Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

21/09/2011

Chibanis traqués, morne peine

vieux.jpgVieux et immigré, ça fait un défaut de trop pour nos gouvernants actuels. Dans leur grande traque contre la fraude sociale, la nouvelle priorité est d'aller vérifier ce qui se passe chez les vieux immigrés qui perçoivent un quart de demi pension. Un excellent reportage qui a dû attirer 1/1000ème de l'audience de l'infomercial de TF1 dimanche soir est audible là : 

http://www.franceculture.com/emission-le-magazine-de-la-r... 

Il faut écouter le désarroi de ce retraité marocain subir des humiliations administratives supplémentaires. Lui qui ne parle toujours pas Français (bon, là, on peut discuter sur notre modèle d'intégration qui permet à un type de rester 40 ans sur notre sol sans parler, mais ce sera un autre post) mais venir avec son passeport se justifier d'être aller quelques jours au Maroc au chevet de sa femme malade. Ce qu'il ne comprend manifestement pas -et c'est heureux- c'est que la traque dont il est l'objet résulte d'une volonté farouche : lutter contre la fraude sociale. L'argument massue est que ces immigrés, ces chibanis, partent souvent plus de six mois à l'étranger ce qui les dédouane de payer des impôts en France. Haro sur ceux qui trichent ! Après la diffusion du reportage, l'économiste Antoine Math rappelle qu'un grand nombre de contribuables très fortunés organisent leur exil plus de six mois par an pour éviter de payer des impôts en France. Le montant de leurs fraudes peut atteindre pour les plus fortunés, le total de plusieurs centaines, voir de milliers de chibanis... Lesquels vivent d'ailleurs moins longtemps que les cadres - sept ans en moyenne, et dix années de moins en bonne santé selon l'Observatoire des Inégalités - ce qui réduit d'autant la durée et donc le montant total de leurs pensions.

Antoine Math n'évoque pas un cas vomitif, celui de Jean-Claude Marian. Jean-Claude Marian est milliardaire, il préside aux destinées du groupe de maisons de retraite privées Orpea. Il a fait fortune grâce à des notes à des investisseurs ploutocrates leur intimant d'investir massivement car "le système français de sécurité sociale, très généreux, garanti les revenus des établissements et ouvre la voie à des profits de l'ordre de 15%". Il a réussi et propose une centaine d'établissements où nos anciens paient plus de 3000 euros par mois, 2000 de leurs poches, le reste aux frais du contribuable. Le tout a enrichi notre Jean-Claude Marian au-delà de toute espérance: à part quelques tycoons de la nouvelle économie, personne n'a fait fortune aussi rapidement que les dirigeants de maisons de retraite en France. Une fortune que ledit PDG rechigne à partager puisqu'il s'est domicilié dans les banlieues chics de Bruxelles, à la fiscalité plus clémente. Monsieur Marian est donc citoyen et contribuable belge, mais il ne manque jamais un détour en France quand un colloque ou un symposium lui donne l'occasion d'aller saluer l'admirable travail de Madame Bachelot... C'était notre rubrique, tous les hommes sont égaux devant la loi fiscale, mais certains sont plus égaux que d'autres...

 

 

 

19/09/2011

Sexe (forcé), mensonges (concertés) et vidéo (sur TF1)

DSK-FMI.jpg

Ha ! La magie de la télévision. A l'heure du direct je regardais nos bleus se prendre une dérouillée par les espagnols. En rentrant, triste comme un menhir, je me suis rappelé que par obligation professionnelle, je devais me coltiner le mea culpa calculé du priape de washington. Si vous avez 23 minutes à perdre, vous pouvez la voir là: 

http://videos.tf1.fr/jt-we/l-interview-de-dsk-au-20h-l-integrale-6712566.html 

C'est au-delà de mes espérances. Un monument de malhonnêteté intellectuelle, l'empyrée de la persuasion clandestine. Passons sur ce qui est dénoncé par tous et clair comme de l'eau de roche, le dimanche ronronnant, TF1, Claire Chazal copine de Sainclair. Bon. Regardons les tics de l'homo erectus erectus erectus...

- D'abord les silences. Ca fait chic. Plus aucun politique ne se permet ce luxe, puisqu'à l'heure des interviews de 6 minutes, chaque silence est un message à faire passer en moins. Doumé a négocié 23 minutes de temps de parole. Ces silences sont autant d'aveux d'innocence.                  

- Ensuite l'ordre: Sofitel, Banon puis la primaire enfin la Grèce. Une sorte de montée en puissance : on te fait expier, on botte en touche on t'amène à rien dire mais rappeler que t'es important et on te fait briller... Si avec ça c'est pas lui qu'a concocté le plan. Il impose l'agenda de l'interview comme d'autres imposent l'agenda médiatique : parler d'abord de la délinquance, puis de l'insécurité, puis du danger de l'islam et quand personne n'est plus devant la télé, des derniers chiffres du chômage...

- La gestuelle : mine renfrognée, pognes serrées, costard sombre. Il brandit le rapport du procureur à plusieurs reprises comme pour matérialiser des évidences inconnues de tous. Chazal opine gravement devant un rapport que personne n'a lu, mais à voir leurs mines contrites à tous les deux, on imagine que le document papier contient les preuves de l'innocence de DSK. C'est beau comme à l'époque de l'ORTF...

- Mais surtout, la grande force de cette interview c'est l'absolue absence de relance de la part de Chazal: DSK lui dit bien qu'il a sauté une femme de chambre pendant son service à l'hôtel, sans la payer et ça n'étonne personne, on passe à la question suivante... Chaque fois que DSK avance des arguments peu fiables, Chazal sourit et passe à autre chose. Dont acte. Il dit qu'il a honte, qu'il sait qu'il a fait étalage d'un fric indécent et qu'il a employé la moitié du PIB du Congo pour chercher des poux dans la tête d'une femme de chambre, mais surtout ne pas le relancer sur l'extravagance des moyens pour un mec qui est sûr de son innocence.

- Pour les questions plus gênantes, DSK a appris de Sarko à manier la "cornerisation", comprendre par là mettre l'intervieweur dans un coin dont il ne peut s'extraire par une rhétorique par aporie proche du ridicule mais avec un journaliste servile, ça passe. Là, l'exemple grotesque est l'histoire du logement : "je n'avais pas le choix. On avait pris un 20 m2 (mais bien sûr...) mais comme on ne voulait pas de nous, nous avons dû nous rabattre sur ce 600 m2, pour des raisons de sécurité, nous n'avions pas le choix: c'était ça ou Riker's Island". Grotesque, ubuesque, mais ça passe. Pourquoi se priver ? 

Au final, le parallèle est troublant : DSK, comme Sarkozy aime l'argent, les médias et manie une mauvaise foi teintée de stratégie de joueur de bonneteau. Tous deux ont une si haute opinion d'eux mêmes qu'ils arrivent toujours à s'inventer des complots contre eux pour penser qu'on veut les abattre sans jamais reconnaître vraiment leurs torts: dire "c'est une faute morale" tout le monde le fait devant un curé... Nous l'avons franchement, franchement, échappé belle. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

16/09/2011

Rat des villes dortoirs, rat des champs-élysées...

5c6212b3.jpgBon, alors ce matin, je pense que tout le monde doit commenter le premier débat sur la primaire qui avait l'air vibrant d'intensité, vu ce qu'en disent les gazettes. Quand je pense que j'ai raté ça en buvant sottement des coups. Le principe, quand même : s'affronter sans avoir le droit de se contredire. Les fleurets mouchetés ça va à 6 ans après on fait de l'escrime. Quel intérêt si personne peut dire à Valls "ta gueule Marcellin !" ou à Royal d'aller voir dans une secte si ils l'attendent... Donc, bon, je me rattraperais au deuxième débat, ils finiront bien par se foutre sur la gueule...

En attendant, un autre truc à retenu mon attention. Les médias sont parfois un peu caricaturaux dans leur traitement des banlieues, mais les politiques ne sont pas exempts de reproches, et puis, globalement, un peu tout ceux qui n'y mettent jamais les pieds mais balancent entre compassion stérile et haine irrationnelle contre d'invisible masses. 

L'autre truc qui me chiffonne donc, c'est un tic de langage. Encore un. LA banlieue. Ce non sens intellectuel, mental, géographique. LA banlieue. Non mais est-ce qu'on parle de LA ville ? Si je dis ça, c'est que sur le réseau social bleu, j'ai pu lire ça : "DJ Medhi est mort mardi et certains déplorent la mort "d'une figure de la banlieue". Le pire c'est que la personne qui a écrit cette aberration est-elle même élue de banlieue, mais vit à Paris. Je passe sur la vision démagogique qui consiste à montrer qu'on peut être élu balnc et hyper au courant de la scène underground - comme pour un certain nombre d'idoles de Libé et des Inrocks, jamais autant entendu parler de ce DJ Medhi que depuis sa mort - ça, ils le font tous. 

Mais "UNE FIGURE DE LA BANLIEUE ?". Comme Zidane, Djamel ? Insupportable concentré de préjugés et de raccourcis: Modiano et Rollin sont des figures de Paris, les autres de LA banlieue... Sans doute d'ailleurs Modiano est-il né dans LA banlieue... Pourquoi s'évertue t'on à vouloir désigner par LA banlieue toutes les villes dortoirs qui craignent et souligner avec force compassion les 3 DJ et sportifs de haut niveau ? 1/ Neuilly, Bucq, St Germain en Laye sont également des banlieues qui coûtent plus cher désormais que Paris car elles se barricadent pour rester entre nantis. 2/ Biarritz, Nantes, Clermont-Ferrand et même Brive ont des banlieues, ça ne veut rien dire.... Faut-il parler de '"périphérie". 3/ Mais parle t'on de LA ruralité ? De tous les autres territoires...

Ce faisant, avec des tics de langage, nous construisons à une vitesse supérieure à celle de nos meilleurs TGV, un inconscient collectif opposant les rats des champs Elysées et les rats de banlieue, pour qui nous oscillons entre vindicte, haine ou compassion débile. M'est avis qu'ils veulent juste la norme. Les mêmes chances d'être ingénieur, comptable, agent EDF, entrepreneur ou artiste peintre (pas forcément graffeur...). Le candidat à la primaire qui s'engage à parler ainsi sans distinction, qui ne sera pas Valls (mais moi des white, des blancos dans ma ville de banlieue) aura toute ma sympathie...