12/05/2018
Zac et Zad
J'espère qu'on réservera, en école de journalisme, un cours de déconstruction en partant de cet article du Point consacré à la nouvelle vie de Jérôme Cahuzac, reprenant lui même un reportage de Paris Match sans aucune distance. Sortez les violons, retenez vos larmes, ça tangue. Qu'apprend-t-on ? Que la société se montre d'une injustice folle avec l'ancien ministre qui "n'ose plus aller au cinéma de peur de prendre une baffe". Tout l'article, fort long est exclusivement à décharge d'un homme qui a été condamné, qui a reconnu avoir menti et pratiqué la fraude fiscale alors même qu'il était ministre en charge de la lutte contre ladite fraude.
On commence par apprendre, injustice folle, qu'il dîne souvent chez son avocat, maître Szpitner, car il n'a plus le goût d'aller au restaurant où "les gens l'agressent". On reprend une formule aussi grotesque. Notez que ça n'est pas faute de moyens que l'ex grand argentier de l'Etat ne mange plus dehors, mais parce que la foule est animée de mauvaises intentions. Eu égard aux tavernes qu'il fréquente, je doute que des dames en vison ou des messieurs en complet osent aller plus loin que "monsieur Cahuzac, vous êtes un sacripan". Passons.
Plus loin, mon passage favori : celui où le journaliste explique qu'il est même difficile pour l'ancien ministre d'aller aider des ONG, car elles exigent une "clause de confidentialité". Notez qu'ils ne lui interdisent pas d'offrir ses services, loin s'en faut, elles lui demandent juste de ne pas en faire de publicité. Il est tout de même assez élémentaire pour Médecins sans Frontières ou autres de ne pas vouloir être associés à un délinquant qui a détourné suffisamment d'argent pour créer plusieurs cliniques...
A la fin de l'article, la fine plume parle pour Jérôme Cahuzac de "descente aux enfers" après avoir dit qu'il vit dans une baraque en Corse, avec son chien, passant ses journées à faire du sport et lire. Si ça c'est "une descente aux enfers", comment qualifier le sort d'un délinquant de droit commun, qui n'a pas payé sa pension alimentaire et qui se retrouve avec trois co détenus dans sa cellule aux Baumettes, voit des rats au quotidien et vit avec l'angoisse d'être violenté ou violé ?
Pensez que dans le même journal, on peut lire des choses sur "l'ultra violence" des zadistes, eux qui voulaient faire des fermes bios et sans intrants, coupables au pire de quelque négligence administrative, mais même pas omettant de payer leur dû, façon Thévenoud. Il faudrait vraiment enseigner cela en école de journalisme car si Camus a raison de dire que "mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde" ça n'est rien comparé au fait de mal nommer les coupables...
10:21 | Lien permanent | Commentaires (27)
05/05/2018
A quand un référendum chez Carrefour ?
C'est bien connu, les révolutions tombent souvent sur le mauvais gars. Louis XVI était un brave gars comparé à ce furoncle de Louis XV... Hier, donc c'est Jean-Marc Janaillac qui a du démissionner pour la situation chez Air France héritée de l'autre taré autocrate et esclavagiste d'Alexandre de Juniac. Je n'aurais pas fait de Janaillac le phare avancée de la reconquête sociale en France, mais de tous les grands patrons qu'il m'ait été donné de cotoyer, c'est sans conteste l'un de ceux qui a la fibre sociale la plus avancée. D'où le fait que je ne vois pas le résultat d'hier comme un triomphe populaire premier. Bien sûr, l'ineptie de la crise actuelle est symbolisée par le fait que la direction aurait perdu moins d'argent à céder aux revendications des syndicats plutôt que d'essuyer un conflit dont les grèves ont plus coûté à l'entreprise... Après, plus de 55% de NON à 80% de participation, c'est sans appel. Et ça veut dire qu'un certain nombre de cadres ont voté contre leur direction. Sans doute pas la majorité d'entre eux et encore moins le COMEX, mais nombre de cadres quand même. Ca interpelle...
Pourtant, ce référendum chez Air France interpelle en ce qu'il dit des colères à la base des entreprises. Voilà sans doute une des entreprises les plus justes de France en termes de ratio conditions des travailleurs / conditions des actionnaires, une des entreprises les moins violentes socialement, les moins mondialistes, et bim le mur. La cruauté des chiffres condamnait la démarche de la direction : après des années de gel de salaire, des augmentations trop chiches face à des centaines de millions de profits ne passait pas.
Mais ces chiffres sont billevesées par rapport à Carrefour, qui empoche 800 millions au nom du CICE, où les actionnaires se gobergent, et où on licencie à tour de bras, et parfois pour faute grave comme "avoir récupéré des coupons à la caisse"... Cette société est une honte du droit social, le plan de Bompard se torche avec un siècle de conquêtes sociales. Si un référendum sur la justesse de son plan pouvait se dérouler dans le calme, il prendrait 90% de NON et sa démission, pour le coup, me ravirait. Mais le référendum n'aura pas lieu. Pas plus que le droit à l'opposition pour les syndicats. Comme chez Amazon, où l'on puce désormais les employés, flique leur pause toilettes... Amazon qui encourage le dumping fiscal pour implanter son siège social aux Etats-Unis, incarnant ce paradoxe où ils demandent aux villes des logements abordables, un bon réseau de transports en communs, d'école et d'établissements de santé, tout en refusant eux mêmes de s'acquitter de leurs impôts... Si on sondait les employés et les parties prenantes (clients) d'Amazon par référendum, il devrait rendre et partager l'argent. Mais ça n'arrivera pas, il continuera à manager par la peur et le chantage, le racket soft, l'horreur à tous les étages.
Politiquement, les 5 millions de fonctionnaires humiliés depuis des années, méprisés socialement à qui on conteste un jour de carence, dont on gèle les années depuis si longtemps qu'on peut commencer à parler d'ère glaciaire et qu'on menace maintenant d'alignement par le bas de leur retraite, s'ils pouvaient voter sur la justesse de ces mesures, que dirait-il ? Evidemment, ils éjecteraient Darmanin, et ils auraient raison.
Hier, la colère n'est pas tombée sur le plus mauvais, loin s'en faut : mais cela doit nous interroger tous sur la voie à suivre. Les pétitions avec des centaines de milliers de signataires qui restent lettre mortes montre les limites de nos consultations actuelles. La loi Pacte de fin d'année sur les entreprises à mission ne prévoit rien pour la prise de parole et de pouvoir des salariés. C'est une funeste erreur. L'avenir est sans doute dans l'imposition aux actionnaires de ce genre de consultations car quand on pense à Carrefour, la peur doit changer de camp.
11:55 | Lien permanent | Commentaires (0)
03/05/2018
1 milliard en moins pour l’hôpital, 1 milliard en plus pour les nababas
Hier, Macron a explosé le mur de l’indécence avec une double entorse à son programme présidentiel symptomatique du président de l’injustice sociale qu’il est. Contrairement à sa promesse de sanctuariser le budget de l’hôpital public, il a annoncé hier 1 milliard d’économies. 1 milliard en moins de choses concrètes : des embauches pour lutter contre l’attente, pour passer plus de temps en soin... des augmentations aussi, puisque nous sommes l’un des rares pays où le salaire des infirmièr(e)s soit sous le salaire moyen du pays. 1 milliard 100% utile en somme. L’hôpital public remplira encore un peu moins sa promesse, faute de moyens et ceux qui son pressés, bénéficient de relations et de moyens paieront pour leur santé. Tant pis pour les autres. Le même jour il annonce « la suppression d’une taxe qui ne rapporte rien », il laisse fuiter 70 millions d’euros... un clic sur le site de la Cour des Comptes (ce qui ne vaut pas le Pullitzer, hein) nous apprend qu’en 2017, ce sont 830 millions qui sont allés dans les caisses de l’Etat grâce à elle. 830 millions évaporés de la poche des ultra ultra riches dans l’espoir chimérique d’amener plus de yuppies en France. Nous sommes déjà de loin le pays d’Europe qui a le plus de milliardaires. Plus on fait des politiques pour eux, plus l’égalité s’en va et plus le sort de ceux qui naissent dans les quartiers populaires se complique. Et on continue en ce sens. Hier Macron a donc retiré 1 milliard 100% utile à l’Etat et offert 830 millions à ceux qui sont devenus 100% nuisible au bien commun. Je ne vois pas de plus grande violence qu’une injustice pareille qui relève vraiment du viol fiscal...
09:58 | Lien permanent | Commentaires (0)