions, mais Monsieur Cohen, vos questions n'intéressent pas les français, ce qu'ils veulent, c'est aborder les vraies questions de leur quotidien. Voilà, en substance, ce qu'avancent les ministres depuis quelques jours qu'il s'agit d'aller au charbon c'est à dire défendre le bilan du quinquennat. Ils en profitent pour rappeler que Sarkozy n'a peur de rien et, en 5 ans, a abordé les vraies questions qui animent les français : d'abord le Grenelle de l'environnement, dont la plupart des mesures ont été oublié, puis l'identité nationale et l'étonnant islam et laïcité dont peu de choses sont ressorties. Dans la série des avortements oraux, il y eut aussi cette promesse de vastes palabres pourtant pleines d'intérêt, sur le partage de la richesse nationale. Quid de cette règle des 3 tiers ? Envolée... Dommage.

Aussi, puisque les candidats ont l'air de manquer de grands sujets pour le quinquennat à venir, (mis à part le AAA ou le nucléaire dont on comprend que, quoi qu'il arrive, ça va coûter une blinde de continuer à se chauffer et s'éclairer autrement qu'à la bougie) aidons les avec un bon sujet. Pourquoi pas un grand débat sur l'identité nationale du CAC 40.

Pourquoi ce sujet ? Après tout, ces 40 boîtes ne rassemblent pas 2% de l'emploi français, pourquoi s'évertuer à y attarder autant d'attention ? Fort simple, parce que ce sont les plus grands tricheurs, hypocrites et destructeurs d'identité nationale. Quand Nicolas Sarkozy rappelle, à raison, que ceux qui fraudent les allocs ou la sécu volent l'état, il a raison. Mais quand on sait que le rapport entre la fraude sociale et fiscale est au moins de 1 à 10 entre les uns et les autres, on voit que la course frénétique est peut être mal orientée...

Surtout, ces 40 boîtes symbolisent bien le vaste malaise de la mondialisation. Dans fractures françaises, Christophe Guilluy rappelle que, depuis 2000, 63% des destructions d'emplois en France sont le fait de la mondialisation avec volonté d'aller produire à plus bas coût. C'est donc que ces groupes sont mal en point? Pensez vous, le Monde d'hier rappelle que les 40 voleurs vont se partager 87 milliards d'euros de profit en 2011. Non non, pas de faute de frappe. 87 milliards, voilà pour le beurre. Sauf que les 40 amis n'entendent pas laisser le beurre à la vache française puisque tout le monde sait que ces groupes payent en moyenne 3 fois moins d'impôts que les PME. En relocalisant les sièges sociaux aux Pays-Bas et autres pays a la fiscalité plus attrayante, les grands groupes échappent au fisc français. Si ça c'est pas un manquement à la nation, je ne sais pas ce qu'il faut...

Mais là où l'attitude de ces groupes franchit les bornes de l'immonde, c'est que non content de moquer ouvertement l'Etat avec un chantage au profit, à la délocalisation, avec la complicité de syndicats de salariés qui s'estiment bien lotis (les salariés de Total sont ceux qui préfèrent leur entreprise, s'estimant très bien lotis, quand Total est l'entreprise la plus honnie des français, cherchez l'erreur) ils implorent l'Etat de rallonger de l'aide. Et les dirigeants arrivent ventre à terre avec la même servilité que les élus locaux devant le TGV sans plus penser à l'intérêt général qui demande à traiter toutes les lignes d'abord, prêt à sacrifier le confort de centaines de milliers de voyageurs pour peu qu'une ligne leur fasse gagner 20 minutes... Et bien là c'est pareil, l'Etat grugé et moqué continue à emmener les dirigeants du CAC 40 partout dans le Monde et à se prosterner pour les aider devant les pouvoirs aussi aimables que les Lybiens, les Birmans, les Turcs, les Chinois et les états confettis du Golfe où la démocratie et la pluralité de points de vue sont une vue de l'esprit...

Quand ce n'est pas de par le vaste monde, c'est en France que l'Etat se fait pigeonner plus encore par ces groupes qui demande des recapitalisation massives sans conditions (automobile et banques) ou des rabais et avantages divers (banques encore, assurance) sans aucune contrepartie. 

In fine, si l'on lançait de façon dépassionnée ce débat, on s'apercevrait ébahi que, certes, le CAC 40 sont des joyaux qui scintillent dans le monde mais que leur utilité sociale, in fine, pour la France est à peu près comparable à celle de l'oiseau pique-boeuf, celui qui se repaît paisiblement sur le dos de l'hippopotame...