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27/10/2009

Que devient le clown quand son nez a bleui ?

A l’heure ou se mènent les travaux sur la pénibilité du travail, ou Darcos fait turbiner tout le monde sur le stress et que les sénateurs ont ouvert la vaillante possibilité de travailler jusqu'à  70 ans (reconnaissons leur en la matière une louable exemplarité), un cas mérite notre attention : les clowns. Bien sûr, ils émeuvent moins l’opinion que les ouvriers ou les pilotes harassés, mais s’il est bien une activité que l’on ne devrait pas prolonger, c’est bien celle d’amuseur public.

Souvenons nous d’Aznavour. « A l’heure ou naît un jour nouveau, je rentre retrouver mon lot de solitude. J’ôte mes cils et mes cheveux comme un pauvre clown malheureux de lassitude ». Ca ne vous prend pas aux tripes, une formule pareille ? Alors, bien sûr, vous allez me dire, le coup du clown triste, dans le genre poncif. Oui, c’est vrai, c’est tellement bateau qu’on pourrait en retrouver un dans un roman d’Alexandre Jardin. Mais comme disait mon coiffeur, « quand c’est un cliché, c’est qu’il y a un fond de vérité. Je vous rafraîchis la nuque ? ». Et effectivement, la part de vérité, c’est celle d’Aznavour : le clown est épuisé en vieillissant alors que la haine conserve. Vous êtes dubitatifs ? Mais regardez les papes, ces modèles de haine de l’autre, ils s’attachent à la vie comme peu de tiques à des molosses. Souvenez vous  des septuagénaires de l’administration Bush, ils étaient frais comme des gardons. Alors que Desproges et Coluche sont morts avant d’avoir atteint la cinquantaine et Molière a trépassé juste après (51, comme le Pastis)… Vous me rétorquerez Wooody Allen, mais n’avait-il pas l’air déjà très vieux à 20 ans ? Vous m’opposerez inversement, Hitler. D’après ses biographes, il faisait beaucoup de blagues en privé, il paraîtrait même qu’il nourrissait un certain complexe par rapport à l’humour juif.

Et donc, nos sémillants hommes politiques ont repousser l’âge de la retraite à 70 ans (enfin, ils ont ouvert la boîte de Pandore avec cet amendement de novembre 2008). Je vous le dis tout net, pour les clowns ce ne sera pas tenable. Imaginez vous Charles Pasqua rendant visite aux enfants malades pour leur raconter en charades le procès Falcone ? Allons allons, ce n’est pas sérieux. Il n’a plus l’âge, il faut lui fiche la paix, maintenant. Et encore, là je vous parle d’amuseurs professionnels, mais les ménestrels occasionnels, les intermittents troubadours ? Ceux qui, au sortir d’un emploi de bureau, mettons, enchaîne une deuxième journée dans une noria de mondanités où ils se savent investis d’une mission : empêcher la morosité de gagner autant de terrain que la vérole sur le bas-clergé breton. Et bien, ils fatiguent vite. Et il faut les protéger de cet amendement scélérat. Si vous ne me croyez pas, faites l’expérience. Passez votre journée à remplir vos tableurs excel, supporter les oukases de votre chef de rayon ou de bureau ou de chèferie, et, à l’heure où la cloche retentit enfin, changez votre tournure d’esprit. Oui, d’ordinaire vous rentrez regarder les Guignols car il est bien légitime de décompresser. Mais pas cette fois, là, c’est à vous de faire le guignol, de singer Sarkozy, de disserter gravement sur des choses légères ce qui perturbe tout le monde (comment ce type peut-il avoir une théorie sur les gens qui achètent une vraie salière en verre). Cela vous permettra d’aborder avec désinvolture les sujets qui angoissent vos comparses (le couple, l’avenir du monde, l’avenir du PS, le passé du PSG) et de les laisser regagner leurs chaumières, rassérénés. Ils ont un peu bu, mais ils se sont surtout délectés de vos paroles, ils sont délassés et gais, ils ont même envie de faire l’amour. A ce sujet, un sondage vient de souligner que 37% des japonais en couple ont connu une période d’abstinence supérieure à un mois à cause de la fatigue. Et bien, avec des clowns, ça ne leur arriverait pas. Mais assurément, ce n’est pas lire Murakami ou Mishima qui vous remet d’humeur gaudriolesque après le turbin. Mais là, on s’égare et pas seulement de Montparnasse, qui de toute façon nous éloigne du Japon puisqu’elle mène vers l’ouest.

Revenons plutôt dans ce bar où vous êtes resté, épuisé devant votre dernière bière pendant que les autres sont partis. L’alcool a disloqué vos traits, vous vous teniez quand ils étaient là, bombiez le torse avec une rigidité amidonesque. Mais maintenant qu’ils ne sont plus là, que l’on a plus besoin de vos services, vous retrouvez votre vrai visage et ce n’est pas beau à voir la ruine physique par le rire. C’est un peu le portrait de Dorian Gray qui ressurgit. Comme Dorian, vous avez pactisé avec le diable : vous avez demandé l’humour éternel pour que les gens vous aiment. Tout le monde vous voit alors avec cette bonne bouille de moine lubrique sans savoir que votre vrai portrait ressemble à celui d’un clown dont le nez aura bleui de froid à l’âme. Reste à espérer que votre copain le diable en a une bonne à vous raconter…

Demain, je pars en vacances car même les clowns ont le droit aux vacances. Enfin, pour l'instant....

26/10/2009

Aux caisses, citoyens !

Ayant quitté le salariat pour le lancer libre, je peux écouter la radio plus tard. Et faire des interviews en caleçon, ce sont les principales différences... Avec le fait de pouvoir faire la sieste et quelques autres détails.

Bref, j'écoutais la radio plus tard, à l'heure d'Isabelle Giordano. Elle était envoyée spéciale aux Assises de la consommation. Je n'ai rien contre les Assises, j'ai rien à me reprocher, j'en ai même organisé sur le thème du mécénat d'entreprise. D'ailleurs, nous aussi ont était 500 alors qu'on avait pas Lagarde et Michel-Edouard Leclerc. Ce dernier est venu parler au micro de la Giordano. J'aime beaucoup Giordano, elle incarne l'espoir: on peut être complètement con, niais, avoir la pugnacité d'un Flamby et malgré tout avoir une émission sur France Inter et une de temps sur Arte où elle parle culture et là, on se gondole. Après, on s'étonne que Jeannot Sarkozy y veuille aller à l'EPAD, mais si l'incompétence empêche d'avoir un poste maintenant...

Donc, Michel-Edouard Leclerc rentre en studio. La tension est palpable. L'heure est grave comme dirait mon coiffeur au moment de m'égaliser les pattes. Et là, Giordano, elle flingue: "on a entendu Christine Lagarde dire qu'elle voulait donner plus de droits aux consommateurs, ça vous inquiète?". Elle est comme ça, Isa, faut pas la faire suer. La réponse de l'amateur de BD vaut son pesant de cacahuètes (hors taxes) : "mais c'est MON combat. Le consommateur, aujourd'hui veut de l'éthique, du bio, il marque ses choix politiques. Et, osons le mot, il est en quête de sens".

Osons, ouais... Osons, c'est un gimmick d'Elkabbach et la devise d'HEC "apprendre à oser" . Quand à la quête de sens, on se souvient qu'elle a été proposée au CSA entre deux crises de fous rires par le tandem Le Lay/Mougeotte à propos de la qualité éditoriale de TF1. S'il en va de même de la qualité des produits que l'on pourra magasiner chez Leclerc.

Tout de même plutôt que d'être bêtement sarcastique, je vais longuement méditer ce consumérisme politique que je ne soupçonnais pas. J'ouvre mes placards en sueur: la gauche peut elle boire du Lavazza ? Faut-il choisir une marque prolétaire ou Max Haavelar pour signifier mon attachement à la réduction de la fracture Nord/Sud ?

Il y a une dimension tragi-comique tellement on dépasse l'indécence: le Président d'une boîte qui pèse 30 milliards d'euros se dit soucieux de la prise de conscience citoyenne forte de types qui achètent du café 3,21 euros contre 2,37 auparavant. Et lui, dès qu'on envisage (Galland et autres) de toucher un tant soit peu à ces subsides, il mord... Ce matin, je suis allé retirer des sous à la BNP, autre boîte qui compte ses profits en milliards et l'écran me disait sans rire "Mobilisez-vous: vos centimes au profit des associations et des fondations".... Le cochon qui paie, je crois qu'on le prend de plus en plus pour un con. Enfin, s'il en redemande (l'opération fonctionne...).

Demain? Demain est un autre jour. La vache, le lancer libre ça rend philosophe...

23/10/2009

L'usage du silence

Hier soir, chez Taddei, superbe illustration du dicton "le silence est d'or".

Dans l'absolu, le thème était sérieux: "Sarkozy à mi-mandat". Bon. Ils ont réussi à passer plus d'une heure sur ledit "bilan" sans parler du plan hopital, de la carte judiciaire, de l'autonomie des universités, du paquet fiscal, du bouclier fiscal, de la suppression de la pub sur France Télé, du RSA...

Alors, là, évidemment, on se dit comment diantre est-ce possible ? Très simples, ils ont laissé des "commentateurs de la vie politique" parler. Il y avait notamment Jean-François Khan, manifestement tellement plus intelligent, mais qui s'enferre dans les mêmes guerres pichrocolines (il a passé une demie-heure a dire qu'on ne devrait même pas parler de Jean Sarkozy). François de Closets, en fait moins con que ce qu'il laisse penser de lui quand il vend ses livres, Serge Portelli, grand magistrat, mais un peu urticant à tout centrer sur les libertés publiques sans jamais parler de partage des richesses (le piège dans lequel sombre toute la deuxième gauche)...

Côté droit, on avait Chrisitan Makarian, le directeur adjoint de l'Express. Monsieur Makarian est un homme sérieux, il ne dit pas mi-madat, mais mid-term tout de suite, ça classe son homme. Il peut dire des énormités comme "ce qu'il y a de malsain, c'est que maintenant c'est Sarkozy qui donne le tempo médiatique et les journalistes tombent dans ce gros piège et lui courent après'. De la part du directeur de canard qui a consacré 96% de ses une depuis 3 ans à Sarkom, c'est une vaste blague. Et puis il y avait Frank Tapiro...

Frank Tapiro. Comment vous dire ? Faire un post "est-il un con?" serait superflu. Il vient de publier "pourquoi la vache qui rit ne pleure jamais, essai sur le génome des marques" et a été élu 3 fois meilleure agence indépendante depuis 2002. Taddei précise qu'en temps que conseiller de Sarko, on lui doit notamment "ensemble, tout devient possible" en 2007. Bon, c'est pas pire ou plus nul qu'autre chose. Le problème, le vrai problème c'est qu'il pense VRAIMENT être un acteur politique majeur. Il a un débit de Uzi, 200 mots minutes. Il brasse du vent avec une détermination à la Michael Phelps, ne s'arrête jamais, ivre de ses commentaires. Il jubile de placer des formules "ce que j'appelle l'électeur consommateur" "ce que je nomme le déphasage..." Beaucoup d'anglicismes, beaucoup de concepts éculés qu'il avance comme révolutionnaires et à l'arrivée ce truc inattendu (après un laius à pleurer de rire sur le "talent original et originel de Jean Sarkozy") : si Nicolas Sarkozy est en chute dans l'opinion, c'est que l'opinion est en avance sur les thèmes du politique. En gros, Sarko était raccord avec les thèmes à la mode de la société française en 2007 et aujourd'hui, il est plus à la mode, mais un petit tour par le dressing sémantique de Tapiro et tout va s'arranger...

Et au milileu de tous ces mâles persuadés de savoir plein de choses sur les blocages et la relance du régime, une étranegté presque une incongruité : une femme. Caroline Bongrand, romancière, essayiste. Elle a fait un truc dingue à la télé. Fou même. Elle passait son tour la plupart du temps. "Rien à dire sur le sujet". "Pas d'idée originale, je passe mon tour". Du coup, Khan et de Closets se sont calmés, le directeur de Courrier International qui a rejoint a aussi baissé la voix. Seuls les deux connards publicitaires (l'un des deux a une carte de presse, mais bon) ont continué à avancer leurs super grandes vérités sur un bilan sans jamais parler du fond (c'est sale) mais en évoquant des concepts, des postures...

Heureusement que le ridicule, dont on notera au passage la masculinté du terme, ne tue pas, le plateau aurait eu un air de fosse commune. Quand à Caroline Bongrand, ses silences m'ont bigrement donné envie de lire ses livres.

Demain, je commence une nouvelle vie loin du salariat, et comme on sera samedi, j'écouterai pousser mes cheveux...