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31/03/2010

Les teckels de garde...

Le livre d'Halimi "les nouveaux chiens de garde", bizarrement qualifié de "pamphlet" -alors que tout ce qu'il dénonce de collusion est transparent- a été vomi par toute la profession bien pensante. Je me souviens d'Ockrent et de Télérama pas contents du tout.

Pourtant, ce qu'écrivait Sergio 60 ans après Nizan, c'est que le ver est dans le fruit et que les journalistes français sont, plus ou moins consciemment, acoquinés au pouvoir. A deux niveaux.

En haut des organigrammes bien sûr avec les couples (Ockrent/Kouchner, Pulvar/Montebourg, Sinclair/Strauss-Khan, Boorlo/Schonberg, Hollande/Trieweiller plus les liaisons Baroin/Drucker, Sarkozy/Fulda) pardon pour la liste exhaustive, mais elle souligne quand même l'incroyable endogamie de cette profession, sa façon de penser sa proximité avec le pouvoir.

Mais, au-delà du sommet de la pyramide, la base est idéologiquement viciée. Je ne dirais pas que seul François Ruffin est exempt de ce genre de considérations, mais il est vrai que son jubilatoire essai les petits soldats du journalisme démonte parfaitement comment "l'élite" de la profession du CFJ biaise son cerveau pour reproduire de la dépêche AFP en appliquant des martingales de forts en thème sans penser en dehors des balises jaunes qu'on leur indique.

Souvent, la critique revient: tous les journalistes sont de gauche et les patrons de presse de droite. Je ne reviens pas sur la seconde assertion, elle va de soi, mais la première, permettez moi de me gondoler et pas seulement de Venise. A la rigueur, ils sont sociaux-démocrates, ce qui ne signifie pas de gauche, mais juste plus prompts que d'autres à s'offusquer quand on attaque les libertés publiques, mais ne remettent jamais au grand jamais, notre socle économique. Il en résulte une très inquiétante dérive dans les thèmes qu'ils traitent : les journalistes aiment de moins en moins parler de politique. A mesure que la politique envahit les écrans ou les colonnes, c'est pour décrire minutieusement le bal des comédiens, mais deux mesures phares (et dramatiques) comme le plan Hôpital et la réforme de la carte judiciaire ne sont pas traités. Les journalistes, installés comme novices, préfèrent le fichier STIC, HADOPI, et autres relevant de l'émotion... La droite est à la manoeuvre et la gauche, bêtement complice, court après ces conneries.

Sur rue89, site a priori pas trop droitier mais très suspect, lui aussi, de concentrer ses tirs sur du futile, une vidéo circule où on voit Mélenchon fustiger un étudiant de sciences-po qui l'interroge... C'est là:

http://www.rue89.com/2010/03/30/melenchon-traite-un-jeune...

Rappelons le contexte: on vient de passer le premier tour des régionales et l'étudiant parle de "la ré-ouverture des maisons closes" en une du Parisien. Au début, Méluche répond, mais s'énerve et finit par l'insulter car entre deux tours d'une élection il veut parler politique. Des types pas cons, comme Tristan Mendès France, brillant quand il agit pour l'Iran mais n'a là, manifestement rien compris, dénoncent l'attitude de Mélenchon qui attaque "une caissière pour dénoncer la grande distribution"... Que dalle ! Il attaque, à raison, un jeune bobo débile puant de morgue dans sa voix, déjà, si jeune, baisé du cerveau.

On sent dans sa façon de relancer qu'il méprise Mélenchon, parce qu'il sait que ce dernier ne sera pas au pouvoir. Le type n'attaque pas sur les idées, mais sur l'échiquier du pouvoir. En rentrant, le jeune fat a joyeusement posté la vidéo sur dailymotion, il n'est pas mortifié mais tout heureux de montrer à ses potes de la rue Saint Guillaume que le Front de Gauche est archéo... Avec des chiots de garde pareils, les libéraux peuvent dormir tranquille...

Demain, nous serons le premier avril, difficile de démêler les blagues des communiqués du gouvernement...

 

30/03/2010

Plutôt Duflo que Duflot

Hier soir, théâtre du Rond-Point, forum Action Modernités. 500 personnes réunies pour un thème étonnant "petite sirène contre vilaines sorcières". Comment construire un monde écologique dans l'après Copenhague et après le camouflet taxe carbone et, cerise sur le gâteau d'hier, le départ de la Fondation Nicolas Hulot du Grenelle.

Les débats sont entrecoupés de savoureux interludes artistiques et se tranchent en trois morceaux: économique, scientifique, politique.

Sur l'économique, une militante des éco-quartiers, Alice le Roy, s'embourbe et nous montre qu'on peut être très jeune et déjà complètement aux fraises et décousu; involontairement, elle fait l'apologie des libéraux. Dominique Nora du nouvel Obs nous expose les diapos de son séjour en Valley et l'arrivée imminente d'un capitalisme vert. Je pouffe. Un jeune homme bien mis, Eloi Laurent, explique lui ce qui peut se passer à force d'entente pas toujours cordiale, mais efficace avec des accords sur la couche d'ozone et je me dis "chic, un écolo intelligent".

Sur les scientifiques, on rigole. Un philosophe, Jean-Michel Besnier joue les arbitres subtilement: il renvoie les deux camps au vestiaire en expliquant que l'écologie appelle la transcendance. Ces enjeux nous dépasse, alors on a besoin de se mettre en posture rédemptrice pour nos petits enfants. L'impie, c'est Serge Galam, un physicien pote d'Allègre (beurk), mais qui avançait malgré cela des arguments forts intéressants: un hic, de taille, il prône l'inaction en attendant.

Néanmoins, je dois reconnaître que c'était sympathique de le voir décocher des flèches à notre Panda national de la climatologie, Jean Jouzel qui restait toujours sans réponse et pour cause, il est dans le registre de l'incantation. Il n'a à opposer qu'aux sceptiques, aux esprits forts, que sa foi. Quand on lui expose la Grippe A et autres avatars d'un principe de précaution excessif, il congédie l'autre en le traitant de crétin. Balèze... Idem sur le pari pascalien comme analogie du principe de précaution: Jouzel dit que Pascal savait n'avoir rien à perdre, mais Galam et je suis d'accord, lui oppose qu'on a toujours quelque chose à perdre quand on veut gagner et que méconnaître cela relève du sophisme.

Dernier débat, Giddens et Cohn-Bendit en vidéo : pur gadget et on connaît le disque par coeur. Le disque d'Edgar Morin est rayé avec des fulgurances géniales, mais faire passer un monsieur de 85 ans à 22h, ça n'est guère charitable. Reste Cécile Duflot, l'inoxydable Cécile Duflot qui confie "je ne comprends pas qu'on puisse ne pas être convaincu par ce que je dis". Sincèrement, je suis entièrement d'accord. Je ne suis pas convaincu par Cécile Duflot mais suis rassuré de voir que certains politiques croient à ce qu'ils disent, ça change... Autre point sur lequel je rejoins la jeune pousse, la politique doit être coercitive, emmerder les conservatismes. Parfaitement.

En revanche, cette jeune fille formée aux JOC est imprégnée de catholicisme dans tout ce qu'elle entreprend. Son action pour les prisons (son premier mec s'occupait de GENEPI) est scellée du sceau de la charité, sa lutte contre les 4X4 aussi, contre les immeubles poussant sur le littoral aussi... Réparons le mal de nos riches aînés, changeons le système aujourd'hui, du mal, pour un mieux vivre ensemble, demain. C'est une prédicatrice de talent, mais je ne crois plus au paradis, fut-il vert, depuis longtemps... Elle ne s'attaque pas assez pour moi aux maux actuels mais se projette toujours en 2050...

Aussi, j'ai beaucoup d'affection pour Cécile Duflot, mais préfère les cours d'Esther Duflo, la jeune aussi ( 38 ans) prof du collège de France dont les cours viennent d'être rassemblés en deux cours bouquins de l'excellente collection du Seuil, la République des idées "la politique de l'autonomie" et "le développement humain". Elle propose un arsenal d'outils, opérationnels dès 2010 et ça emporte mes faveurs...

Demain, ce sera le jour des enfants et ô chance, Dorothée est de retour....

29/03/2010

Ramon Ramon

Quand arrive le salon du livre, courage, fuyons les nouveautés. Je suis tombé sur la réédition en poche de "Ramon", de Dominique Fernandez. Plus de 700 pages d'interrogations et de souffrance d'un fils, figure très germanopratine du grand écrivain poli sous tout rapport : normalien, agrégé, Goncourt, Académie, gay mais pas folle...

Seule ombre au tableau, mais plus qu'encombrante, la fin de la vie de son père. Les 7-8 dernières années. Les presque 50 premières, Ramon Fernandez est un homme à femmes, voyageur et fin lecteur. On dit de lui qu'il est le plus fin critique de son temps avec Thibaudet. Dès leur sortie, avant les autres, il reconnaît Céline et Proust et aide à la diffusion de Lucien Leuwen de Stendhal, alors injustement méconnu... Il force l'admiration des maîtres Mauriac et Gide, et se lie avec Prévost, tôt et Nizan sur le tard. Bref, un intellectuel de son temps engagé à gauche.

Et puis sa vie bascule, il quitte sa femme et se met à boire. Alors, il rencontre l'exsudant Doriot et va vers le PPF comme un novice joue aux courses, pour voir. Il ne cessera jamais de miser plus gros. Pas le pire de tous, pas d'appel ignominieux tel Rebatet, mais quand même, acoquiné au Reich, il sera du funeste voyage à Weimar et sera d'une productivité impressionnante entre 40 et 44 quand Char et d'autres avaient cessé d'écrire.

J'avais beau connaître grosso modo l'histoire, j'ai eu du mal à décoller du livre et les 700 pages y sont passées dans le week-end. Si vous ne vous ruez pas sur les terrasses à l'heure d'été, je vous recommande chaudement de l'acheter.

Demain, nous nous demanderons si c'est parce qu'il quitte sa femme que Besson vire du côté obscur...