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13/11/2011

Le long dimanche de DSK...

9782912667205FS.gifA l'époque, en 1978, le livre avait fait l'effet d'une petite bombe. Intitulé le dernier dimanche de Sartre, ce texte acide à souhait et trop en avance sur son époque car il se permettait de louer la malveillance, paraissait du vivant de l'idole. Peut être est-ce pour cela que le très beau roman de Jean-Pierre Enard n'est malheureusement pas resté dans le Panthéon littéraire.

Une réédition il y a quelques années chez l'excellente petite maison bordelaise Finitudes n'a pas suffi à faire connaître l'opus à un public aussi large que le mériterait le texte lui même. On ne touche pas à la statue Sartre de son vivant et surtout pas par la fiction, c'est le vrai blasphème. Qu'on soit Raymond Aron ou son héritier débile, Nicolas Baverez, alors la sur le fond, on peut se permettre d'attaquer avec des arguments lénifiants ("il était Stalinien") on vous ouvrira toujours les tribunes, ondes et caméras. Mais là, dans le roman véritablement politiquement incorrect, le très grand Jean-Pierre Enard osait imaginer Sartre incontinent, baveux, loqueteux. J'ai beau adorer Sartre, rien que pour Les Mots, ce croche-pattes empreint d'admiration me plaît toujours autant, dix ans après que mon père me l'a fait découvrir.

En lisant la presse française de ces derniers jours, je me dis que nos Rouletabille sont trop timorés ou trop limités, car ils se cognent au réel. Bien beau de décortiquer tous les SMS du Carlton, de démultiplier toutes les sources possibles et imaginables autour du "meilleur économiste de France" pour déceler une faille supplémentaire. On apprend ainsi presque tout de l'emploi du temps actuel de l'ancien directeur du FMI, ex favori pour la présidentielle de 2012. Des ex, apparemment, il en a un paquet, de passages, des passagères ou des voyageuses, des aléatoires, des laborantines, des professionnelles ou des occasionnelles, des dilettantes, des ambitieuses. Des réfractaires, aussi, apparemment, mais ça il ne faut plus en parler. Tout cela on nous le dit, on nous le suggère. Mais c'est un peu court. Ce qu'on voudrait, c'est creuser ce qui tient dans ces quelques lignes du Journal du Dimanche de ce matin, "seules les équations de maths le calment mais son emploi du temps reste vide".

Impensable et pourtant évident: un régal, un miel pour l'imaginaire. Imaginer l'ex "singe en rut" devenu triste dans sa cage. Après avoir secoué énergiquement les barreaux, hurlé à la mort, il s'est calmé. Un Ipad en guise de banane, l'ex puissant en est réduit à aligner les grilles de Sudoku premium comme un chômeur en fin de droits ou un retraité sans les moyens d'aller en Sicile... Quelle déchéance. Il nous faudrait une hyène pour écrire ce texte, mais une hyène talentueuse. Pas un tâcheron façon Darmon et Derai, les phacochères des éditions du Moment qui fouillent les poubelles pour assassiner Rachida Dati quand elle est au sol. Non un salaud magnifique, une ordure talentueuse pour affronter DSK dans une corrida où le taureau a déjà reçu quelques banderilles mais ne s'avoue pas encore vaincu pour autant. Faites le parler de la crise de l'Euro et son oeil frise à nouveau, il reprend du service. En plus, Silvio qui va avoir du temps libre, avec lui au moins, on peut s'amuser... Marc-Edouard Nabe a publié son "Enculé" le 6 octobre dernier, mais au titre on sent bien que ce n'est pas cela. Non Régis Jauffret saurait faire cela, ou peut être Thomas Reverdy ou Cécile Guibert, des auteurs qui n'ont pas peur des dingues mais au contraire que la folie aimante. J'espère qu'ils y ont pensé avant moi et que je pourrais lire ça en 2012, ça nous changera de l'auto-fiction... 

12/11/2011

Renouveler les déchets, c'est bien, ne pas renouveler les dirigeants ça craint

renouvelable.jpgDétournement quand tu nous tiens. Mais là encore, je m'excuse en précisant que, si comparaison n'est pas raison, le piratage d'un slogan culte de la Sécurité Sociale peut faire sens. En effet, la réclame alertait sur ceux qui abusent du système en fraudant ou en s'absentant du travail trop souvent. Le discours actuel continue de le matraquer, mais avec moins de nuances: haro sur les fraudeurs sociaux ! Soit, ça n'est pas bien. Mais il a été reconnu par la Cour des Comptes que la fraude fiscale a des conséquences financières dix fois supérieures et là, l'objurgation est bien discrète. 

Et si notre démocratie hexagonale était avant tout malade de cela ? Jusqu'au dérapage comme l'imbécile sortie de Montebourg cette semaine, qui s'est trompé de colère en réclamant la mise au pas des élus de plus de 67 ans. Des propos discriminants au plus haut point, quand son raisonnement lui même ne visait pas l'âge, mais bien la durée de mandats. 75 ans, si on a commencé sa vie politique après 40 ans dans le civil, à 60 ans, ce n'est pas nécessairement un drame. Mais 55 ans, quand on est élu depuis 30, c'est plus pénible. Or, la tendance actuelle est bien celle-ci. L'Assemblée élue sous Mitterrand I, en 1981 traduisait l'éclosion d'un renouvellement que nous n'avons jamais retrouvé. a moyenne d'âge au Palais Bourbon était alors de 40 ans. Elle est aujourd'hui de plus de 55 ans car il est très délicat de déraciner ceux qui sont en place. Il faut à chaque fois des coups de force, des résultats inattendus pour renouveler le personnel politique. Ainsi des européennes 2009 où le score d'Europe Ecologie a porté quelques nouvelles figures aux responsabilités. Fors cela, on se fige dans une reproduction à l'identique toute digne d'Huxley.

Ne pas renouveler notre personnel politique est condamnable moralement, bien sûr, mais c'est surtout un drame puisque ceux qui nous représente, endogames au plus haut point, sont empêtrés dans une logique mainstream, n'en connaissant pas d'autres. Ils ont tous le même totem, le AAA et s'auto-persuadent du vomitif et confiscatoire idéologie TINA (there is no alternative) qui constitue le summum de la violation démocratique. S'il n'y a pas d'alternative, alors arrêtons le débat et retournons en dictature... Le non renouvellement pousse toujours les mêmes idéologiquement et toujours les mêmes physiquement, empêchant les femmes d'être promues. 40 ans de lutte et toujours seulement 18% de députées ? Idem pour le renouvellement, appelez cela "minorité visible" "diversité, mais comment expliquer que pour plus de 500 députés en Métropole, une seule (Georges Pau Langevin) en soit issue ? Tout cela concoure à créer de la désespérance. C'est grave, mais il y a pire.

Il y a pire dans la mesure où le privé s'aligne dessus joyeusement. Un Didier Lombard auteur de la pire politique de management chez Orange trouve une semaine après un très beau strapontin au CA de ST Microelectronics. Idem pour Daniel Bouton de la Société Générale, des homologues du Crédit Agricole, ou encore de Desmarets qui gérait Total lors de l'Erika... Tous se recasent joyeusement en couronne. Pas un seul des dirigeants de banques qui ont causé le crash sans précédent de 2008 n'a été condamné, quelle justice ? Si l'on revient en politique, comment continuer à être crédible quand on accable de tous les maux le dealer de rue où celui qui vole des conserves dans un supermarché quand Bernard Tapie revient triomphalement avec 300 millions d'euros, quand Patrick Balkany revient à l'Assemblée Nationale après avoir obtenu des faveurs sexuelles sous menace d'une arme et corrompu la moitié de sa ville, que Manuel Asechliman maire d'Asnières condamné compte revenir et l'on pourrait continuer la liste ad nauseam mais je n'y tiens plus...

In fine, cela conforte le nouveau clivage qu'a dramatiquement fait émerger la crise de 2008 : non plus entre droite et gauche, comme cela devrait être le cas, mais entre puissants et humbles. La ploutocratie contre la démocratie. Sans un renouvellement sain, cela ne peut bien finir. On l'a compris pour nos déchets où nous renouvelons pour éviter le trop plein. Filons l'analogie et tirons en les conséquences avant qu'il ne soit trop tard...

10/11/2011

Les marques marquent-elles le pas ?

marques.gifOn continue dans les études. Après celle sur les jeunes Français, celle qui a retenu mon attention m'a été signalé par une jeune française d'ailleurs, une de celle dont les titres de métiers eux-mêmes sont tout un programme, puisqu'elle est community manager. Je mets de l'italique, parce que je n'y comprends que pouic.

Que nous apprend-elle ? Que les marques n'ont pas un impact positif sur la vie des habitants de cette planète. Là, je vous vois venir, et vous n'aurez pas tort de débarquer comme cela, vous allez me dire, "était-ce bien la peine de payer Havas Meaningful (rien que ça...) Media pour avoir une enquête nous apprenant ce que beaucoup supputent ? Et bien, je crois quand même que si. D'ailleurs, lisez par vous-même, l'enquête est commentée là : http://www.e-marketing.fr/Breves/Les-marques-en-quete-de-...

20% d'opinions positives, pour Jean-Pierre Chevènement c'est impensable au sens d'inespéré. Mais, pour les boîtes c'est fort peu. La question posée était de savoir quelles étaient les marques qui véritablement agissent pour le bien être des hommes. Ikéa et Leroy Merlin dans le Top 10 (mais pas Castorama, ce qui me navre), je veux bien, mais Nestlé ces enfoirés d'affameurs en Afrique ? Danone, c'est mieux. Plus quelques boîtes de geek. Bon. 

L'enquête est-elle sérieuse ? Oui. Est-elle honnête ? Non. Elle est biaisée et foutrement encore. Sérieuse scientifiquement puisque effectuée auprès de 50 000 personnes et avec une batterie de questions. Soit. Mais si l'on regarde dans le détail, ça coince.

Voyez les questions qu'elle pose "êtes-vous prêts à payer plus cher pour les produits plus chers? " "êtes-vous prêts à récompenser les entreprises qui s'engagent?" et ainsi de suite. Bon. L'étude souligne une très forte montée en puissance des consommateurs en termes de demande de responsabilité et fouette les marques qui se comportent mal. Donc, l'enquête serait réaliste et fermez le ban. Bah, non, c'est un peu court. Car les marques ont déjà contre-attaqué et depuis 2007, la communication sur les valeurs dépassent le commercial et le ethic washing, le green washing et le social washing sont en marche car les marques ont compris, avec un temps de retard, le besoin de correspondre aux attentes nouvelles des consommateurs. Attention, certaines sont vertueuses, heureusement, mais une majorité triche sur ce qu'elles font.

Aussi, on aurait aimé avoir dans cette enquête les questions en creux, les questions sur l'attrait de la marque, quand elle fait du storytelling et raconte sa belle histoire. Il me semble qu'Apple explose tous ses records de vente (ce post est écrit sur Apple je précise) et vend son design épuré et ses gadgets à des prix dingues en vantant sa responsablilité avec le siège le plus développement durable au monde, en Californie. Le fait que des dizaines d'employés chinois se soient suicidés pour suivre la cadence de création d'Iphone n'a pas fait bouger la côte d'amour des marques... Idem pour la mode, qui va toujours très bien et où la marque triomphe devant la qualité des produits et nonobstant les conditions de création....

Une tendance qui n'est pas prête de s'épuiser car les marques ont de nouveaux territoires de persuasion, plus insidieux qu'avant. On pense ce qu'on veut de la réclame à la télé, mais elle ne trompe personne. Plus subtile en revanche, elle apparaît sur le web qui occupe désormais plus les loisirs français que les tâches domestiques, http://www.lemonde.fr/societe/article/2011/11/10/les-fran... comme nous l'apprend donc l'INSEE. Les marques ont su investir dans un nouveau capitalisme sur la toile, le capitalisme linguistique comme l'a montré l'excellent article en dernière page du Monde Diplo de ce mois (pas de lien internet pour le coup) montrant comme les marques achètent de l'inconscient collectif via la langue à un point que c'en est flippant...

Au final, cette étude sur les marques qui marquent le pas me fait doucement rigoler. Dans les supermarchés, évidemment, tout le monde achète la marque distributeur plutôt que la marque classique. En pharmacie, tout le monde préfère les génériques aux médicaments de marque, c'est entendu. Mais la puissance commerciale des enseignes fait qu'elles sauront rebondir sans cesse et qu'elles continuent à capter la libido des consommateurs, et ça, cela ne risque guère de changer à court terme...

Demain, nous continuerons à profiter du 11 novembre en jour férié avant qu'un nouveau plan de rigueur ne nous le sucre...