16/02/2012
L'infidélité, valeur refuge ?
Avant-hier, dans "du grain à moudre", les commentateurs s'intéressaient aux valeurs de la campagne. Soupir de Rony Brauman rappelant fort justement que l'homme politique qui prônera moins de justice, plus d'inégalités, moins de fraternité et ainsi de suite a des chances très minces d'être élu. La communication sur les valeurs est bien vite titillée par la communication par la preuve car il en va de même dans les entreprises : on connaît peu d'entreprises qui ne soient pas dynamiques, innovantes, fortes, responsables ou encore soucieuses de l'humain. Même ces ordures de la BNP qui ont réalisé 6 milliards de bénéfs en 2011 mais licencient et surtout se débarrasse des dettes d'Etats (état qui l'a bien aidé) et ne veulent plus en racheter. Trop dangereux. Belle conception de la justice...
Tout le monde a les mêmes valeurs, donc ? En tout cas, une valeur a fait une irruption marquée en ce début 2012 : l'infidélité. Tombée en berne en 2011 à cause de DSK qui présentait l'infidélité sous un jour pathologique, névrotique, inhumain, elle a depuis subi un lifting glamour, efficace, intelligent. Deux boîtes sont à la manoeuvre dans cette opération : Gleeden et Free.
Gleeden prône l'infidélité, non pas en possibilité, mais en obligation de business. Ce site de rencontres est exclusivement réservé aux couples mariés souhaitant pouvoir avoir des relations infidèles en toute discrétion. Le tout, en visant prioritairement les femmes, nouvelles infidèles à en croire les tracts. Les affiches du film "les infidèles" avec Gilles Lellouche et Jean Dujardin viennent remettre cela en cause, mais globalement, l'inexorable montée en puissance de l'infidélité se confirme. Pour Free, même chose, on vous propose une autre voie possible avec cette approche ultra racoleuse "le forfait à 2 euros". Une espèce de dumping prostitual. Beurk. idem pour Gleeden, une infidélité hygiénique, sans risque, sans flamme, sans tout ce qui fait que l'idée de l'infidélité peut germer dans le cerveau de tout à chacun. Une infidélité de l'époque, qui aurait lu Ulrich Beck et sa société du risque. Au fond, l'infidélité devient une valeur refuge pour tout ceux qui n'osent plus mais voudraient quand même.
L'allégorie politique est troublante: je suis libéral. Un bon gros libéral et je m'ennuie, je vois bien que ça ne marche pas mais j'ai peur de quitter le système. J'ai vu tous les problèmes de couple résumées ici à la perfection, http://egregore.erwanlarher.com/oui-mais-bon-quand-meme-c.... Du coup, comme je ne sais pas m'échapper, je reste officiellement avec Sarkozy mais je vais aller voir Hollande pendant 5 ans. Pour nos amis, les apparences seront sauves et c'est tout ce qu'on demande aujourd'hui....
23:08 | Lien permanent | Commentaires (0)
12/02/2012
Bref, je suis allé à l'URSSAF
Normalement, tous les détournements du programme ultra court de Canal + ("déjà culte" dira le connard chroniqueur télé) se font en vidéo. N'ayant pas de smartphone pour ne pas être harcelé jusque dans ma poche, je ne me suis pas filmé vendredi en me rendant à l'URSSAF. Ca aurait valu le coup, mais il m'eut fallu beaucoup, beaucoup, beaucoup de batterie. Pour faire bref, comme promis en titre (en en 2012, il faut tenir ses promesses), je suis entré à 12H45 et ressorti à 15H15 avec EXACTEMENT le papier tamponné que j'avais consciencieusement rempli en ligne deux mois avant.
Ce genre de récit a ceci de pratique qu'il tacle gauche et droite dans leurs tréfonds idéologiques. "Putain mais deux heures de queue pour être reçu et pendant ce temps là, on gagne pas", cette litanie du consumériste dépité, je l'ai entendu à maintes reprises pendant mon attente. La droite moque une gauche incapable de bosser, une armée de fonctionnaires qui ne savent rien foutre. Souvent je les voyais repartir, ces fiers entrepreneurs, le rouge au front d'avoir été conseillé de lire le formulaire où il était écrit ce qu'il fallait cocher et nos fiers entrepreneurs n'avaient pas pris le temps de lire "quand on lit, on gagne pas". Et oui, camarade...
A côté de ces rares gros cons, il y avait le lot commun en difficulté devant le sabir administratif. Et puis tout ceux, souvent "issus des minorités visibles" comme l'a finement trouvé le hiérarque cul pincé qui voulait dire que certains immigrés n'étaient même pas blancs, qui se heurtaient au limite du bon sens et venaient se renseigner sur le moyen d'être payé pour ce qu'ils avaient fait. L'intégration passe par là compagnon opprimé, le formulaire B647 qui t'ouvrira les portes, d'autres formulaires.
Et au milieu, j'étais là pour exister. Ca a fait rire la conseillère qui me recevait. Je lui disais que j'avais fait tout ce qu'il fallait pour être dans les clous, avait saisi l'opportunité d'un modèle souple et rapide (l'autoentrepreneur) mais puisque, problème de riche, je dépassais les plafonds, je venais me mettre "en libéral". Le mot me coûtais, je préférais dire "à mon compte". Je m'étais donc inscrit en ligne, mais j'ai disparu des écrans radars. La modernisation de l'Etat trouvait ses limites. Il y a 15 jours, j'appelais l'URSSAF puisque je n'avais pas de réponse à mes mails. J'expliquais mon problème, on me répondait que les problèmes pour l'enregistrement en ligne n'étaient pas traités par mail (logique). On m'enjoignait donc à imprimer mes mails (authentique) et de les envoyer par courrier. Ceci n'ayant pas donné plus de résultats, je suis allé passé 3 heures dans la maison des fous, et ai passé un peu de temps avec une conseillère très sympathique qui citait Aristote pour détendre l'atmosphère. Elle voyait un très gros livre sortir de mon sac, alors qu'elle jetait un coup d'oeil chenapan, je la devançais : "ce sont les cours de Bourdieu au Collège de France sur l'Etat. Grosso modo sa thèse, c'est que l'Etat n'existe pas en tant que tel, mais fonctionne sur les ressorts propre à la croyance", nous regardions les papiers qui officialisaient ma mise à mon compte, fièrement tamponnés et partîmes d'un grand éclat de rire. L'humain était au fond du couloir. Bref, je suis allé à l'URSSAF.
09:39 | Lien permanent | Commentaires (8)
09/02/2012
Comparer Mélechon et le Pen, les chiens de garde malades de la rage...
Comme de nombreux passéistes, je lis la presse papier sans délaisser la presse en ligne. Si je continue dans cette attitude c'est, entre autres, parce qu'à mon sens rien ne remplace une demie heure (parfois 20 minutes...) quotidienne de lecture du "quotidien de référence" en termes de densité d'informations. Même si souvent je m'égosille ou je me désole, notamment pour leurs attaques à répétitions sur sciences-po, ou pour leur fascination jadis pour DSK (z'ont vite tourné casaque la dessus) cette lecture reste précieuse pour qui veut se targuer d'être informé. Juste après, je tombe sur la une de l'express "de l'affaire du Carlton aux réseaux étrangers: les Call Girls" et je me dis sans ambages, "qu'ils crèvent, l'auront bien cherché". Mais ceci est un autre sujet... Revenons au Monde.
Le Monde se veut ouvert, mais pêche en réalité par l'intolérance consubstantielle à la pensée mainstream. Ce côté Brice Couturier (mais envoyez le à Davos en invité permanent...) point de salut hors du marché libéral mais régulé parce que tout de même... C'est exaspérant. Politiquement, le Monde regarde donc avec une curiosité mâtinée de bonhommie la montée en puissance des écologistes tant qu'ils se ramassent à la présidentielle. Il compatissait avec l'inexorable déclin du PCF car cela rapprochait son but ultime : un bon vieux bilatéralisme à l'anglo-saxonne. A la rigueur, Bayrou incarne une espèce de Lib Dem très bien pensant, tout cela reste dans le cadre. Mais fors ce prisme qui va du centre gauche à la droite classique, point de salut. Pour le FN, ils composent comme tout le monde: en les ignorant. Pas malin mais tout le monde fait pareil. Fait nouveau qui courrouce chez Niel/Pigasse/Bergé, la montée du Front de Gauche. Ils ont voté "non" le 29 mai 2005 à la bénite consitution de Giscard, veulent VRAIMENT limiter les hauts salaires, lutter contre la fraude fiscale, les paradis fiscaux, repenser les systèmes de décisions économiques, limiter le pouvoir des actionnaires, favoriser les investissements liés à l'emploi et l'innovation sans ce mot valise de "compétitivité'... Inacceptable pour le Monde qui comporte en son coeur 4 pages sur l'économie peu suspecte de remise en cause du système actuel (sans compter le supplément "argent" ; j'avais l'impression d'être un traître à la cause en lisant ça dans le métro. Penser que mes compagnons de voyage me prenait vraiment pour un scrutateur des oscillations de l'assurance-vie...). Alors, le Monde a trouvé un truc génial : Mélenchon / Le Pen, mêmes combats claironne t'il en une depuis quelques semaines.
D'autres que moi s'en sont émus, évidemment, comme là (http://l-arene-nue.blogspot.com/2012/02/populisme-est-ce-...), mais cette observatrice aiguisée n'est pas abonnée au quotidien du boulevard Blanqui...
Cela fait trois fois que le Monde affiche fielleusement ces ressemblances. Fieulleusement, fallacieusement, tout ce que vous voulez car le Monde précise dès les premiers paragraphes "les programmes sont radicalement différents". Ha ? Mais s'ils sont différents à ce point, pourquoi les rapprocher ? Parce qu'ils parlent au peuple ? Mais tout le monde parle au peuple, sinon on fait du lobbying électoral...
Le populisme a bon dos, surtout que le dernier "sondage choc" mettant Hollande et Sarkozy a égalité, on voit bien que l'absence de le Pen ne profiterait en rien de rien de rien à Mélenchon, mais à Sarzkozy très majoritairement, mais sur cette évidence politique le Monde est moins dissert... La malhonnêteté intellectuelle érigée à ce niveau ça ne s'appelle plus de l'incompétence, ça s'appelle de la haine. De la haine de la gauche comme tous les sociaux libéraux du Monde qui se sont rabattus sur la droite classique plutôt que l'autre gauche. Dans le fond, le Monde rappelle ce vieux mot d'ordre communiste : la droite c'est pas grave, on sait s'opposer, le problème c'est les socialistes, ils nous ont toujours trahi. Trahison des clercs, trahison du Monde a sa mission, nous voilà bien... Contraints que nous serons d'avancer vers une alternance forcée. Ne soyons pas daltoniens: en réalité, au second tour, plutôt que rose, nous voterons jaune...
07:22 | Lien permanent | Commentaires (3)