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10/02/2022

2022, la haine sans masque

Marine le Pen avait réussi sa dédiabolisation. Elle n'est plus la personnalité politique la plus détestée des français, laissant cette triste place à Jean-Luc Mélenchon. Personne n'avait commenté ce changement, chez les éditocrates. Quand elle a repris le FN, elle était à plus de 65% d'opinions défavorables, et dépassait encore les 50%, en 2017. Elle est à 39%. 39% seulement qui rejettent frontalement le RN. Le résultat de dix ans de sourires, de nazis et crânes rasés mis hors cadres, de storys Instagram avec ses chats, d'adoucissement sur l'euro, l'Europe, l'islam et surtout les "races".

Dans "la langue de Zemmour" Cécile Alduy montre que Marine le Pen n'a employé que 2 fois le terme de "race" dans ses discours et paroles publiques et c'est en défense quand on l'accuse de racialiser le débat. Zemmour, lui, l'a employé 135 fois. 135, pour assumer une "guerre de civilisation entre la race blanche et les autres". Avec une précision scientifique qui n'est pas sans rappeler les commentateurs du site ReinfoCovid qui notent souvent une augmentation de pathologies incurables dans les 48h suivant une injection de Pfizer...

Zemmour ne dédiabolise rien du tout, il diabolise de plus en plus et les condamnations pour incitation à la haine ne l'inhibent pas du tout. Hier, il proposait d'ériger des murs à l'ensemble des frontières européennes, curieuse entorse fédéraliste pour un nationaliste convaincu, mais l'homme n'est pas à une contradiction près. Expulsion des délinquants, peines alourdies, déchéance de nationalité, refus de HLM aux non français, tout, ad nauseam jusqu'à l'inepte interdiction des prénoms musulmans transpire la haine. Et ça marche. Il n'est pas à 25%, bien sûr, mais sans troupes, son segment de pure haine décomplexée est au dessus des 10%. Bien sûr, il a des soutiens financiers et des relais médiatiques incommensurables et ça n'est pas rien, c'est énorme et nul doute qu'un tel appui de grands groupes médiatiques à une candidature rouge ou verte changerait la donne. A minima l'arrêt des attaques... Passons. 

Depuis 10 ans, celles et ceux qui s'alarment de la montée de l'extrême-droite en France sont toujours modérées par l'argument "les électeurs RN ne sont pas racistes. C'est plus compliqué. Il n'y a pas 25% de racistes en France". Et de parler du discours de Philippot sur les services publics abandonnés, le pouvoir d'achat, l'isolement, toute une vulgate de gauche. Zemmour ne s'embarrasse pas de ça, au contraire, il veut diminuer le périmètre de l'État, désarmé l'école dans ces missions éducatives pour la cantonner à la seule instruction, il veut renforcer le ruissellement et financer toute ses invraisemblances, toute cette folie oligarchique par "des mesures contre l'immigration". Avec ça. Ce discours racialiste, séparatiste, qui ranime le pire des ligues fascistes, est sondé entre 12 et 14% depuis trois mois. Va peut être falloir arrrêter de trouver des excuses aux électeurs. Note d'espoir, je dis "électeurs" et pas électeur.ices parce que, pour la première fois, on tient un vote genré : 20% des hommes de moins de 35 ans sont tentés par le vote Zemmour contre 4% pour les femmes. La femme est l'avenir de la démocratie française. 

09/02/2022

Pourquoi faire campagne ?

J'écoute, amusé, les commentaires des autres candidat.es énervé.es que Macron ne soit toujours pas candidat et je me dis que leur impatience trahit le fait qu'ilelles sentent bien que Macron est en train de gagner en ne faisant pas campagne. Tant qu'il n'était pas candidat, Zemmour montait à chaque sondage jusqu'à atteindre un stratosphérique 19%. Ce, parce que toutes ses prises de parole étaient autour de ses thèmes de prédilection. Celles et ceux qui se précipitaient pour l'inviter ne lui parlaient que d'immigration, d'islam, d'insécurité, ses 3 I fétiches. La minute où il a été candidat, il fallait répondre à des questions sur le financement, les salaires, le dérèglement climatique, l'égalité entre femmes et hommes. Il a chuté progressivement et ne remonte pas, depuis.

Macron n'est pas Zemmour, mais la minute où il entrera en campagne, il devra justifier son bilan, son passif dirait Mitterrand. Il a beau répéter qu'il ne fut pas le président des riches, les chiffres sont têtus. Il a beau avoir organisé des kermesses pour rendre la planète et les océans great again, il fut le président de l'inaction climatique et du soutien aux énergies fossiles, aux chasseurs, au glyphosate... Il ne passera pas un bon moment en campagne, il ne veut d'ailleurs pas débattre avec Poutou pour se prendre un équivalent de "l'immunité ouvrière n'existe pas" que le candidat du NPA avait sorti à Fillon. Il n'y a que des coups à prendre sur le fond, et en plus le récit humain sera laid. En 2017, il engrangeait des soutiens chaque semaine. On en pense ce qu'on veut, mais Bayrou, Collomb et tant d'autres, ça racontait la campagne d'une dynamique forte au centre. Mais là ? Toute la société civile, marque de fabrique de la macronie 2017, s'est barrée ou fut virée (Nyssen, Hulot, et d'autres) plus aucune prise de poids, de choix. Il reste le quarterons de fidèles et, soyons honnête, la lie du mouvement. Il ne vendra du rêve à personne en disant qu'il va faire un Rubiks Cube avec Le Maire, Darmanin, Lecornu, Pannier Runacher qui vont s'échanger leurs portefeuilles... Rentrer en campagne, c'est déjà reculer et devoir justifier un lourd passif.

Mais, en attendant ? En attendant, il dit sans le dire "je sais que vous ne m'aimez pas, que vous me trouvez condescendant et autoritaire, mais qui imaginez vous face à Poutine ? C'est ça, président". Et même encravaté, Jadot n'a pas ce genre d'image... En attendant, face aux "convois de la liberté", Macron a beau jeu de rappeler qu'il n'a rien fermé (fors les discothèques...) de tout l'hiver, que les hostos ne furent pas débordés et que peu ou prou, ça a tenu. Bref, tant qu'on ne fait pas campagne, on se dit qu'il n'est pas aussi catastrophique que pourraient l'être les autres et dans une offre disséminée, c'est un atout. Les États-Unis sont tout sauf un modèle de démocratie, mais au moins le président sortant doit faire plusieurs débats en amont et défendre son bilan, les entrevues avec Poutine ou la crise Covid ne leur serve pas de mot d'excuse.... Le premier tour a lieu dans deux mois et Macron en ne faisant pas campagne a pris tellement de champ qu'il est à 99% au second tour. Je ne suis vraiment pas certain qu'il en serait allé ainsi s'il avait dû ferrailler depuis un mois. Après avoir gagné en 2017 précisément en allant parler à tout le monde y compris là où, pensait-on il avait des coups à prendre (les 3h de débat face à Médiapart à 48h du premier tour...), Macron risque bien de sceller sa victoire de l'année sur son mutisme. On ne peut pas dire que ça soit emballant... 

 

 

31/01/2022

La gauche en ruinés

Avec la candidature superfétatoire de Taubira entérinée hier, la gauche n'est pas seulement un peu plus divisée, elle a fait un pas de plus vers la ruine totale. Taubira n'élargit en rien le spectre de gauche : elle mord uniquement sur les électeurs d'Hidalgo et de Jadot. Or, le bloc soc-dem pèse encore 15%, sans doute, mais sans pouvoir assurer aux 3 candidat.es plus de 5%. Mélenchon est le seul sûr et certain de dépasser ce stade, lui qui est donné entre 8 et 13% depuis deux mois. Pour Hidalgo, Jadot et Taubira, le risque est réel de faire moins et de ne pas avoir leur campagne remboursée. Et ça risque de ruiner leurs formations. Le risque est le plus patent pour Hidalgo car le PS a déjà très mal financièrement (si Hamon avait fait 4,9% en 2017, il n'y aurait plus de siège, ils en seraient à un co working) et une campagne non remboursée serait fatale. Taubira siphonnera le PRG, ce dont la démocratie se remettra aisément... Pour Jadot, EELV est habitué aux campagnes modestes, économes, le coup serait dur pour l'égo, mais la formation aux 5 salariés (oui oui) est plus résiliente que ça...

Mais surtout pour la gauche qui a depuis longtemps perdu la présidentielle, il y a la question cruciale des législatives. Car dans le bordel ambiant, avec le niveau de détestation qui atteint Macron, tout porte à croire qu'on ne nous refera pas le coup de 2017 avec une vague LREM bien légitimiste. Il serait beaucoup plus logique qu'on soit en cohabitation Macron/LR et dans ce contexte, toutes les formations peuvent espérer des sièges.... À condition d'éviter le morcellement. Or, passée la branlée du premier tour, toutes et tous les éclopé.es vont annoncer leur envie de se refaire aux législatives. Et là y a risque. On voit mal le PS garder son groupe... Même LFI est menacé. Et EELV, qui a ravit toutes les grandes mairies de France et fait de gros scores aux européennes et aux régionales pourrait payer le prix de la division en ayant à peine plus d'élu.es qu'aujourd'hui (pour rappel, ils n'en ont aucun, impossible donc de faire moins). 

Les élu.es donnent de la visibilité, de la vitalité, au camp de gauche. Ielles apportent aussi des moyens financiers aux partis. Et les moyens, c'est crucial. Le million d'euros dépensés par la PP le rappel, ça permet de parler de vous. Et contrairement à En Marche  en 2016 ou Zemmour cette année (lire les enquêtes de Médiapart sur les soutiens CSP ++), la gauche ne compte pas des centaines de grands donateurs de la finance pour mettre en orbite une candidature. En plus d'être en ruine, la gauche va être ruinée par sa division. Ça ne va pas faciliter la capacité à se relever du KO.