04/10/2010
Ce que cachent les attaques sur Martin Hirsch
Je sais par expérience que tout pluriel est d'essence fasciste donc prenons des pincettes; mais disons simplement que les journalistes qui ont évoqué le livre de Hirsch sans aborder tout son contenu sont soit des feignants, soit des malhonnêtes qui, sciemment, n'abordent pas toutes les révélations du livre pour garder le seul parfum de scandale autour de Copé et Longuet.
Je précise d'emblée être moi même en position de conflits d'intérêts : Hirsch a préfacé mon livre sur l'insertion et je peux attester que je l'aime bien. L'éthique, l'exemplarité, la proposition de solutions, tous ces trucs un peu vieillot qu'il incarne, moi ça me plaît.
Cela étant dit, balayons l'autre problème: oui, il aurait pu enfoncer Woerth avec qui il fait de l'escalade et Kouchner dont il fut dircab', très bien... Mais tout de même, si on LIT son livre, tout est là.
Ses attaques sur Copé et Longuet font mouche, notamment sur les rapports de Copé et l'argent, Copé et le surmenage, Copé et GDF Suez... Après cela, quand j'entend le même JF Copé dire "Hirsch comme moi, a eu sa famille sauvée par les justes et il fait de la délation", j'ai envie de vomir. Mais quand ce même immonde pressurise Longuet et Larcher pour que le conseil d'Etat attaque Hirsch, je dégobille... Hirshc se retrouve accusé, non pas de plagiat ou de diffamation, mais d'avoir révélé des scandales qui devaient rester secrets. Belle idée de la République...
Par ailleurs, on trouve dans le livre plus de 30 pages accablantes sur les labos pharmaceutiques, notamment Glaxosmithkline qui finance les labos de recherches avec des dons (!!!) de 9 millions d'euros. Au final, la grippe A c'est 18 milliards d'euros et 7 de profits pour les labos... Garreta, Bachelot, en prennent pour leur grade. Une page dans les gazettes ? Non.
Et cette photo de l'Elysée pendant le sauvetage des banques ou Pébereau, Président du directoire de BNP qui est là, bénévolement, et quelques jours après BNP rachète Fortis. Des échos, non ?
Petit rappel, la BNP et les labos pharmaceutiques sont parmi les principaux annonceurs publicitaires, contrairement à Copé et Longuet. Il semblerait qu'on est l'indignation à géométrie variable dans les rédactions...
Quand à la dernière partie, faite de réflexions constructive, de proposition en faveur de la transparence? A peine esquissée.
Au final, on voit bien les manoeuvres grossières voulant faire passer Hirsch pour un ingrat, un aigri de l'ancien gouvernement qui crache sur ceux qui n'aimaient pas le RSA et on légitime les oukases qu'il subit. Seul Libé (tiens, Joffrin est sauvable sur ce coup, merci Libé) a défendu courageusment un excellent et surtout très salutaire livre ! Lisez-le sans vous préoccupez de la mousse, ça vous donnera envie de renverser tout cela dans les urnes en 2012.
Demain, nous nous demanderons si Dilma ne doit pas son mauvais score a son parler cash: a propos du salaire au Brésil, elle a lâché "c'est comme les règles, on l'attend tout le mois mais il part en trois jours". Classieux...
18:45 | Lien permanent | Commentaires (11)
03/10/2010
Nuit blanche, la victoire posthume de Philippe Murray...
Il paraît que Murray triomphe, d'après l'Obs. J'aimerais juste connaître les chiffres de vente de ses essais aux Belles Lettres. Quel blaireau, à part le Castor et 216 nostalgiques vont s'enfiler 1800 pages de pure misanthropie ? Non, l'image de Philippe Murray triomphe, parce que Lucchini l'a lustré avec son spectacle il y a quelques mois...
J'ai découvert Murray au moment de la sortie de "Festivus Festivus", il y a 5 ans. Je n'avais rien lu d'aussi drôle depuis les déclarations de Minc mais Murray le faisait exprès. Il croquait la vacuité du projet politique, le ramenant à sa seule dimension événementielle avec une férocité proprement jubilatoire; les pages sur la Job Pride sont à pleurer de rire... Mais bon, il est mort trop tôt et nous a laissé ses bouquins.
Hier soir, comment ne pas penser à Murray en voyant la Nuit Blanche ? Un déferlement de créations et un public avide, forcément avide de culture... Nous étions près de Beaubourg et sommes entrés dans une église habitée littéralement par un concert de musique électronique ou des étudiants de l'IRCAM s'avançaient en blouse blanche et joystisck à la main pendant que la chef d'orchestre imperturbable, cadençaient les beats façon uzis... Disons que ça pouvait prêter à sourire car l'escroquerie culturelle, patente, avait au moins l'avantage de bien présenter: l'acoustique du lieu, la solennité, ça s'écoutait un bon quart d'heure. Au premier rang, un barbu sous LSD applaudissait frénétiquement, repris par un groupe d'italiens Erasmus qui ne savent pas qu'on ne boit pas de bière dans les églises, boisson profane... Ce fut ce que nous vîmes de mieux, c'est dire.
Surtout, des grappes, que dis-je, des bataillons, des centuries de spectateurs venus rencontrer la culture partout. Jacadi faites la fête, Jacadi cultivez-vous... Et le pire c'est que ça marche. Dans les cortèges joyeux, des lecteurs inquiets de Libé cherchent le musée de la vie romantique où DJ Stock Exchange mixera du Proust avec un sample de David Guetta. Ils croisent une bande d'étudiants qui les persuadent de les rejoindre vers les anciens frigos où une performance opposera une séance de slam reprenant des extraits de "surveiller et punir" avec en fond un concert de salsa médiéval...
Et les voilà guillerets, repartant vers des "performances" plus improbables les unes que les autres, arpentant la rue de la capitale la bouche pleine de concept et d'hyperboles qu'ils scandent en transe. Demain, les pavés sentiront un mélange d'urine et de vomi et les maliens -donc potentiellement délinquants- nettoieront tout ça avant que les cultureux d'un soir ne se réveille...
Murray ne propose pas d'issue et reconnaît que le malheureux politique n'a que ça à proposer, car ce serait trop triste, sinon; mais vraiment, en déambulant hier, on aurait voulu qu'hommage lui soit rendu. Aujourd'hui, Jacadi on refait comme d'hab', 5 fruits et légumes, une demie heure d'exercice, pas de sel, de sucre et de l'alcool avec modération...
Demain, quand même, nous reviendrons sur cette histoire de Martin Hirsch parce que les hyènes type Longuet aient été capables de saisir le Conseil d'Etat, c'est que l'opus vaut le coup.
11:41 | Lien permanent | Commentaires (8)
01/10/2010
Tibère, Tibéri, Tibérine, nouveau tango des élites
Bon, hier, le tango des forts en thème, c'était rosa rosa rosam. Aujourd'hui, c'est devenu Tibère, Tibéri Tibérine.
Tibère, donc, parce que bon, un mec qui reste 23 ans au pouvoir et se repaît des mets les plus fins quand le reste du pays est à feu et à sang, sert d'épouvantail aux gouvernants actuels pour dire: regarder ce qui se passait hier, quelle décadence.... A part De Gaulle et Mendès, parfois Jaurès on brûle tout ce qui a existé avant nous... Marat, Diderot (à sa façon) Blanqui, Fourier, Michelet, out. Caché ce passé que je ne saurais voir.
Second pas du tango, donc, Tibéri. Parce que malheureusement, et jusqu'à preuve du contraire, nous avons une classe politique stipendiée et pas qu'un peu. Conflits d'intérêts, prise illégale d'intérêts, endogamie proprement affolante avec la médiasphère... De ce point de vue, le tintamarre autour du bouquin de Hirsch est éclairant: la droite lui crache dessus, mais le PS (je n'ose pas dire la gauche) n'en mène pas large car entre Kouchner, Lang et son sens élastique de la propriété, Guérini qui donne tous les marchés à son fragin, Sylvie Andrieux qui confond comptabilité publique et privée... Tout ça fait malheureusement le jeu des populistes car pour qui lit les journaux, il devient délicat de ne pas sombrer dans le "tous pourri". Pas impossible, heureusement, mais difficile, tant les affaires la dispute à l'affairisme.
Et puisqu'on parle des journaux, transition vers le troisième pas. Hegel écrivait que "la lecture du journal est la prière du matin" et justement quand cette prière déçoit, on se retourne vers la prière originelle. D'où le succès populaire du film de Beauvois, mais aussi la résurgence de l'enseignement du catéchisme y compris chez les athées, de l'explosion de demande de retraites spirituelles, notamment chez les jeunes.
Je ne crois pas à un retour du religieux avec ces mouvements, je crois plutôt à un retour du besoin de repères dans un monde en implosion. Pour en avoir parlé avec des spécialistes de banlieue, on note la même chose avec l'Islam: en banlieue, l'augmentation de la fréquentation des mosquées ne signifie pas un retour de posture radicale, mais un besoin de repères, de cycles, de lien, dans une société anomique. Après, il y a bien sûr un risque d'embrigadement d'esprits faibles, certes, mais cela reste marginal. Le retour vers le catholicisme et le spiritualisme au sens large, lui, marque plutôt une tendance soulignée par de nombreux psychiatres: le besoin de calme. Dans une époque où le temps de cerveau disponible, la capacité de concentration maximale au bureau est de 12 minutes, où le temps long n'existe plus, la temporalité du spirituel apparaît comme un recours messianique. D'où, malheureusement, l'engouement pour toutes les conneries façon développement personnel, coaching, assertivité et méditation contemplative....
En 2012, espérons que le tango laissera sa place à un programme un peu plus Rock n'Roll, mais à écouter Dominique, François, Pierre, Martine, Ségolène Manuel et les autres, c'est pas gagné...
Demain, retour à Paris, car 6 jours de retraite spirituelle à l'eau ça va comme ça...
10:44 | Lien permanent | Commentaires (0)