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28/02/2013

Happiness is good for you

affiche-Happiness-Therapy-Silver-Linings-Playbook-2012-1.jpgLe temps de l'air est frais. Lourd aussi. Plus sombre que les nuages, triste à en crever. Excédé par cette sinistrose aigüe, souvent propagée par ceux qui ne sont pas concernés, je décidais de me soigner en allant voir ce film dont tout le monde disait qu'il agit comme un onguent, Happiness Therapy. 

Commençons par la fin, comme Arnold qui entamait ses repas par le dessert dans une série qui mettait la gouache : ça marche. Quand la lumière se rallume, un sourire mièvre s'accroit aux coins des lèvres. Pendant deux heures, on a voulu y croire, on y a cru et comme le héros du film dit "si tu donnes tout, tu as le droit à un rayon de soleil". Alors, le happy end annoncé dès le début (je spoil rien du tout) les bipolaires beaux comme des dieux se roulent un gros patin pour finir. Bon. Evidemment, les ressorts sont gros comme une Une du Nouvel Obs qui se défend de faire du racolage, mais peu importe, ça marche. Parfois, faut pas bouder...

OK, les scénaristes ont choisi des bipolaires sur brillants, sexy en diable et qu'on a tout de suite envie d'adopter. Pas idiots, ils vont au-delà de la vitrine et nous montre bien à quel point c'est coton, à quel point les rechutes guettent. Ils veulent aussi prouver que le fait de ne pas vouloir prendre ses médocs peut empirer les choses car la bipolarité est une vraie maladie. Enfin, ils ne trichent pas tant que ça puisque le film raconte que lorsqu'on est tombé bas, il faut d'abord se reconstruire par d'autres activités et faire le point dans sa vie privée avant de bosser.   

Au-delà de ça, le film mérite le détour pour son approche judicieuse d'une société américaine toute entière au bord de la bipolarité. Toute entière en "état limite". Ce qui aide à relativiser sur les déviances supposées des uns ou des autres, le film ne juge pas les forts d'un côté, les faibles de l'autre. On y voit des familles déchirées, de la violence larvée partout, du besoin de décompressé chez le psy qui va au stade comme chez l'agent immobilier qui fracasse tout dans son garage. Si elles sont socialement plus acceptées, ces décompensations n'en sont pas moins violentes comme le souligne avec une très belle justesse les images au ralenti (pour une fois que je les apprécie) des supporters de football américain. Le stade comme ultime lieu de melting pot et de brassage social ? Ce serait un peu gros, non ? Oui, et heureusement, ils se foutent sur la gueule.

Malgré toute cette noirceur, on rit beaucoup dans Happiness Therapy, on s'émeut aussi. En ces temps troublés où on ne sait plus si les boeufs sont des chevaux et les poissons des zèbres, ce film est assurément 100% plein d'humanité. Ce qui justifie pleinement le ticket d'entrée.

26/02/2013

Le sexe est-il un droit de l'Homme ?

The-Sessions-1.jpgC'est le genre de film que l'on est heureux d'avoir vu en se disant que si l'on y avait pas été invité, on l'eut manqué et cela aurait été une erreur. J'avais été gentiment convié à l'avant première de The Sessions (sortie le 6 mars) au motif, me disait l'attachée de presse, "que le sujet pouvait m'intéresser". 

Ha ? En parcourant le dossier de presse, je découvrais que le film mettait en scène, à partir d'une histoire vraie, un homme de 38 ans atteint de Polio et complètement paralysé qui découvre l'extase charnelle grâce aux services d'une assistante sexuelle. Une sujet familial par essence... Dans une vie précédente, je rédigeais un mensuel destiné aux professionnels oeuvrant auprès de personnes en situation de handicap et après avoir fait le tour des sujets d'accessibilité, de droit à la compensation, à la culture et aux loisirs, de tarification et autres insertion professionnelle, j'avais été sollicité par des associations qui souhaitaient me parler du sujet du droit à l'assistance sexuelle. Dire que j'ai immédiatement compris la gravité du sujet et me suis esbaubi serait évidemment un mensonge éhonté. Passée une gêne polie, je remerciais mes interlocuteurs et retournais chez moi en écrivant un article distant, où je pointais l'existence de cette revendication chez certaines associations, mais en me gardant bien de m'associer à cette requête. Je le reconnais franchement, je voyais cela comme une espèce de prostitution charitable, une pratique non vraiment blâmable, mais dont il ne fallait surtout pas parler.

D'autres rencontres, d'autres discussions, et mon avis sur cette question taboue en France a changé. Je ne vois plus nos amis belges ou suisses qui ont légalisé le droit à l'assistance sexuelle comme des étrangetés. Certes, le fait que cette prestation exotique soit remboursée par la sécurité sociale a quelque chose d'étrange ; en période de crise des finances publiques, il semble assez évident qu'il y ait d'autres priorités pour un pouvoir politique en charge de réduire un taux de chômage historiquement haut. Il n'empêche, je suis certain que tous ceux qui iront voir "The Sessions" modifieront a minima leur perception de la question. Les assistantes sexuelles ne sont pas des prostituées, le nombre de séances est limitées afin de ne pas créer de relations, mais d'aider une personne non autonome à découvrir des sensations auxquelles la majeure partie de l'humanité accède. Je ne sais si l'histoire est entièrement vraie mais dans le film le rôle du curé confesseur joue un rôle important : à l'américaine, il lui explique que Dieu fera une exception pour que celui qui ne peut se débrouiller seul accède à toutes les fonctionnalités de son corps. L'assistante est également docteur en psy et Hélène Hunt incarne parfaitement les contradictions et les difficultés immenses induites par une telle occupation professionnelle (qu'elle n'exerce donc que de façon très occasionnelle). Je vois sur le dossier de presse que le film a glané des tas de récompenses du public. Cela me paraît mérité plus que de la part des critiques cinés. Je ne dirais pas que c'est une grand film, mais assurément une fiction qui permet de faire bouger le réel. Ca n'est vraiment pas rien, en 1H34...

25/02/2013

Le retour des gladiateurs ?

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Ave modernita, morituri te salutant. Un dimanche un peu gris, j'apercevais sur les réseaux dits sociaux une vidéo de Stade 2 sur l'extension du domaine de la lutte sans règles. Je cliquais et m'informais ainsi de l'engouement très fort pour les MMA. Pas les Mutuelles du Mans Assurances, mais les Mixed Martial Arts, si vous voulez partagez ma sidération, on peut voir un reportage édifiant .

Qu'apprend-t-on ? Que de jeunes cadres survitaminés, sur stressés et toujours sur la crête se défoulent joyeusement dans des cages où tous les coups, y compris au sol, sont permis. Bon. Le sujet en soi n'a rien de nouveau. Fascination de l'époque pour la violence, culte de la performance extrême, quoi de neuf sous le soleil ? Après tout, aujourd'hui les étoiles du capitalisme financier expurgent leur haine de leur vie dans des challenges sportifs toujours plus improbables : exit le marathon, cette promenade de santé pour comptables, et vive le triathlon Iron Man, le marathon des sables ou la montée de l'Everest et le passage du Cap Horn en kayak. Pauvre petits soldats qui n'ont plus goût à rien et qui se répandent en larmes dans les bras d'une pute au milieu d'une partouze pour exprimer leur désarroi devant le vide.

Si ce n'était que cela, donc, cela ne vaudrait pas que l'on approfondisse. Mais cette fois, le fabuleux du sujet est que les tenants de cette lutte veulent l'approbation de la doxa : le beurre, l'argent du beurre et l'approbation des dominants. Ils apportent pour preuve de leur bonne foi des règles : "catégories de poids, contrôles anti-dopages, suivi des athlètes". Voilà pour l'habillage. Et évidemment, l'antique argument de la modernité : aux Etats Unis, ils sont reconnus comme des athlètes, ils sont consacrés et en France, vus comme des voyous. Nous serions dans l'erreur. 

Dans Fight Club de Fincher ou d'autres films sur ces nouvelles réunions de violence, le fait qu'elle soit le manteau, dans des caves ou autres est justement la base de l'adrénaline. Ils cherchent le défoulement, non la respectabilité. Un sport de voyou pratiqué par des voyous ne peut obtenir l'approbation des honnêtes gens... Valérie Fourneyron, qui s'est rappelé à mon souvenir par le truchement de ce reportage, rappelle à juste titre qu'il ne saurait y avoir d'éducation par le sport avec ces gladiateurs des temps modernes. C'est peut être passéiste, mais j'aime ce côté gaulois contre l'empire Romain qui a juste traversé l'Atlantique...