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09/01/2014

De (se) battre, l'aile gauche du PS s'est arrêtée...

282015_l-arbitre-arrete-le-combat-entre-le-francais-jean-marc-mormeck-a-terre-et-l-ukrainien-vladimir-klitschko-le-3-mars-2012-a-dusseldorf.jpgEn 2014, les électeurs de gauche vont avaler le calice idéologique jusqu'à la lie. Au 9 janvier, une bonne nouvelle pointe à l'évidence : plus que 356 jours de trahison à venir... Bourdieu, ne te réveille pas, tu serai consterné. Marx, Blanqui, Proudhon et d'autres intenteraient un procès collectif (je suis mauvaise langue, action rendue possible par Benoît Hamon) pour escroquerie idéologique avec les louanges tressées au "socialisme de l'offre". Cet oxymore passé comme une lettre à la poste et défendu becs et ongles par des élus soit incultes, soit cyniques, soit les deux. "Incultes" je suis dur. Le socialisme de l'offre a déjà été porté par deux fois. Au XIXème, par Saint-Simon. Et plus récemment par DSK. Clairement des figures de la gauche de combat, quoi...

"Crédit impôt compétitivité emploi", "Pacte de responsabilité" chaque nouvelle proposition de François Hollande tresse des lauriers au MEDEF qui ne se cache plus. Gattaz a fait son coming out, il est Hollandophile. Il ne s'agit pas toujours d'être binaire, mais tout de même...

Comment expliquer que le libéralisme s'enfonce aussi facilement dans le coeur du pouvoir prétendu de gauche ? Mélenchon est en partie de cette déroute. A avoir tant surenchéri, hurlé à tout bon et même souhaité comme meilleurs voeux "qu'ils s'en aillent tous" (tu parles d'un programme), le porte-parole du Front de Gauche a lourdement décrédibilisé l'idée d'une alternative possible à gauche. La gauche morcelée n'y survit pas : l'extrême gauche ne s'est pas relevée des retraits de Laguillier et Besancenot et les verts sont prisonniers volontaires de leur alliance avec le gouvernement. Chaque budget, chaque loi, chaque décision de ce gouvernement est un renoncement aux idéaux de gauche. 

Reste au sein du PS une bruyante, une tempétueuse "aile gauche". Leur chef de file, Benoît Hamon a obtenu le peu convoité prix du "planqué d'or"... Cela donne le là. Vindicatif au départ, Emmanuel Maurel commence à parler sotto voce. Ce conseiller régional se rappelle que des élections auront lieu l'an prochain et qu'il ne faut pas insulter l'avenir. Idem pour le bouillonnant Jérôme Guedj. Beau gosse, brillant et nouvel tête, l'ancien assistant de Jean-Luc Mélenchon parlait fort. La loi sur le cumul des mandats montrait les limites politiciennes de ce tribun aux qualités indéniables (il a notamment rendu plus fou que d'habitude Henri Guaino en direct à la télé en 2012). Désormais il soutient 98% de ce que fait le gouvernement. Il est rentré dans le rang comme jamais et professe, en marge, une ou deux désapprobations comme sur le CICE où il souhaite obtenir des aménagements. Bon...

Un exemple dans l'actualité offre une occasion à peu de frais de montrer à cette aile gauche qu'elle bat encore. Se rappeler des valeurs de gauche : la justice fiscale et la justice tout court. Autrement dit dans l'affaire Dieudonné, montrer que ce monsieur est un délinquant fiscal et le traquer rapidement comme on doit attaquer les entreprises fraudeuses. Puis doter la justice de moyens conséquents (la France est 34ème sur 43 pays de l'OCDE en termes de moyens accordés à la justice) pour faire triompher le droit. Un temps long. Et peu spectaculaire. Rajouter des inspecteurs des fraudes, du travail, des douanes ? Rajouter des juges et des greffiers ? Pour des résultats que les ministres ne peuvent s'arroger sur le champ et face caméras ? Peu intéressant. Comment scénariser un redressement fiscal ? Plus intéressant, en revanche, de choisir les coups de menton cathodique devant les théâtres...

Tant pis si Pierre Joxe ou Jack Lang, deux  éminents juristes pour ne parler que d'eux, soulignent le caractère vain voir contre productif des mesures Valls. Pire, Pierre-Olivier Sûr, nouveau bâtonnier de Paris souligne que Dieudonné peut déjà aller en prison pour amendes non payées et propos négationnistes. En revanche, il pourrait attaquer l'Etat pour les circulaires et l'emporter. Si on doit payer les remboursements de Dieudo avec nos impôts, Valls aura vraiment tout gagné... Et pour l'heure que croyez vous qu'il arrivât ? Soutien indéfectible au ministre de l'intérieur de la part de l'aile gauche. Reconnaissons leur une qualité rare aujourd'hui en politique : leur capacité à surprendre en étant pas sur des positions dogmatiques. Mais pour une fois il aurait été bon de tenir les digues... Il faut aller demander à notre brillant médecin qui a su créer un coeur artificiel s'il peut ranimer la gauche du PS. Ca urge.

05/01/2014

Ha ! Ma zone de délice

kinder-delice-cacao-x10--420-grs-gouters---cookies---barres.jpgCe matin j'ai à nouveau goûté l'extase de la première fois. A chaque fois que l'on découvre une librairie, on est complètement vierge. Aussi gourd, aussi affolé, aussi impatient. La différence magistrale est que cela ça se passe toujours bien. Et dire qu'Amazon ne procure pas la même chose relève de la litote.

Depuis quelques semaines, des appels au boycott d'Amazon circule sur les réseaux sociaux. Les arguments tiennent avant tout au scandaleux dumping fiscal organisé par l'entreprise. Bon. Comme d'habitude, Montebourg est tiraillé et propose avec Amazon le même pitoyable numéro de Janus qu'avec Free. Dans les cas des télécoms, Free était un héros libérateur du pouvoir d'achat avant d'être ce vautour d'emplois dans le secteur... Avec Amazon, l'héritier de Colbert loue les nouvelles usines crées, avant de vitupérer la fraude fiscale légale et les conditions de travail dignes du XIXème. Bien.

Je n'ai pas signé l'appel, mais contrairement à des tas de belles âmes qui l'ont signé après avoir acheté nombre de produits culturels sur le site, moi je n'y ai jamais eu recours. Amazon a sans doute une utilité, comme Galaxydion en son temps : permettre un accès rapide à des ouvrages épuisés, trop rares ou quasi introuvables. Fort bien. Mais cela représente une part méprisable du chiffre d'affaires. Lequel est très largement tiré par des achats impulsifs. Des envies de pisser appliqué à la lecture ? Ca y ressemble, à la différence près que les français ne lisent pas plus pour autant donc je trouve l'argument spécieux. C'est cette même logique qui voudrait que le "marché du livre" n'est pas adapté au XXIème siècle. Même Amazon est dépassé, quand on a envie de lire le dernier Foenkinos à 2 heures du matin, ça ne peut pas attendre, c'est connu ! Donc, on paye son téléchargement comme d'autres fument un joint et on est soulagé. Ridicule. Si seulement on pouvait intimer aux personnes qui souffrent de ces troubles  l'idée de compter les moutons ou d'explorer les rayonnages de leur bibliothèque en quête d'un ouvrage posé sans avoir été lu ou d'une relecture heureuse (la nuit est propice aux relectures heureuses).... 

Pour refermer la parenthèse Amazon, il me semble que les débats actuels manquent leur cible : les impôts ou les avantages comparatifs de marché sont des débats de techniciens qui vont trouver ou pas une issue comme pour le reste de l'économie. Soit les socialistes s'attaquent à la finance et donc mattraquent ceux qui fraudent le fisc, soit ils continuent leur complaisance et Amazon continuera son hold up impunément ; mais ni plus ni moins que des tas d'autres entreprises.

Mais plutôt qu'un gourdin, il faudrait parler des carottes. Puisque les français ne lisent pas assez, au lieu de les dégoûter d'Amazon, rappelons leur ce qui se passe de beau dans une librairie. Personnellement et au risque assumé du ridicule, je dirais que la découverte d'une librairie provoque chez moi le même sentiment que d'être enfermé dans une boulangerie pleine pour un boulimique. Je deviens dingue. Et c'est délicieux. Ce d'autant que la nature m'a infligé d'un esprit fondamentalement dilettante. Je suis littéralement hermétique à l'esprit de sérieux et de spécialisation que révère la France. Ce que nous produisons d'experts salués partout dans le monde. C'est souvent une tare, car vous ne connaissez rien à fond et votre parole est alors jugée suspecte contrairement à l'évangélisation de leurs propos à eux. Les spécialistes. Eux savent où aller chercher. Ce qu'ils aiment. Comme des oenophiles affirmés qui se ruent sur certains Bordeaux ou Bourgognes avec aplomb et dédaignant tout le reste qu'ils jugent indignes de leurs palais, les spécialistes foncent sur les deux rayonnages consacrés à ce qu'ils cherchent. Tel pan de science sociale, telle type de littérature. Et ils repartent quelques minutes après, leurs deux ouvrages serrés sous le bras sans avoir échanger autrement avec les employés de la librairie que pour demander s'ils pouvaient introduire leur carte bleue. 

Je ne sais pas faire ça. C'est bien pour cela que je ne rentre jamais dans une librairie si je suis pressé. Car ça me prend du temps. Beaucoup. A part les livres de science-fiction ou de fantasy qui m'ont toujours laissé froid, je regarde tout. Les polars, la littérature dite blanche, française ou étrangère, la socio, philo, l'éco, la psy... Je me perds et me noie dans les centaines de références. Je nage dans les quatrième de couverture, plonge au milieu des livres et parfois attrape la bouée laissée par la librairie "un choc !" "allez y les yeux fermés ! Rouvrez les pour lire, quand même..." et ainsi de suite. Parfois je demande à un maître nageur et nos échanges m'enchantent autrement que ce faible "vous aimerez aussi" propre à Amazon comme Youtube...

Aujourd'hui comme à chaque fois, je suis entré dans la librairie avec un ou deux titres en tête. Je ne les ai pas trouvé, mais en ai ramassé une demie douzaine d'autres, dont je n'avais jamais entendu parler. Au moment de payer, j'ai du patienter dans la queue. J'étais ravi et ai même hésité à laisser ma place aux personnes derrière moi. Pour entendre les échanges entre ces zozos dilettantes et la libraire. Une mélodie improvisée dont je ne me lasse pas. Voilà, nous sommes des milliers de zozos à avoir besoin de ces zones de délices comme une drogue. Espérons qu'on ne soit jamais en rade de dealers.

04/01/2014

Quand j'entends cette conception de la culture...

bouddhiste-enfant-pistolet-jouet_pics_809.jpgJe dois avoir l'esprit mal tourné, mais je me demande si les tenants d'une certaine exigence culturelle n'ont pas intimé ce rapport à Aurélie Filipetti pour mieux torpiller l'idée même d'une politique culturelle étatique forte. Pour ceux qui en ce début d'année ont décidé de ne pas replonger leurs têtes dans l'étau de l'actualité, je fais référence à un rapport soulignant que l'Etat investit 13 milliards d'euros dans la culture, qu'on peut lire la. Un rapport si bête qu'il donne envie d'appeler au désengagement de l'Etat et aux financements par les seuls philanthropes sur un modèle à l'américaine. Par ce que si payer des impôts doit servir une telle bouillie, autant abandonner...

L'intention de départ était noble, donc on peut la rappeler : souligner que la culture, en tant que politique nationale, n'est pas que pure dilapidation des subsides publiques pour complaire à quelques parasites et engraisser des saltimbanques sybarites même pas reconnaissant de leurs bienfaiteurs. Déconstruire des clichés pour réaffirmer une politique. Entendu.

Mais lorsque l'on regarde les postulats de départ des auteurs, on se pince et pas qu'un peu. Pour atteindre le dodu chiffre de 13 milliards, les auteurs ont intégré... la publicité. Mais tout à fait. "Heureusement, il y a Findus", "Si Juvabien, c'est Juvamine" et autres conneries ? Culture. Ha... Ils ont aussi intégré l'ensemble des investissements dans l'audiovisuel public, lequel compte sans nul doute une part de programmes à vocation culturel, s'entend, mais "des chiffres et des lettres ?" Le journal de la Santé ?" Télématin ?" "Fort Boyard" ? Et encore, je reste poli. Je ne parle pas de Ruquier ou autres conneries dont j'ignore tout car je me préserve tant bien que mal en étant pas équipé d'un téléviseur. En clair, on a engraisser la grenouille pour lui faire atteindre la taille d'un boeuf aux hormones et ainsi pouvoir parader. Mais a t'on encore le droit de parler du résultat ? Noyé dans ces chiffres gras, se trouvent de véritables pépites culturelles qui poussent et on insistent pas assez dessus.

Si j'avais l'esprit mal tourné, je dirais que l'Etat a commandé un rapport à la gloire d'une action forte quantitativement, car d'un point de vue qualitatif, le résultat aurait été plus contrasté. L'essor très important du financement participatif (crowdfunding) dans les nouvelles industries culturelles les plus réussies et les plus audacieuses souligne les limites de l'Etat-Providence qui ne peut pas en même temps être un Etat créateur. Et ça, pour Filipetti c'était inaudible. Alors même que cela se plaide parfaitement : le rôle de l'Etat est de diffuser, d'essaimer, de donner envie. Pas d'ériger et de subventionner un art officiel, les régimes politiques ayant fait cela dans l'histoire ayant généralement eu une passion modéré pour la démocratie... Curieuse résurgence d'un déterminisme étatique par ego mal placée d'une ministre trop sur le reculoir à son goût.

En outre, pourquoi tendre le bâton à ce point pour se faire morigéner en excluant purement et simplement du calcul le régime des intermittents du spectacle ? Régime dont on apprend au passage qu'il est déficitaire de "300 millions à 1 milliards d'euros". Laisser ainsi des ordres de grandeur supérieur à ceux des comptages de manif relève également de l'intelligence discrète. Car cela revient évidement à dérouler le tapis rouge aux tenants du comptage supérieur. Induire donc que le système coûte 1 milliards d'euros par an, sans autre forme de procès. Alors même que la majorité du déficit est lié aux dérapages de sociétés audiovisuelles tout à fait profitable, on maintient ce poison du doute sur les frêles épaules économiques du spectacle vivant. Pas glop...

In fine, j'espère sincèrement qu'il ne sera pas fait trop de publicité (gratuite, sinon il faut revoir les chiffres du rapport à la hausse) à cette initiative arithmétique aussi hardie que malvenue. Et que l'on pourra inscrire cette grande pensée de Desproges sur le fronton du ministère, rue de Valois : "la culture, c'est comme les parachutes : quand on en a pas, on s'écrase". Ca suffit à justifier bien des investissements sans avoir besoin de travestir des émissions de décerbération en politique culturelle ambitieuse...