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26/04/2011

Les imbéciles happy few...

JacquesVilleret.jpgAvec le marketing oueb, le pire n'est jamais certain et je dois admettre que c'est avec une certaine réjouissance que j'ai accueilli la nouveauté conne de la semaine, ça: http://www.happyfewconcept.com/

N'en jetez plus, la simple présentation est une espèce d'empyrée de ce que l'on peut empirer (Laurent Ruquier), leur présentation doit être accompagnée de sacs vomitifs, jugez sur pièce: "Happy Few Concept est un site communautaire dédié aux célibataires de 26 à 42 ansdiplômés des grandes écoles et assimilées. Happy Few Concept organise pour ses membres des événements culturels, sportifs, festifs et sociaux". 

Tout y est ! D'abord, évidemment, "de 26 à 42 ans", le ticket aujourd'hui, c'est 42 ans... A 42 ans tu es encore un célibataire triomphant, in, au top de la séduction, digne d'intégrer ce gotha des âmes esseulées mais volontairement car elles n'ont pas trouvé de partenaire à leur niveau, à 43 tu n'es plus qu'une vieille merde incapable de se maquer... Tout ça n'est pas très "réformeWoerthcompatible" si on doit bosser jusqu'à 62 ans, on est dans sa carrière à bloc plus tard, 42 ça me paraît stupide; surtout qu'à partir de 45 on te refile plus de boulot, donc t'as du temps pour glander sur happyfew, mais chômeur les intéresses tu encore? Ha cruel dilemme !

Bon, admettons, tu lèves tes répugnances liées à l'âge et tu y vas, outre un accès direct à la crème que propose le site ? C'est là que c'est grand: ils s'occupent de tout et propose des happy choses (mais pas de happy meal...). Là encore, l'original étant plus drôle que le sarcasme, je te le livre tel quel: 

Happy date: "Happenings culturels ou festifs organisés le soir en semaine (expos, pièces de théâtres, concerts, conférences selon thématiques, ou encore dégustations etc.) suivis d’un verre ou d'un dîner". C'est y pas beautiful ça mon ami ? Des "happenings festifs", ce doit être des ballons de baudruche et des pétards, un "happenings culturel", l'irruption accoustique de musique malgache baroque remixée en techno slovène; à l'issue du dîner, moyennant un supplément on doit pouvoir négocier un "happening baisant".

Happy party: "After work organisés de façon régulière en semaine et soirées à thème privatives qui réunissent tous les Happy Few dans des lieux parisiens tendances". Alors en français ça donne quelque chose comme, vient boire des mojitos au champagne en mangeant des sushis sur la terrasse d'un grand magasin avec vue sur la Seine et concert de Flamenco live avec des gens que tu connais pas. Soupir de ne pas profiter de la soirée du coup, soupir contrebalancé en souffle coupé quand tu vois l'addition, qui place le bout de sushi au prix du Beluga...

Happy project: (mon favori) " Projets économiques, sportifs, sociaux, humanitaires, ou voyages rassemblant les Happy Few autour d'un dessein commun (week-end ski, projet de microcrédit, aide aux personnes en difficulté etc.)". Là, niveau hypocrisie, je pense qu'on perce la couche d'Ozone.... Accoler le week-end au ski (si possible à Méribel avec option champagne en boîte) et l'aide au SDF et l'afficher comme un argument de vente. Note: imaginer le sourire de la personne en charge de la commercialisation du site et se promettre de le faire disparaître à grands coups de talon...

Happy sunday : "Activités sportives ou culturelles organisées le dimanche (cours de danse, de photo, journée à Roland Garros, Course à Longchamp, tournoi de golf ou de tennis etc.) suivies ou bien précédées d'un brunch, d'un verre ou d'un dîner". Voilà le dernier pour la route, ce verre qu'on vomit dans le décolleté à paillettes ou sur le t-shirt Christian Audigier. L'indécence comme pour le passé, est présentée là: le dimanche, après avoir relevé ses mails de boulot, on sait pas quoi faire, donc prenez nous comme des moutons et laissez nous dans l'ouest parisien, le choix des 3 lieux a de quoi faire sourire et pleurer en même temps....

Voilà donc le nouveau site qui se propose de changer la vie, non pas des Cendrillon, mais des pauvres petites princesses qui ne trouvent plus de princes car ceux-ci restent devant leurs écrans à remplir des excel et des powerpoint et à assumer des call aavec l'Asie à des heures impossibles, car c'est là que ça se passe... Ce qui me navre, c'est d'avoir appris l'existence de ce marché de la viande label bleu UMP sur France Inter... Z'auraient pu faire une chronique sur Pina, ou sur l'expo Caillebottes à Jacquemart André où je compte foncer bien vite. Soudain, l'effroi m'étreint: Jacquemart André étant dans les beaux quartiers et un lieu pour happy few, je risque de croiser un bataillon de happy dater ou de happy partyer.... Il faudra vivre dangereusement...

Demain, à l'approche de la canonisation de Jean-Paul II, nous sortirons de notre déambulation consumériste pour interroger le sens de la vie... 

25/04/2011

Pinadmirable

pina-wim-wenders.jpg"Dance, dance, otherwise we are lost". Je m'en allais donc hier voir un film dont l'exhortation finale est "guinche, guinche, sinon on est foutus". Moi... Moi dont les goûts en matière de bailar sont à peu près ce que le sandwich aux rillettes est à la gastronomie. J'aime les chorés de Claude François, voyez-vous ? Que ne m'étais-je embarqué dans cette galère fors ne pas me montrer buté auprès de la belle personne qui m'avait demandé de l'accompagner ?

Première surprise des plus agréables: j'ai enfin compris à quoi sert la 3D. Pour Avatar, j'avais trouvé cela confondant de frime, un gadget qui peine l'arrête du nez sans rien apporter. Là, si. Avec la 3D, les corps dansants virevoltent vraiment face à nous et nous invitent à les rejoindre. N'ayant pas pris de LSD, je ne me levais pas dans la salle comme dans un mauvais remake de "Hair" français, (Note pour plus tard, un "Cheveu" avec Romain Duris, Marion Cotillard, Audrey Tautou et Catherine Deneuve en pygmalione, ça en jetterait, non ? Non...) mais je les voyais vraiment s'affairer tout près.

Bon, donc, la 3D c'est efficace, mais ce n'est pas tout. Le film est sous-titré, mais je ne saurais vous dire depuis quelle langue. Officiellement, Bausch parle allemand, et ses danseurs sont français, sud-américains, russes, américains, italiens et des asiatiques aussi... Le premier miracle du film tien là: elle a recrée une tour de Babel dans sa compagnie: toutes ses langues qui s'ignorent se comprennent dès que les corps dansent. 

Outre la 3D et les différences langagières, je fus enchanté de voir que l'on peut faire de la danse contemporaine sans prêter une attention démesurée au corps. Pour danser, mieux vaut avoir une certaine condition physique (certaines scènes sont, du point de vue de la gesticulation, à couper le souffle) mais Bausch travaille avec des jeunes et des vieux et pas uniquement des musclés, des ciselés, des apprêtés, des beaux. Elle vomit Lagarfeld et c'est assez rassérénant.

Du coup, on se sent plus proche de ces danseurs qui évoluent dans des décors poétiques, on en viendrait presque à vouloir les rejoindre alors mais un reste de pudeur nous fait rester là où nous sommes. Et on y est bien, posés devant un film qui mêle des témoignages très émouvants de grands danseurs expliquant qu'elle a changé leur vie et des reprises de ballets d'une incroyable diversité.

Je ne dis pas que je reverrais nécessairement le film, de peur d'abîmer l'émotion ressentie hier; en revanche, je ne dirais pas forcément non à l'invitation d'un ballet et ça c'est un miracle qui vaut largement la résurrection du Christ que nous célébrons aujourd'hui...

Demain, nous commencerons à réviser pour la canonisation de Jean-Paul II, doit y avoir des chants et des chorés, même si elles ne seront pas de Pina Bausch...

23/04/2011

L'ENA de la diversité, caramba encore raté...

Caramba_encore_rate.jpgEt au milieu coule une rivière. De larmes. Des larmes de rage et d'humiliation. Celles des 15 candidats "issus de la diversité" qui se sont rétamés à l'ENA. Au risque assumé de recevoir des mails d'insultes des couillons qui attaquent Zemmour et Menard SANS écouter ce qu'ils disent, je veux dire que c'est tant mieux: la tartufferie a ses limites. Si une poignée d'entre eux avait intégré, les storytellers ou mythocrates de droite se serraient massés, trop heureux, pour hurler le rétablissement de l'ascenseur social et bla bla bla... 

Donc, bon, fin de l'histoire : 15 inscrits, 15 rétamés. Esquisse d'une autopsie ? Selon Pécresse et les autres huiles sondées sur la question, c'est à cause du profil des candidats. Mais non, je vous venir, pas de délit de sale gueule. Enfin, si. Mais biaisé, les candidats étaient trop littéraires. Quelle insulte...

On a essayé beaucoup de régime endogames: le gouvernement des généraux est sans conteste ce qu'il y a de pire, mais le gouvernement des philosophes n'a pas plus triomphé; depuis 30 ans, dans tous les pays de l'OCDE on déverse le régime du moins pire: le gouvernement des technocrates. En France, on a un nom pour ça, l'ENA. Ce n'est pas, évidemment, les élèves de cette école qui sont en cause. Ni la qualité de l'enseignement. Ne poussons pas une complainte à la bob poujade, ça trouverait trop d'écho dans la France d'aujourd'hui. Non, la faiblesse infinie de l'ENA c'est son irréfragable côté élite française hiératique, incapable de se mouvoir, de s'ouvrir. On sédimente des codes et des codes avant d'arriver au concours d'entrée de l'ENA. On polit les divergences de langage, d'opinion politique et économique, de conception de la justice... On empile du mainstream bourgeois, des codes d'élite de culture général, des références et des mots-valises (hier "République", aujourd'hui "vivre ensemble") et on obtient un énarque.

Or, notre élite est historiquement blanche et mâle. Et ils se ressemblent avec leurs mêmes costumes, mêmes formules, mêmes solutions... On dit que les recalés étaient trop littéraires ? Fabius et Juppé, énarques, sont aussi agrégés de lettres, mais ils ont pris le soin de penser l'économie comme Le Monde, bréviaire de l'énarque, dit qu'il faut la penser. Ils ont suivi le catéchisme d'Aron, Rémond et Boudon et leur différence s'est estompée. La génération suivante, celle des Copé ou Moscovici, idem. Et récemment, un Wauquiez nous prouve qu'un énarque reste un énarque, un technocrate français, impressionnante machine intellectuelle, capable de compulser des notes, compiler des rapports pour in fine "impulser" une révolution divergente de 2% de celle de ses prédécesseurs. La révolution du 2%, c'est ça qui remue les masses...

Or, les 15 candidats recalés n'entraient pas dans ce cadre de 2%, ils ont des références différentes, des idées différentes en matière d'économie, de justice d'éducation ou de santé... Toutes conceptions non admises par les catéchumènes responsables de l'intégration... Exit l'audace, welcome plus encore de résignation et de frustration...

Honnêtement, lorsqu'on voit les résultats obtenus par 30 années de conformisme mou en matière de technocratie, ces évictions sont déplorables. Heureux les héritiers qui peuvent faire de longs voyages; les damnés eux aussi, ils iront voir ailleurs si l'esprit français y règne...

Demain, nous chercherons fiévreusement les oeufs, pour la plus grosse cloche, elle est trouvée: ce philosoponcule de MBK et son "Après Badiou", livre le plus drôle de l'année; involontairement drôle, bien sûr...