Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

23/02/2012

Politique fiction : si le vote du 16 octobre avait été différent...

couv.jpgLa France s'ennuie. Pas dans sa vie de tous les jours. Pas le temps ni les moyens de faire ça. Moravia n'était pas un prolo sinon il n'aurait pas si bien dépeint ce sentiment. 15 millions de Français sont à 50 euros près quand arrive la fin de mois.

En revanche, la France s'ennuie quand elle regarde la campagne. Fort à craindre à ce rythme là que le grand vainqueur du premier tour soit l'abstention. Mardi soir sur TF1, François Bayrou et Eva Joly ont réalisé les audiences les plus basses de la chaîne en prime time. La déconfiture de Bouygues a de quoi ravir d'ordinaire, mais pas là dessus. Autour de moi, je sens monter un grand sentiment de je m'en fous... J'ai l'impression d'être l'organisateur d'une fête où tout le monde se barre et de leur dire "non mais restez on va bien s'amuser ! ". Ils ne m'écoutent plus et s'en vont.

Je reste là, triste comme un Menhir et m'interroge sur leur désertion à tous. Comme en 2007, le barnum binaire est en place et ça ennuie tout le monde. J'irai écouter Mélenchon dans deux semaines pour entendre ce que ça donne, mais dans les ondes, tout le monde ne parle que du second tour, par tractations, nominations ou report interposés. Chaque jour qui passe, de ses reniements sur la finance au MES mardi, Hollande se droitise. Son programme est sorti ce matin, le grand soir fiscal qu'il avait promis est déjà mort. Piketty encensé hier est désavoué dans le programme. Pas de taxes spécifiques sur les entreprises vraiment comminatoires pour empêcher les délocalisations, rien pour le désenclavement des ghettos. Plus que jamais et surtout bien plus qu'en 69 avec Poher et Pompidou, Hollande et Sarkozy ce sera vraiment gris clair contre gris foncé, Duclos revisité par Jean Jacques Goldman, (un socialiste d'ailleurs). Pour la première fois, si les sondages restent en l'Etat, au second tour, j'irais voter blanc...

Incompréhensible : la crise massive est celle du libéralisme, il n'a par conséquent jamais été aussi simple d'être de gauche, et le PS a de plus en plus des accents de MODEM... Infinie tristesse. Par ailleurs, ce parti se ferme : 30 à 40% de ses militants sont des élus (!!!!) il se coupe des talents qui devraient aller à lui pour favoriser un caporalisme interne moribond. Infinie tristesse bis. J'en connais une palanquée de jeunes intéressés par la chose publique portant à gauche mais qui se sont détournés de cette rue de Solférino qui ne parle qu'à elle même.

Du coup, comme toute cette France qui s'ennuie, je divague. Je me dis que si le 16 octobre, les 3 millions de votants avaient porté Aubry pour le PS, nous n'en serions pas là... Au final, nous aurons peut être un élu PS, mais nous l'aurions eu tout aussi bien avec Aubry. Une chèvre avec une étiquette PS l'emporterait sur un bilan aussi catastrophique. Mais Aubry aurait pris la mesure de la situation avec des projets comme ceux là, vraiment intéressants même si dans la liste des signataires on retrouve Gaccio, Pelloux ou Rocard, sur le fond, ça se défend : http://www.roosevelt2012.fr/

Aubry aurait augmenté de 50% le budget de la culture. Dans nombre de quartiers et de villes, la culture c'est tout ce qui reste quand l'Etat et les entreprises ont tout oublié. Eu égard au budget de la rue de Valois, c'était une demie TVA des restaurateurs... Aubry aurait pris la question de l'économie solidaire et sociale comme fer de lance d'une refondation des entreprises classiques. Aubry n'aurait pas reculé sur la santé et l'éducation comme Hollande qui n'avance que quand Peillon lui hurle dessus. Avec des si, on mettrait Paris en bouteille, c'est donc là que je mettrais mon bulletin. Comme écrit très justement Laurent Bouvet, le PS doit retrouver "le sens du peuple", hélas ils ont déjà raté le tournant le 16 octobre dernier. La seule différence entre la France de mars 2012 et mars 68 qui s'ennuie, c'est donc qu'en mai tout sera comme avant, Hollande ou pas. La seule chose qui changera, ce sont les quelques centaines de copains d'Hollande qui vont truster ministères, cabinets, officines, postes divers et agences...

Demain, nous reprendrons du poil de la bête en avançant dans les cours de Bourdieu au Collège de France...

20/02/2012

Samba triste, mais si belle

515SXZhM5ML._SL500_AA300_.jpgC'est un roman noir de la première à la dernière ligne. Ca et là, quelques bribes d'espoirs se nichent dans les lignes d'un récit dur sans préméditation. Joyeux non plus. Un grand roman qui ne cherche ni à jouer sur le pathos droit de l'hommiste, ni à germinaliser 2012. Sans doute est-ce pour cela qu'on ne peut poser ce récit : difficile d'arrêter quelqu'un qui vous raconte une vie de misère, sous vos yeux, sans vous cracher à la gueule.  

La Samba n'est pas celle des bars Latinos d'un Paris bobo type cette abomination nominale, "la favela chic" (que l'enfoiré qui a trouvé ce nom se rende à St Jacques de Compostelle en Vélib'), mais celle de Samba Cissé, malien en quête de Graal : des papiers français. Samba a traversé des épisodes très très très durs pour arriver en Europe. A 19 ans, il a vieilli de deux décennies quand il arrive sur notre sol. Il a déjà failli mourir plusieurs fois quand son oncle Lamouna le recueille, l'héberge et le nourrit de cette gastronomie française (l'oncle bosse dans un resto et rapporte des produits chaque soir) et de rêves de Cocagne de retour à Bamako. C'est le rêve de l'oncle. Samba, lui, ne voit pas si loin. Il ne veut pas décevoir ceux restés là-bas et s'attelle à travailler pour cela. Mais sans papiers, ce sont des métiers impossibles, impensables qui l'attendent. Des métiers qui nous permettent à nous, blancs, de bénéficier de cette société du Care. Le tri des déchets, notamment.

Samba commet une erreur majeure : il veut aller prouver sa bonne foi, le fait qu'il paye des impôts depuis dix ans et ne comprend pas pourquoi il n'a pas de papiers. Il est alors menotté et envoyé dans cet enfer moderne, le Centre de rétention de Vincennes. Il en sera tiré par un vice de procédure trouvé par la CIMADE. C'est là que la romancière apparaît sous les traits d'une bénévole bibliothécaire qui a trouvé un sens à son existence routinière en allant aider les migrants. Le reste à découvrir, mais si vous lisez les journaux, vous vous doutez que le Happy End est peu probable.

Au-delà de la trame originale, le roman de Delphine Coulin marque par l'incroyable humanité qui irradie ce roman. On pense à la monographie de Pierre Sansot sur "les gens de peu" en se disant que pour les migrants qui se tassent dans des sous-sols de la rue Labat à 900 euros, exploités par un nigérian, il n'y a que des "vies de peu" où se projeter. Passé les heures à chercher des boulots précaires, les tournées de boîtes d'intérim et toutes les heures passées à trimer, le quotidien de Samba n'est pas celui dépeint par Jérémy Rifkin quand il explique que les occidentaux sont entrés dans "la civilisation des loisirs". Non, pas le temps et pas les moyens non plus, le peu qu'ils ont part chez Western Union direction Bamako. L'histoire d'amour qui surgit au milieu du récit est belle comme une belle histoire mais impossible comme l'existence de ces migrants.

Aujourd'hui à Paris, c'est le début des vacances. Certains iront au ski, d'autres au soleil de nos DOM ou autres destinations exotiques, mais pour les 7 euros d'un livre de poche on peut voyager dans un Paris que l'on ne voit pas. Décidément, Pessoa a raison; aperçu cette fulgurance du grand homme ce matin sur les réseaux sociaux, "la littérature est la preuve que la vie ne suffit pas". 

18/02/2012

Val, Fourest, Maris: Charlie réveille toi tes enfants sont devenus cons..

images.jpegPas fous - encore que -, mais très cons, assurément. Ils ont basculé du côté obscur de la force plus ou moins violemment. Le problème, le seul, rappelle ce que disait Desproges "les amis se distinguent surtout pour leur capacité à vous décevoir". Force est de constater que la déception est à la hauteur des attentes. Inutile d'espérer quoi que ce soit de la part d'un Alexandre Adler ou d'un Jean-Marc Sylvestre, évidemment. Mais ceux qui ont été ou sont encore les fleurons de Charlie Hebdo et parlent la langue de bois avec une habileté qui plairait à Frank Lepage http://www.youtube.com/watch?v=oNJo-E4MEk8 ont de quoi nous navrer. 

Trois cas, trois traîtres à la nation, avec 3 degrés différents. Un peu le bon, la brute et le truand.

Bernard Maris est bon, bon comme le bon pain. Bon comme bon client aussi. Parce qu'il incarne à la perfection, à la définition quasi dictionnairienne du "rebelle institutionnalisé. Charlie Hebdo, France Inter à foison, dans le 7/9, dans "on n'arrête pas l'éco" mais aussi dans tous les débats mainstream où on l'attend et, cerise sur le gâteau, conseiller à la Banque de France. L'encadreur mériterait pour cela d'être encadré, d'avoir mangé trop de sucre libéral, ses incisives sont tombées et aujourd'hui, s'il aboie encore un peu, c'est pour mieux faire croire qu'il existe un contre pouvoir, mais ses convictions d'hier lui font peur aujourd'hui : quand on a peur de son ombre, on vaut Rantanplan... Maris est content de lui, n'écoute rien et donc va parfaitement en débat avec des types comme Philippe Chalmin, sorte de Bernard Maris de droite qui n'aurait rien à se reprocher: il a toujours reconnu vouloir aller à la soupe, pourvue qu'elle ne soit pas froide, et encore. Pour Maris, on le croyait homme à cuisiner lui même, mais il faut croire que le fumet de la bouffe micro ondes cathodiques l'a fait tourné casaque et à moitié conviction. Le bon trop bon qui comme le veut l'adage, devient trop con...

Caroline Fourest, c'est la brute. La déviante la plus progressive. Maris a viré en un an ou deux, Fourest est sur une mauvaise pente et finira par dire du bien de Juppé. Elle est apparue voici une dizaine d'années sur la scène médiatique : femme et jeune, deux singularités au milieu de quinquas mâles pour passer dans les médias; tous se l'arrache, elle tranche. Mais à trop être happée comme une phalène, même problème que pour d'autres. Elle n'est pas rebelle, n'a jamais prétendu l'être, mais elle est devenue une intellectuelle systémique, emmerdant pour une empêcheuse de penser en rond. Elle a compris l'air du temps et agite, en dépit de toute réalité factuelle une République chimérique qu'elle a à géométrie variable selon qu'elle parle à Marine le Pen, Jean-François Copé ou Jean-Luc Mélenchon... Peu à peu, elle s'est lissé et ai d'accord 95% du temps avec Jean-Marie Colombani le dimanche matin sur Inter. 5% de différence avec un margoulin pareil, c'est bien trop peu... La brute car elle n'écoute personne, la laïcarde hallucinée mène sa propre église. Dommage, tellement dommage. Dans "Il était une fois dans le Bronx" le personnage de de Niro répète à l'envi "there is nothing worse than wasted talent", s'il avait rencontré Fourest, ça l'aurait conforté dans ses dires.

Philippe Val, pas de doute, c'est le truand. Passé de Font & Val et de Charlie à défenseur de Nicolas Sarkozy en toutes circonstances, l'homme a la palme... Siné n'est pas toujours d'une finesse colossale mais le virer pour des propos beaufs au motif qu'ils seraient antisémites tout cela pour protéger une crapule en devenir -Jean Sarkozy. Siné avait juste remarquer que le gamin était bien parti dans la vie après avoir épousé l'héritière Darty, difficile de lui donner tort. Il faut croire que si... Idem pour Porte et Guillon. Virer pour avoir déplu au pouvoir. Les deux sont sans doute trop contents d'eux, Guillon a d'incontestables manières putassières, mais du talent à revendre. Quand j'entends les lamentables chroniques de Ben ou Alexis Tregaro, je me dis qu'on a lourdement perdu au change tout cela pour contenter quelques potentats... Virer Val pour incompétence ne serait que logique, malheureusement cela apparaîtra comme de la loi du talion et une revanche de nomination sarkozyste. C'est bien le problème de la force obscure contre la force claire, les vrais Jedis doivent s'abstraire de la colère. Mais quand on entend toutes les concessions faites, nos coeurs saignent...

Demain, nous reprendrons du poil de la bête en parlant de "Samba pour la France" un grand roman de Delphine Coulin, au moins quand on lit ça on écoute pas la radio...