25/02/2011
Zemmour du risque...
Curieuse, la folie des éditorialistes autour d'Eric Zemmour. Depuis quelques années, plus on dit qu'il pourrait être viré du Figaro (son poste original) plus il démultiplie ses employeurs: France 2 et I Télé toutes les semaines et RTL tous les jours. Ce n'est plus un journaliste, c'est une réclame ambulante.
Là où je ne suis plus, c'est quand je vois que FOG le défend au nom de la sacro-sainte liberté de pensée, comme s'il était notre nouveau Voltaire. Le directeur du Point convoque Tocqueville et l'histoire pour sauver un type qui, pour ses 50 ans avait organisé une soirée à thème "Napoléon" en reconstituant des décors et costumes (c'était dans "Marianne", j'étais pas sur la guest list) ... Et Novelli, au titre de l'UMP vient de le convier à un débat sur le thème "y a t'il trop de lois encadrant la liberté ?". Mais qu'est-ce qu'ils ont tous à soutenir ce type ?
Vous voulez un polémiste réac ? Prenez Slama ! Vous voulez un parano islamophobe ? Essayez Alexandre Adler... Zemmour doit sans doute son succès au fait qu'il est islamophobe,misogyne, anti-gay, mécontemporain, parano et anti show-biz... Convier Zemmour c'est vouloir se payer un ensemble de musique classique et faute de moyens, prendre un homme orchestre avec la mélodie à l'avenant...
Tout de même, une telle folie laudatrice autour de cet homme mérite que l'on s'y plonge. Tous les patrons de presse, les éditorialistes et un grand nombre de politiques louent "la très grande intelligence" et "l'érudition" de Zemmour. Son comparse Eric Naulleau ose même "s'il critique durement les romans d'aujourd'hui c'est qu'il a été élevé dans l'amour des classiques et voue un culte au beau style; quand on a bu que des grands crus de Bordeaux, le beaujolais passe mal"... Tss, c'est vraiment la preuve que lorsqu'un type vous fait peur, on peut dire n'importe quoi.
Intelligent, je n'en sais rien, je suppose que pour gagner autant d'argent avec une pensée de beauf pareil, il faut une bonne dose de roublardise mais pour le reste, pitié ! Il multiplie les contresens historiques, s'exprime dans un français leucémique et sort toujours trois citations de Chateaubriand ou Saint-Simon avec la classe d'un vendeur d'aspirateur. Je n'exagère pas une seconde et si vous avez un quart d'heure à perdre, vous pouvez faire l'expérience en allant en bibliothèque emprunter un opus du sieur Zemmour; pas la peine de lui accorder des droits d'auteurs... Comment comprendre la pensée de l'essayiste Zemmour ? Il faut lire ses romans... Si si.
Mon facétieux paternel m'avait offert "l'Autre", le roman sur Chirac. Quel blagueur, ce père. En attendant, j'ai ri aux éclats et je ne crois pas que tel fût l'intention de l'auteur. En un roman, on comprend tout l'univers mental de notre polémiste. Les hommes ont le teint "bistre", les mains "calleuses", le torse "étique", les femmes "taiseuses, travaillent dur". Dans l'univers de Zemmour on boit "dur", baise "sec" et s'étreint "virilement"... Ce livre condense tous les clichés stylistiques que la terre ait porté, je pourrais le passer à mes étudiants en cours de première année: "apprenez à éviter les clichés dans un texte: saurez-vous dénicher les 23 qui se trouvent dans cette double page?".
Ma remarque ne vaut pas pour le Lagarde et Michard. Je crois surtout qu'un style aussi caricatural trahit une pensée qui l'est autant et ramène au fond Eric Zemmour à ce qu'il est réellement: un beauf. Un beauf très travailleur et véhément. Celui qui gueule si fort au bistrot que les autres se taisent; même quand il vomit les arabes, les pédés, les gonzesses et les pseudos-artistes... Mais où est donc passé le patron du café qui le fout dehors avec un coup de pompe au cul en hurlant "mais tu vois pas que tu gênes les clients là ?"...
Demain, il y a sans doute des milliers de choses fascinantes à faire, mais surtout à 18h, live from Twickenham, ce sera le crunch !
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21/02/2011
Carte postale de Lisbonne
En février, la douce musique lusophone et un brin de soleil avec ou sans carnaval, ravive le sourire du castor.
Trois jours à Lisbonne, donc, c'est court mais bien assez pour recouvrer la pêche quand la grisaille règne à Paris. Passée l'heureuse surprise d'un atterrissage marin, découverte de l'hôtel trop bourgeois pour être honnête. Les soldes sur Internet provoquent de bien étranges surprises, tous les autres clients sont de respectables quinquagénaires, couperosés de frais quand les petits jeunes débarquent avec l'air niais devant la vue de la chambre donnant sur un vaste parc (Edouard VII) et au loin, le RITZ de l'hôtel en lettres argentées...
Tout le monde ayant dit "Lisbonne = fondation Gulbenkian, docilement, nous obtempérons. C'est vrai, c'est fou. Penser que ce bon brave Calouste a tout acheter avec ses sous laisse songeur. Des merveilles abyssiniques, égyptiennes jusqu'à une collection de Manet (le garçon aux bulles) Renoir (Madame Monet), Boudin et autres Corot, c'est dingue. En plus, le mécénat se prolonge aujourd'hui car l'on peut visiter ce très beau musée pour 4 euros... Mais, et il y a un mais, Gulbenkian, c'est bien notamment pour le parc qui abrite le musée, mais ce ne fut rien comparé au choc du Centro Cultural de Belem... Trois heures passées en un rien de temps. Des expos temporaires sur les cartes (big up à la prescience de Houellebecq et son Ged Martin avec ses cartes Michelin) quelques Picasso et surtout, fait rare, de très bonnes vidéos, notamment un film génial du réalisateur de Matrix en 2000, "The Matrix Project" ou des gamins commentent le marché de l'art avec une perfidie et un esprit acerbe jamais atteint sans paraître gratuitement méchant... Et puisqu'on parle de gratuité, le centre est sorti de terre aussi grâce à un mécène et ne fait pas payer l'entrée.
Du coup, en sortant, ébahis, nous traînions et découvrions que le Centre comportait un amphithéâtre dédié au spectacle vivant ce qui me permit de m'initier à la danse, en douceur, puisque le spectacle de Platel se situait à mi-chemin entre les Deschiens et Almodovar pour une odyssée dans les bas-fonds d'un cabaret de travesti avec assez peu de danse et beaucoup d'humanité...
Avec toute cette culture récente, nous négligeâmes les très nombreuses églises historiques pour nous perdre dans des heures de ballade: les quartiers de Lapa et Alfama méritent le détour et le retour et le redétour jusqu'à s'y paumer... Quelques miradors et belvédères, beaucoup d'escapades gourmandes avec des vins blancs moelleux presque mielleux et un retour aux sources pour un castor: beaucoup de poissons. Notamment, en face de Lisbonne, à Cacillas, un resto paumé nommé "al final de ponte" où le pagre et la salade de poulpe valent largement le détour en bateau... Pour en finir avec la bouffe, les cultissimes pasteis de belem méritent tant le détour que nous fîmes plusieurs crochets pour nous en regoberger...
Enfin, la nuit Lisboète est des plus charmantes, que ce soit dans les ruelles serrées du Bairro alto et ses bars très bon marché poussant à la consommation et où tout le monde fume, où à l'inverse, au bar du 30ème étage du Sheraton où la vue à couper le souffle fait presque oublier la mauvaise compagnie de la haute société laborantine qui vient deviser gravement de la crise, des cocktails à 15 euros à la main... La crise, nous l'entendîmes aussi plus joyeuse, au détour d'une ruelle escarpée, les syndicats avançaient en t-shirt noirs, unis et chantant sous les yeux complaisants de la maréchaussée. Sur cette vision inattendue, il était tant de rejoindre le tarmac....
De retour à Paris, la radio rapportait que DSK disait que Nicolas était nul en maths, alors Jean-François répondait c'est celui qui dit qui y est... Soupir, vivement le prochain départ.
Demain, nous tenterons la teinture au brou de noix pour ressembler à François Hollande.
08:35 | Lien permanent | Commentaires (1)
17/02/2011
Portrait de la déliquescence culturelle en Frédéric Martel
L'adage populaire est respecté, quand on tient un bon coup faut qu'on y retourne...
Frédéric Martel, l'inoubliable auteur de Mainstream un livre si bête que les bras m'en tombent, est décidément un grand monsieur. Après avoir eu un débat avec des étudiants qui ne comprenaient que pouic aux thèses de Martel (mais m'sieur, c'est grave de vouloir dominer le monde avec Disney, c'est de la résignation, non ? Pas mieux !) je me suis dit que je devais accorder une autre chance au garçon. Il est si encensé. Dont acte.
D'abord j'ai écouté quelques extraits de son émission de France Culture, "Masse Critique". C'est déplorable et intolérable à la fois; déplorable car la nullité syntaxique ("La Monnaie de Paris, c'est en face la Samaritaine" (sic, la semaine dernière !!!!) la dispute aux images pitoyables ("mais alors, vos ouvriers seront visibles derrière leur vitre comme les singes derrière une cage")... On sent toute la morgue du petit cultureux qui ne vit que pour les ragots et les bruits de chiottes sur les coucheries des magnats... Martel aurait fait un très honnête courtisan. Problème, il est animateur et producteur sur une radio publique, c'est là où sa médiocrité devient intolérable: c'est avec nos impôts...
Bon, mais je me suis dit que ce Saint-Simon de sous-préfecture avait une si haute opinion de lui-même, qu'il devait être le genre de type a être sur Twitter et Facebook en acceptant n'importe qui comme contact et en renouvelant son statut 20 fois par jour (plutôt une dizaine de fois, en fait... Mais moi c'est une seule...)... On apprend des ragots désopilants sur les fanfreluches des uns et des autres, des réflexions politiques vibrantes de bêtise et culturellement, cette grande saillie "j'ai jamais lu un livre de Nourrissier, niveau littérature de droite je préfère Huguenin"...
Arrêtons nous deux secondes sur cette connerie. Huguenin est un auteur culte, mort jeune, auteur d'un roman très largement surestimé "la côte sauvage" et d'un journal, pour le coup, très puissant jusqu'à faire nourrir des complexes pour qui veut écrire un jour. Et pis c'est tout.
Nourrissier, qu'on l'aime ou pas, est l'auteur d'une oeuvre, plus de 30 livres, et une somme immense "A défaut de génie", un styliste remarquable et un anthropologue de la bourgeoisie française de grand talent... Mais tout Martel est là, feignasse malin, encensant ses potes et les demis-mondains, méprisant les laborieux. On sent à nouveau toute la morgue de la gauche caviar dans son "la littérature de droite", mais Martel le gaucho demande actuellement des émoluments délirants pour ses bons services, le genre d'apôtre désintéressé, mais pas trop quand même; m'est avis que les journaux en parleront mieux que moi car ses méthodes cavalières en courroucent plus d'un...
Puisque le garçon analyse les expressions à la mode, l'une d'elle lui va comme un gant "dégage Martel", qu'il aille répandre ses conneries sur Europe 1 où les sièges vacants sont légions, avec le blé de Lagardère ce sera très bien...
Demain, le guide m'ayant convaincu j'irais sans doute faire un tour à la fondation Gulbenkian...
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